« Pourquoi tailler à la serpe quand l’intelligence peut l’emporter ? » : à l’instar d’André Laignel (PS), premier vice-président délégué de l’AMF, les représentants des communes disent « non » au passage du seuil minimal de 5 000 à 20 000 habitants pour constituer un établissement public de coopération intercommunale à fiscalité propre.
Laurent Wauquiez (UMP), nouveau président de l’Association nationale des élus de la montagne, se situe naturellement en pointe dans ce combat. Il refuse la course au gigantisme. « Nos communes vont, en plus, être diluées dans des grands cantons et des grandes régions. Certaines d’entre elles passeront même sous la coupe de grandes métropoles », met-il en garde.
Dans les allées du congrès des maires, les avis des maires que nous avons interrogés sont beaucoup moins univoques, certains jugeant même le seuil de 20 000 comme un minimum. La nécessité de tenir compte des réalités propres à chaque territoire apparaît comme un sentiment très partagé.
https://www.dailymotion.com/video/x2b3wnuMarylise Lebranchu promet des « adaptations » au seuil de 20 000 habitants
Devant la multiplication des interventions de maires mécontents des futurs seuils pour les intercommunalités, la ministre de la Décentralisation a indiqué le 26 novembre au Congrès des maires que des adaptations selon les situations locales seraient possibles.
« 20 000 : c’est un objectif » pour les futurs EPCI, mais un objectif pour lequel la ministre de la Décentralisation, Marylise Lebranchu, souhaite que les communes puissent non pas y « déroger » mais l’« adapter ».
Derrière cette subtilité syntaxique, il faut comprendre que l’exécutif ne semble pas vouloir intégrer au texte de loi « Notre » des règles dérogatoires précises se référant à des données chiffrées, mais plutôt une certaine marge d’interprétation laissée au préfet. « Lorsque vous venez d’installer une commune de 18900 habitants, il n’y a pas de raison de l’obliger à aller chercher une autre commune pour atteindre 20 000 », a-t-elle indiqué alors que de nombreuses communautés viennent à peine d’élargir leur périmètre, il y a moins d’un an.
Et d’évoquer un peu plus les critères qui pourraient amener les représentants de l’Etat une certaine mansuétude : « Lorsque vous avez une densité très faible, n’allons pas imposer 20 000 habitants. L’adaptation se fera, il faut reconnaitre la diversité des territoires », a-t-elle conclu en guise d’éclaircissement.
Considérer le nombre de communes – De quoi contenter l’AMF ? Difficile à dire tant la frontière entre « dérogation » et « adaptation » est floue. Un peu plus tôt, André Laignel avait clairement exprimé sa position :
Je ne suis pas pour des dérogations, parce qu’après, il faut savoir qui va pouvoir déroger… Je ne vois pas l’utilité d’un seuil. Donnons la compétence aux CDCI [Commissions départementales de coopération intercommunale].
Et qu’on ne dise pas au maire d’issoudun que sénateurs ou députés pourraient voter un compromis entre le seuil de 20 000, voulu par l’exécutif et celui, actuel, de 5000 : « Passer de 20000 à 10000 au Parlement n’a pas plus de sens ! ».
« Fixer un seuil minium de 20000 pour tout EPCI a fiscalité propre me semble méconnaitre profondément, l’organisation, les caractéristiques et la singularité de ce pays, avait pour sa part lancé le président du Sénat, Gérard Larcher en ouverture du débat, donnant ainsi le ton des interventions des élus sur le sujet.
« Prenons garde de ne pas distendre le lien entre nos concitoyens et leurs élus. Si la commune est une petite République dans la grande, c’est parce que ses caractéristiques sont : proximité, responsabilité et action », avait-il plaidé en avançant que « densité, nombre de communes » voire « géographie » particulière de l’EPCI devaient être pris en compte dans le choix d’un seuil pertinent.
Le refus de « coquilles vides » communales – C’est d’ailleurs une inflexion que devrait suivre le Sénat lorsqu’il discutera à partir du 16 décembre du projet de loi « Notre ». Les Sénateurs voteront-ils le seuil de 20 000 introduit dans le texte par le Gouvernement ? « Nous serons conduits à apporter une réponse négative à cette question », a clairement tranché le président de la commission des lois, Philippe Bas.
« Il n’y a pas d’intercommunalité qui vaille sans l’engagement des maires et des conseillers municipaux. Les petites intercommunalités ont parfois des territoires plus grands que les grandes intercos en nombres d’habitants. Si les communes rurales doivent devenir des coquilles vides dans de grandes intercommunalités, alors la commune cellule de base ne pourra plus fonctionner », a refusé, par avance, l’élu de la Manche.
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Congrès des maires 2014 : quand les communes se rebiffent
Sommaire du dossier
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