Une proposition de loi instaurant le droit à la restauration scolaire a été déposée à l’Assemblée nationale le 7 février 2012. Qu’en pensez-vous ?
La FCPE est à l’origine de ce texte. Nous nous en réjouissons forcément ! Il serait temps que l’égalité d’accès à la restauration scolaire, martelée par la jurisprudence depuis de nombreuses années, soit validée en droit positif.
On ne peut pas laisser les usagers se débrouiller ainsi seuls, face à des élus qui n’ont pas voulu prendre en considération l’évolution du nombre d’enfants ayant besoin de déjeuner à la cantine ; qui ont pris du retard dans l’aménagement de leurs équipements et pratiquent des restrictions d’accès en espérant ne jamais se faire prendre.
Un droit établi pourrait aussi permettre aux communes de se prévaloir de dotations générales de fonctionnement plus importantes. Le propos n’est pas en effet d’étrangler qui que ce soit, mais de faire respecter le droit des enfants.
Cette proposition de loi maintient la libre fixation des tarifs. Pourtant, de ce point de vue, les écarts d’une collectivité à l’autre sont tels que l’égalité d’accès est loin d’être garantie…
La restauration scolaire est un service social à vocation éducative qui participe à l’éducation au goût, à l’apprentissage d’une alimentation saine. Les familles les plus précaires ne devraient surtout pas en être écartées par l’exigence d’un certificat de travail, ou par l’application d’un tarif prohibitif.
Il serait logique qu’il y ait partout des tarifs dégressifs débutant à moins de un euro. J’exclus, bien sûr, les communes rurales, qui se doivent de faire simple.
Ensuite le débat reste ouvert sur la gratuité pour les plus démunis. De toute façon, à moins de 50 centimes d’euro le repas, si les parents ne paient pas, c’est qu’ils sont réellement dans la détresse.
Le plus important est le suivi de ces familles par le service social de la collectivité. Ensuite, un tarif social implique nécessairement une redistribution des coûts vers les foyers les plus aisés, même si personne ne paie jamais le coût de revient complet de la pause méridienne.
Que pensez-vous de la politique tarifaire appliquée dans les collèges et lycées ?
Départements et régions devraient remplacer les aides à la demi-pension par une tarification dégressive, et s’épargner l’étape intermédiaire d’unification des tarifs, que certains veulent mettre en place. Je trouve cela inutile !
Il vaudrait mieux faire d’emblée une tarification dégressive, quitte à procéder à une expérimentation dans quelques établissements représentatifs de la population.
Ceci est surtout valable pour les départements, dont le territoire est plus homogène que ne l’est celui des régions.
Et si le conseil général entretient un dialogue construit avec ses communes, il lui est facile de connaître les tarifs dégressifs déjà pratiqués. Du CM2 à la 6e, ce sont les mêmes élèves, à un an près !
Bien sûr, il ne s’agit pas que la collectivité mette son budget en péril. Il suffirait qu’elle se garantisse une marge d’erreur confortable, quitte à baisser les tarifs l’année suivante si les recettes sont trop importantes.
Cette compétence ne date que de 2006, mais il est temps de l’assumer !
Indexation sur les revenus : mode d’emploi
L’Association nationale des directeurs de l’éducation des villes (Andev) et l’Association nationale des responsables de la restauration territoriale (Agores) travaillent à l’élaboration d’un guide sur la tarification de la restauration scolaire. Elles nous livrent ici leurs préconisations.
Préalables à la réflexion sur la tarification dégressive, les élus doivent préciser leurs objectifs politiques et, face à des administrés qui trouvent parfois leur tarif excessif au regard du coût de l’assiette, les services doivent connaître précisément le coût de revient de la pause méridienne.
La connaissance de la population et de ses revenus, pour fixer les tarifs plancher et plafond, est aussi indispensable.
Enfin, l’analyse des tarifs existants – taux de fréquentation, répartition de la population par tranche de tarifs – permet de déceler d’éventuels déséquilibres. Au moment des simulations, il convient d’analyser l’impact de chaque tarif sur le « reste à vivre » des familles.
Une attention particulière sera portée aux effets de seuil, qui, lorsqu’ils ne sont pas lissés, peuvent conduire à un tarif trop élevé par rapport à l’augmentation de revenus.
L’évaluation régulière doit permettre des ajustements.
Cet article fait partie du Dossier
La restauration scolaire monte en gamme
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Sommaire du dossier
- Restauration scolaire : l’AMF pointe les efforts des communes qui font face à des difficultés
- Les lycéens réservent leurs repas
- Egalim : les contrôles ont commencé
- Les régions voient l’avenir dans l’approvisionnement local des cantines de lycée
- Le modèle des entreprises publiques locales, une bonne carte en restauration scolaire
- En régie ou en externe, les fermes municipales en pleine croissance
- En quête d’attractivité, la restauration collective se mêle de formation initiale
- Une cantine mutualisée qui coche toutes les cases
- « L’enjeu est de rétropédaler par rapport aux pratiques alimentaires des années 60 »
- Qui n’a pas sa légumerie ?
- « La collaboration entre collectivités et gestionnaires d’établissement est centrale »
- Regroupement ou petites unités, comment atteindre la qualité en cuisine ?
- A Saint-Denis, la cantine gratuite pour davantage d’égalité
- Le groupement de commandes Tremplin tire les conclusions de tests sur des contenants inox
- Le label Ecocert « En Cuisine » valorise les collectivités engagées pour une alimentation saine
- La ville de Poitiers met tous les plats sur la table
- Le référentiel pour la restauration collective attendu au premier semestre 2024
- Les acheteurs des cuisines collectives sont appelés à négocier
- Menu végétarien hebdomadaire : deux, un ou…. zéro ?
- L’Anses a tranché : pas de limite de fréquence pour les menus végétariens
- Comment atteindre 20 % de bio en restauration collective ?
- Du rififi dans les cantines scolaires
- Restauration scolaire : les communes s’interrogent sur leur capacité à tenir les objectifs de la loi Egalim
- « La crise nous a ramenés à des pratiques qu’on n’aurait jamais dû désapprendre »
- Dans les cuisines des projets alimentaires territoriaux
- « Les collectivités territoriales peuvent reprendre en main leur politique alimentaire »
- Haro sur le plastique dans les cantines strasbourgeoises !
- Zéro plastique, bio, local : les cantines cherchent la bonne recette
- 4 enjeux clés pour des cantines participatives et responsables
- Les légumes hors calibres valorisés pour la restauration collective
- Le zéro plastique, un objectif pas si simple à atteindre
- Approvisionnement : tisser des réseaux, bâtir un calendrier
- Budgets : un surcoût certain, maîtrisable et assumé
- Les achats écoresponsables à l’épreuve du Code des marchés publics
- « Les maires sont parfois obligés de tricher pour travailler avec un prestataire », regrette Philippe Durrèche
- « Déléguer n’exclut pas des compétences en interne », prévient Christophe Hébert
- Economies d’énergie, réduction des déchets : à l’ère de la cuisine nouvelle
- Les tarifications les plus courantes au banc d’essai
- Tarifs : faire face à l’urgence sociale, mais jusqu’où ?
- « La tarification dégressive devrait être la norme » – Jean-Jacques Hazan (FCPE)
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