Nous sommes entrés dans l’ère des « macrolots » confiés aux opérateurs privés par la ville et les aménageurs. Le record est détenu par « XXL », un lot de 14 hectares au nord de Marseille, qui hébergera 260 000 mètres carrés de logements, commerces, bureaux… Bouygues Construction, qui a remporté l’appel à manifestation d’intérêt de l’aménageur Euroméditerranée, va y ériger un écoquartier.
Certains voient dans cette tendance un laissez-passer donné aux promoteurs pour construire des pans entiers de ville. Avec, à la clé, le risque que les quartiers finissent par tous se ressembler et que le secteur privé prenne l’avantage sur la puissance publique. Autre phénomène : face à la cherté du foncier, certaines collectivités conçoivent des opérations avec des promoteurs sans acquérir le foncier : « l’urbanisme négocié » a le vent en poupe.
Aménagement par à-coups
A Massy (45 900 hab., Essonne), Paris sud Aménagement transforme un secteur de bureaux en une zone mixte de 100 hectares, baptisée « Atlantis ». Le foncier appartenant à des sociétés foncières, la collectivité a mis en place une « ZAC de participation ». Chaque fois qu’un propriétaire foncier vend son terrain à un promoteur, il verse une taxe à l’aménageur, calculée au mètre carré, qui va financer les espaces publics sur le terrain en question. Mais la date de vente dépend du bon vouloir des propriétaires fonciers.
Le montage Semop
Montage juridique rendu possible par une loi de 2014 (n° 2014-744, qui permet la création de SEM à opération unique), la Semop est une société d’économie mixte centrée sur un programme et limitée dans le temps. La collectivité doit avoir des parts dans le capital comprises entre 34 % et 75 %. Est-il risqué de laisser la majorité du capital à un acteur privé ? C’est l’option la plus prisée, mais la collectivité a une minorité de blocage.
« C’est le seul point que nous ne maîtrisons pas dans le programme Atlantis ; le planning global nous échappe, admet Willem Pauwels, directeur de Paris sud Aménagement. Ce qui se traduit par un aménagement par à-coups, avec des secteurs bien avancés qui jouxtent des voies vides… Mais les terrains finissent par se vendre : nous sommes en zone tendue. »
Dans les zones détendues, les opérateurs ne se bousculent pas. Conseillère municipale (PS) à Roanne (35 500 hab., Loire), Marie-Hélène Riamon nie tout risque de « privatisation » chez elle : « Notre ville excentrée et en déprise démographique n’intéresse pas les opérateurs privés ! » On ne peut pas vraiment compter sur eux pour favoriser l’aménagement du territoire…
Expertise et garde-fous
Autre phénomène : à travers différents appels à projets ou à manifestation d’intérêt, les opérateurs sont
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Gazette des Communes, Club Techni.Cités
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Aménagement urbain : Quand la ville se livre au privé
Sommaire du dossier
- Urbanisme commercial : la fin de la folie des grandeurs
- Aménagement : quel bilan pour les appels à projet « réinventer » ?
- Entretiens de l’aménagement : « Ville pas chiante » et tiers lieux au menu
- Fabrique de la ville : rester pilotes
- Quand vélos, voitures et même commerces investissent l’espace public
- Bon coup de pioche sur l’urbanisme pour fabriquer la ville
- L’aménagement partenarial vu par Paris Sud Aménagement : un modèle pour le Grand Paris ?
- Aménagement : comment faire mieux avec moins ?
- Urbanisme commercial : « Le numérique, une chance pour le commerce de proximité »
- Urbanisme commercial : le grand recyclage des zones commerciales de périphérie
- Intercos et schémas de cohérence en première ligne pour gérer la crise de l’urbanisme commercial
- Aménagements urbains : circulez, il va bien falloir réguler !
- Cachez cette pub que l’on ne saurait voir…
- Europacity, aussi grandiose que controversé
- « Le terme privatisation ne montre que la partie émergée de l’iceberg » – Isabelle Baraud-Serfaty
- « La vision politique est indispensable au projet urbain »