Le Sénat avait été missionné à l’automne dernier par le ministre de la transition écologique Christophe Béchu pour corriger les irritants de la politique du Zéro artificialisation nette, telle que fixée par la loi Climat et résilience du 22 août 2021. Celle-ci prévoit le ZAN pour 2050, avec une étape intermédiaire de baisse de 50% de l’artificialisation des sols d’ici 2031. Le sénateur Jean-Baptiste Blanc a porté la proposition de loi « visant à faciliter la mise en œuvre des objectifs du zéro artificialisation nette au cœur des territoires », adoptée le 16 mars dernier.
Inscrit tardivement à l’agenda de l’Assemblée nationale, le texte, rebaptisé proposition de loi « visant à faciliter la mise en œuvre des objectifs de lutte contre l’artificialisation des sols et à renforcer l’accompagnement des élus locaux » a été définitivement adopté le 13 juillet, et publié au JO.
L’article 1 du texte donne six mois supplémentaires aux régions pour intégrer dans leur Sraddet les objectifs territorialisés de baisse de consommation des sols, objectifs qui seront ensuite déclinés dans les SCoT, puis dans les plans locaux d’urbanisme, avec également des délais prolongés.
L’article 2 remplace la conférence régionale des SCoT, créée par la loi Climat et résilience, chargée de faire des propositions en matière de territorialisation de la baisse de consommation d’espaces naturels, par une instance élargie, la conférence régionale de gouvernance de la politique de réduction de l’artificialisation des sols.
Au lieu d’être constituée uniquement de représentants des Scot, elle sera composée, sauf si la région en a décidé autrement, de représentants des régions, des communes, des intercommunalités, des départements, des Scot et de l’Etat. Elle peut se réunir sur tout sujet lié à la mise en œuvre des objectifs de réduction de l’artificialisation des sols. Elle peut également transmettre à l’Etat des analyses et des propositions portant sur cette mise en œuvre, et elle est consultée dans le cadre de la qualification des projets d’envergure nationale ou européenne.
Les projets d’envergure nationale mutualisés
L’article 3 est relatif aux projets d’envergure nationale ou européenne présentant un intérêt général majeur, qui sont sortis des enveloppes régionales de droits à artificialiser – ceux -ci s’élèvent au total à 125 000 hectares d’ici à 2031. Les projets d’envergure nationale sont intégrés dans le cadre d’un forfait national fixé à hauteur de 12 500 hectares pour l’ensemble du pays.
Sur ces 12 500 hectares, 10 000 sont mutualisés entre les régions couvertes par un schéma régional d’aménagement, de développement durable et d’égalité des territoires, au prorata de leur enveloppe d’artificialisation définie au titre de la période 2021‑2031. Il est par ailleurs prévu qu’en cas de dépassement du forfait, le surcroît de consommation ne peut pas être imputé sur l’enveloppe des collectivités territoriales ou de leurs groupements.
Le texte fixe par ailleurs la liste des projets pouvant être qualifiés d’envergure nationale ou européenne.
Un hectare garanti
L’article 4, très discuté, vise à garantir un droit au développement à toutes les communes. Il institue une sorte de « garantie universelle » de un hectare. Précisément, le texte prévoit qu’une commune qui est couverte par un plan local d’urbanisme, un document en tenant lieu ou une carte communale prescrit, arrêté ou approuvé avant le 22 août 2026 ne peut être privée d’une surface minimale de consommation d’espaces naturels, agricoles et forestiers. Pour la première tranche de dix années, cette surface minimale est fixée à un hectare.
Une commune rurale sans document d’urbanisme, mais qui lance seulement aujourd’hui sa procédure de carte communale, pourra donc en bénéficier. A la demande du maire, une commune disposant de cette surface minimale peut choisir de la mutualiser à l’échelle intercommunale.
L’article 5 concerne les communes touchées par le recul du trait de côte : il prévoit que les surfaces artificialisées situées dans une zone exposée au recul du trait de côte délimitée peuvent être considérées comme désartificialisées, dès lors que ces surfaces ont vocation à être renaturées dans le cadre d’un projet de recomposition spatiale du territoire littoral. Au terme de chaque tranche de dix années, les surfaces n’ayant pas fait l’objet d’une renaturation sont de nouveau considérées comme artificialisées.
Des outils pour les élus
Enfin l’article 6 prévoit des outils pour faciliter la transition vers l’absence de toute artificialisation nette des sols. Il crée la possibilité d’instituer un droit de préemption urbain sur des secteurs prioritaires à mobiliser qui présentent un potentiel foncier majeur pour favoriser l’atteinte des objectifs de lutte contre l’artificialisation des sols, délimités dans le PLU. Il crée aussi un sursis à statuer sur une demande d’autorisation d’urbanisme entraînant une consommation d’espaces naturels, agricoles et forestiers qui pourrait compromettre l’atteinte des objectifs de réduction de cette consommation susceptibles d’être fixés par le document d’urbanisme en cours d’élaboration ou de modification, durant la première tranche de dix années.
Le décret relatif à la nouvelle nomenclature des sols artificialisés devrait aussi être prochainement publié.
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