« Il existe en France un potentiel hydroélectrique de 10,6 TWh par an », a annoncé Jean-Charles Galland, responsable de la mission développement d’EDF, en présentant les résultats d’une étude commandée par l’Union française de l’électricité (UFE), mais non publiée. Un chiffre à mettre en regard de la production actuelle du parc hydroélectrique français, qui s’élève à 67 TWH par an.
Le potentiel hydroélectrique face à l’impact environnemental – L’étude de l’UFE qui a nécessité une année de travail a permis de recenser les cours d’eau sur lesquels il serait possible d’installer de nouvelles centrales hydroélectriques, et les sites existants qui pourraient être optimisés ou réhabilités.
Si tous les sites qui ont été recensés étaient équipés, il serait ainsi possible d’augmenter la production hydroélectrique de 15,8 % ! Mais ce chiffre ne tient pas compte des contraintes en termes d’impacts environnementaux, qui jouent un rôle fondamental pour décider de la réalisation d’un projet de centrale.
Et c’est là l’explication de la démarche initiée par l’UFE et France Hydroélectricité (1), qui ont souhaité présenter cette étude au Salon des maires et des collectivités locales, mardi 22 novembre 2011, afin de sensibiliser les élus locaux aux rôles qu’ils ont à jouer dans deux processus fondamentaux pour permettre la réalisation de tels projets :
- l’élaboration des schémas régionaux climat-air-énergie (SRCAE)
- et le classement des cours d’eau (par rapport à la directive-cadre eau).
En clair, l’UFE attend des élus locaux qu’ils participent à l’élaboration des SRCAE pour que soit intégré le potentiel hydroélectrique de leur territoire, et qu’ils étudient avec attention les propositions de classement des cours d’eau pour prendre conscience de l’impact de ce classement sur leurs futurs projets.
Réagir avant qu’il ne soit trop tard – « De nombreux élus de montagne ne sont pas au courant de ces deux processus », pointe Anne Pénalba, déléguée générale de France Hydroélectricité. « Or, une fois que le classement des cours d’eau a été réalisé, si l’un de ces cours d’eau est classé en liste 1, il ne sera plus possible d’installer de centrale hydroélectrique, ni même d’envisager un aménagement pour une utilisation récréative », souligne-t-elle.
En effet, les cours d’eau sont en train d’être classés en deux catégories :
- Liste 1 : sur ces cours d’eau ou tronçons de cours d’eau, il sera interdit d’établir de nouveaux ouvrages contraires à la continuité écologique. Cela concerne la continuité dans la dimension amont-aval, qui est impactée par les ouvrages transversaux, comme les seuils et barrages, mais aussi la continuité latérale, ce qui aura pour conséquence d’interdire les digues et protections qui impactent l’écosystème des berges.
- Liste 2 : pour cette catégorie de cours d’eau, il faudra veiller à ce qu’il y ait un transport suffisant des sédiments et une circulation des poissons migrateurs. Les ouvrages ne seront pas interdits, mais devront prendre en compte ces facteurs.
30 % des cours d’eau pourraient être sanctuarisés – La loi sur l’eau et les milieux aquatiques impose que ce classement soit finalisé au 1er janvier 2014, « mais il devrait être réalisé fin 2012 », selon Anne Pénalba.
« Actuellement, on étudie l’impact de ce classement. Les élus vont être consultés, mais ils sont insuffisamment présents lors de ces négociations », note-t-elle.
Jusqu’ici, seuls 10% des cours d’eau sont jugés sensibles, au point de vue écologique, et doivent maintenir un débit d’eau réservé. « Avec ce classement, ce sont 30% des cours d’eau qui pourraient être en liste 1, soit trois fois plus », s’alarme Anne Pénalba.
L’implication des élus dans les négociations – Même son de cloche du côté de Jean Proriol, député (UMP) de Haute-Loire et fin connaisseur de ces questions, qui pointe le manque d’implication des élus dans ces deux processus, alors que les représentants d’associations de protection de l’environnement ou de pêcheurs sont, eux, très présents.
« Les maires ne se précipitent pas pour prendre la présidence des Sage (schéma d’aménagement et de gestion des eaux), mais quand le classement d’un cours d’eau sera fait, il sera difficile d’intervenir », alerte-t-il. Les conséquences de ce désintérêt ou de cette méconnaissance des élus seront un moindre développement de projets de centrales.
Un enjeu de développement économique local – L’enjeu pour les élus ruraux est de prendre conscience de l’intérêt des projets de développement hydroélectrique pour le développement économique local. «Il n’y a pas tant de richesses sur un territoire rural, en dehors des chutes d’eau », souligne Jean Proriol.
Ce dernier rappelle également l’engagement de Jean-Louis Borloo, alors ministre de l’Ecologie, pour développer la filière hydroélectrique, en installant 7 TWh supplémentaires. Dans le cadre du Grenelle, cet objectif a été ramené à 3 Twh à l’horizon 2020. Mais Jean Proriol doute que cet objectif revu à la baisse soit tenu.
La balle est désormais dans le camp des élus locaux, qui doivent s’impliquer pour défendre les intérêts de leurs territoires, et participer à cet arbitrage difficile entre la nécessité de développer les énergies renouvelables, tout en respectant la continuité écologique et la qualité des masses d’eau, comme le souhaite la directive cadre sur l’eau.
Potentiel hydroélectrique en France – Synthèse de l’étude de l’Union française de l’électricité
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Sommaire du dossier
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Thèmes abordés
Notes
Note 01 l’Union française de l’électricité représente les grands industriels du secteur électrique, tandis que France Hydroélectricité représente les petits producteurs d’hydroélectricité Retour au texte