« Je considère ce silence comme une forme de mépris envers les 5 millions d’hommes et de femmes qui vivent ou survivent dans ces quartiers populaires et prioritaires de la ville » enrage Philippe Rio, le maire PCF de Grigny (Essonne) dont la ville est « à 100 % classée politique de la ville ».
Et de poursuivre : « les banlieues n’étaient déjà pas très présentes dans le débat électoral mais là, ils nous traitent avec légèreté… alors que leur boulot, c’est bien d’apporter des réponses, non ? ». Pour cet élu, il n’y a d’ailleurs pas de désintérêt pour la chose politique dans les quartiers prioritaires, mais plutôt de la colère et un sentiment « de pas être respecté ni écouté ».
Preuve en est, disent en chœur les maires de Ville & Banlieue, le silence des présidentiables à nos propositions !
En effet, sur les cinq principaux prétendants à l’Elysée (Emmanuel Macron, Marine Le Pen, François Fillon, Jean-Luc Mélenchon et Benoît Hamon), seuls deux se sont fendus d’un courrier-réponse (Jean-Luc Mélenchon et Benoît Hamon), les propositions d’Emmanuel Macron étant attendues d’ici la fin de semaine.
Le Premier ministre, chef de la politique de la ville
C’est au travers d’une vidéo que l’association – qui compte une centaine de maires- adhérents (tous ont au moins un quartier prioritaire sur leur territoire) – avait choisi interpeller les candidats, il y a maintenant une quinzaine de jours. Les élus y avaient détaillé une trentaine de propositions permettant « de ne plus laisser personne sur le bord du chemin de la République comme c’est le cas actuellement. »
La première d’entre elles, et la plus symbolique, est le fait de confier le portage de la politique de la ville au Premier ministre en personne, le seul capable de mobiliser les autres ministères (Intérieur, Éducation nationale, Travail, Santé) sur cet enjeu. La faiblesse du poids politique du secrétariat à la Ville étant pour Ville & Banlieue l’une des causes du problème.
Mais dans cet « appel du 15 mars », il était également question :
- « d’une mobilisation générale en faveur de l’éducation des enfants, futurs citoyens» ;
- de « valoriser le sport et la culture dans les quartiers » ;
- d’une répartition plus équitable des logements sociaux ;
- d’un travail urgent à mener en faveur de l’emploi des jeunes ;
- mais aussi de « faire revenir des professionnels de santé et de la prévention dans les quartiers dans des maisons pluridisciplinaires ».
Mélenchon le plus complet, Hamon se trompe de questionnaire…
Sur les deux réponses obtenues par l’association, il est clair que celui qui a plus « planché » sur la question est Jean-Luc Mélenchon.
Dans sa lettre-réponse, le leader de la « France Insoumise » passe en revue les différents points soulevés par l’association, tentant d’y faire coller les éléments de son programme. Jean-Luc Mélenchon évoque, entre autres, son « droit opposable à l’emploi en faisant de l’Etat l’employeur en dernier ressort en cas de chômage de longue durée ».
Il évoque aussi le recrutement de « 60 000 enseignants sur le quinquennat » ainsi que l’idée de favoriser « l’accès au métier d’enseignant aux jeunes issus des milieux populaires en mettant en place un système de pré-recrutement ». Jean-Luc Mélenchon promet par ailleurs de consacrer 1% du PIB à la culture et « une augmentation des taxes sur les retransmissions sportives à la télé pour financer le sport amateur ».
Quant à Benoît Hamon, il ne rebondit pas sur les propositions des élus, mais décline à la place ses réponses à quatre questions… qui lui seront posées le 19 avril dernier lors du grand oral devant l’AMF, France Urbaine et Ville & Banlieue :
- Quel bilan et perspectives pour la politique de la ville ?
- Quelles politiques de l’habitat dans les quartiers prioritaires ?
- Quelles politiques de l’éducation dans les QPV ?
- Quelles politiques de l’emploi, de la formation et du développement économique ?
On apprend ainsi que pour le candidat socialiste, il s’agit avant tout de poursuivre ce qui se fait déjà dans le cadre de la loi Lamy, mais avec un abondement des fonds du NPNRU de « 6 à 10 milliards d’euros » ainsi qu’une réforme des dotations de l’Etat « dans le sens d’une égalité réelle pour les villes pauvres et les maires bâtisseurs ».
Benoît Hamon promet également de limiter le nombre d’élèves à 20 par classe en CP/CE1/CE2 et de créer « un service public du soutien scolaire ».
Le candidat socialiste évoque enfin son revenu universel mais aussi un possible soutien au tissu économique des banlieues en instaurant une « priorité made in France avec 50% des marchés publics réservés aux PME/PMI/TPE et l’inclusion de clauses sociales et d’emplois locaux afin que la commande publique serve de levier au développement économique des quartiers prioritaires ».
En revanche, aucun des deux candidats n’évoque cette idée de portage politique de la politique de la ville par le Premier ministre en personne… La mesure-phare, pourtant, de l’association.
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Présidentielle 2017 : les enjeux-clés pour les collectivités territoriales
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