Faut-il revoir la carte des régions ?
Après les réformes territoriales de ces dernières années, il ne faut pas un nouveau « big bang territorial ». Notre pays a au contraire besoin de stabilité et de cohérence dans l’organisation des collectivités territoriales. Nous garderons les treize régions en ouvrant un droit d’expérimentation à l’Alsace.
Confirmerez-vous le financement des régions par une fraction de TVA à compter de 2018 ?
Cette réforme était demandée par les régions et va dans le bon sens, celui de la responsabilisation des collectivités locales. L’affectation d’une part de TVA est une bonne mesure. Il serait d’abord inconcevable de créer un nouvel impôt et par ailleurs, la recette de la TVA est assez stable et liée à la croissance économique. Je m’interroge cependant sur le calendrier du Gouvernement : pourquoi reporter la réforme à 2018 au lieu de la mettre en œuvre dès 2017 ? Cela donne une fois de plus l’impression que l’exécutif fait des annonces, sans se préoccuper d’une mise en œuvre qu’il n’aura peut-être pas à assumer. Je pense tout particulièrement à la mise en place d’un fonds transitoire en 2017 qui devra être précisé.
L’affectation d’une part de la TVA à destination des régions est une bonne mesure.
Êtes-vous pour le retour du conseiller territorial ?
La France est passée de 22 à 13 régions, hors outre-mer, en conservant le même nombre de conseillers régionaux. En outre, l’élection par scrutin de liste ne permet pas un ancrage démocratique territorial satisfaisant des élus régionaux. Il faut renforcer la cohérence de l’action des régions et des départements par le rapprochement des assemblées régionales et départementales. Les conseillers départementaux doivent être élus par binômes paritaires par canton et les conseillers régionaux doivent être élus parmi les conseillers départementaux. Un conseiller départemental sur trois sera ainsi conseiller régional. Ma proposition permettrait de supprimer 1 880 mandats électifs.
Je veux supprimer 1 800 mandats électifs en modifiant le mode de scrutin départemental et régional.
Comptez-vous recentraliser le financement du RSA ?
Il faut changer de système en créant une allocation de solidarité unique (ASU) plafonnée par rapport au SMIC dans une optique de justice et d’efficacité. Il s’agit de rassembler en une seule allocation toutes les aides sociales, dont le RSA, sous la responsabilité du département. Sa taille en fait l’échelon capable de gérer à la fois l’accompagnement et le contrôle dans le domaine des solidarités sociales. Un guichet unique centraliserait les attributions d’aide sur la base d’un dossier unifié et serait capable d’embrasser la complexité des situations individuelles. Pour le bénéficiaire, la présence d’un interlocuteur unique simplifierait considérablement les démarches.
Faut-il supprimer la métropole du Grand Paris ?
Le développement des métropoles ne doit pas apporter de la complexité supplémentaire mais doit au contraire permettre de dégager une véritable valeur ajoutée. Chaque métropole doit faire l’objet d’un examen au cas par cas. Dans le cas de l’Ile-de-France, la métropole correspond à la Région Ile-de-France. Les compétences de la métropole du Grand Paris doivent donc entre transférées à l’Ile-de-France.
Les députés-maires et les sénateurs-maires doivent-ils échapper à la loi sur le non-cumul des mandats ?
Non, je n’abrogerai pas la loi qui interdit à compter de 2017, le cumul entre un mandat parlementaire et un mandat exécutif local. Je souhaite aussi limiter le cumul des mandats dans le temps : l’objectif est de limiter à trois le nombre de mandats nationaux consécutifs. C’est un élément clé du renouveau politique. On ne peut pas demander aux Français d’accepter des changements si on ne commence pas par changer les pratiques politiques.
Il faut limiter le cumul des mandats dans le temps. On ne peut pas demander aux Français d’accepter des changements si on ne commence pas par changer les pratiques politiques.
Poursuivrez-vous la baisse des dotations aux collectivités locales ?
Les collectivités locales doivent prendre leur part à la réduction de la dépense publique. Mais le système actuel est hypocrite : il faut en finir avec la méthode utilisée ces dernières années par le gouvernement, qui consiste à baisser les dotations en se « lavant les mains » de la manière dont les collectivités peuvent ajuster leurs missions ou baisser leurs charges. Il doit y avoir chaque année un débat au Parlement couvrant non seulement les finances de l’Etat et de la sécurité sociale, mais aussi les finances des collectivités territoriales. L’objectif d’évolution des dépenses locales pour chaque niveau de collectivités et les moyens de l’atteindre doivent être débattus et décidés chaque année dans le cadre de lois de financement des collectivités territoriales. Les économies doivent concerner prioritairement le fonctionnement pour ne pas pénaliser l’investissement.
Faut-il attribuer les dotations aux collectivités en fonction de critères de « bonne gestion » ?
Les mécanismes d’incitation ou de sanction feront partie du débat annuel au Parlement. Mais je me méfie des règles trop automatiques. Le principal défi consiste à tenir compte de la diversité des situations des collectivités territoriales. Par exemple, une commune de 5 000 habitants n’a pas la même structure de dépenses si elle est un bourg-centre en zone rurale ou une banlieue d’agglomération. Je propose surtout de développer la transparence sur les données publiques et sur la performance des administrations (école, hôpital…), en utilisant les nouveaux outils numériques.
Je suis favorable à une logique de responsabilité : les élus sont responsables de leur gestion et il revient aux électeurs de se prononcer sur leur bonne gestion. Je suis certain qu’ils favoriseront les collectivités faisant un effort sur leur train de vie plutôt que celles qui actionnent le levier de la fiscalité.
La modernisation de la fonction publique passe-t-elle par la disparition du statut ?
Les agents publics font souvent un travail remarquable que je tiens ici à saluer. Mais l’amélioration de l’efficacité des administrations passe par une profonde modernisation de la gestion des ressources humaines publique, fondée sur la reconnaissance du mérite. C’est dans l’intérêt des agents publics comme des collectivités qui les emploient. C’est aussi dans l’intérêt des citoyens et des contribuables car l’efficacité des services publics dépend de ceux qui sont chargés de les concevoir et de les mettre en œuvre.
Je propose de limiter le statut de fonctionnaire aux seuls emplois publics qui le justifient, c’est-à-dire principalement les activités régaliennes. Le statut ne doit plus être la règle mais l’exception. Le statut est devenu un handicap pour les collectivités dès lors qu’il s’applique de manière uniforme à 1,9 millions d’agents indépendamment de la situation et des besoins des collectivités. C’est pourquoi je propose de mettre fin progressivement au statut de la fonction publique territoriale.
Dans quelle mesure les agents territoriaux partant à la retraite doivent-ils être remplacés ?
La réponse ne peut pas être la même pour toutes les collectivités. L’assouplissement des règles de gestion permettra de donner plus de liberté et de responsabilité aux collectivités dans la gestion de leur personnel. Par conséquent, elle participera également à une meilleure maîtrise des dépenses. Mon objectif est la réduction de 10% de l’emploi public total à l’horizon de 2022.
Réduisons de 10% les emplois dans les trois fonctions publiques d’ici 5 ans.
L’augmentation du temps de travail est-elle le seul levier à activer pour renforcer l’efficience publique ?
Non, le principal levier pour renforcer l’efficience publique est l’outil numérique. Cette profonde évolution est porteuse de valeur ajoutée pour le citoyen en proposant de nouveaux services tout en induisant des économies dans la mise en œuvre des services publics et la gestion administrative. Par exemple, la dématérialisation des factures entraîne de l’ordre de 50 % d’économie par rapport à un traitement papier. Mais il faut rester très vigilant face aux risques de « fracture numérique ». Le temps de travail des agents est également un facteur qui permettrait d’augmenter l’efficience publique. Je pense qu’il faut lutter contre l’absentéisme en établissant 2 jours de carence en cas d’arrêt maladie et qu’il faut encourager la productivité en renforçant la prise en compte du mérite dans les rémunérations et les parcours professionnels. (NDLR Le jour de carence pour maladie des agents publics a été supprimé le 1er janvier 2014. Par conséquent, tout arrêt maladie est désormais rémunéré dès le premier jour de congé.)
Il faut mettre en place deux jours de carence en cas d’arrêt maladie.
En diminuant le nombre de fonctionnaires, quels services publics entendez-vous réduire ?
Dans la fonction publique d’Etat, j’aimerais appliquer le dispositif suivant : chaque directeur d’administration devrait tenir une une feuille de route avec des objectifs annuels chiffrés. Ce serait à chacun de ces directeurs de définir les moyens permettant de les atteindre et chacun devrait rendre des comptes. Cette méthode fonctionne aussi pour les collectivités locales quand elles appliquent ce même processus à leur administration.
Cependant, les objectifs ne peuvent pas être les mêmes dans tous les secteurs, car certains devront être renforcés, comme la police et la justice, ou préservés, comme la santé. Je sais aussi que les territoires ruraux se sentent délaissés et c’est pourquoi je propose de mettre en place une extension de l’actuelle ANRU (Agence nationale pour la rénovation urbaine), qui pourrait être dénommée ANRURAL (Agence nationale de revitalisation de la ruralité), dont le périmètre d’action serait orienté autour de quatre grands axes : la mobilité, l’attractivité, le numérique, les services publics et marchands.
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