Le sujet était devenu un point de crispation depuis plusieurs jours entre le gouvernement et le secteur de la fonction publique territoriale, unanime, à propos de la suspension de l’application du jour de carence pour les agents publics victimes du coronavirus.
Malgré plusieurs interpellations parfois musclées, le gouvernement était jusque-là resté « droit dans ses bottes », refusant de suspendre ce dispositif de carence introduit pour la fonction publique depuis 2018.
Vendredi 20 mars, encore, Philippe Laurent, le porte-parole de la Coordination des employeurs territoriaux s’insurgeait dans un communiqué du rejet d’un amendement en ce sens présenté au Sénat, lors de la première lecture du projet de loi organique d’urgence pour faire face à l’épidémie de covid-19 : « L’amendement proposé au sénateurs par la Coordination des employeurs publics territoriaux pour supprimer le jour de carence applicable aux fonctionnaires atteints du Covid-19, unanimement souhaité par l’ensemble des employeurs territoriaux et des organisations syndicales, a été déclaré irrecevable d’une part, et, surtout, n’a pas été repris par le gouvernement au terme, semble-t-il, d’un bras de fer entre le secrétaire d’Etat, favorable à la disposition, et d’autres ministres et administrations, refusant d’accroître la dépense publique ! ».
Stéphane Pintre, le président du SNDGCT, considérait, à l’occasion d’une interview à la Gazette vendredi 20 mars, que ce refus relevait d’une « mesquinerie sans nom, comme si cette suspension du jour de carence allait aggraver la dégradation des finances publiques », alors que le Président de la République a annoncé mobiliser des centaines de milliards d’euros pour faire face à l’épidémie.
Pour l’association des DRH de grandes collectivités, Johan Theuret, son président, considérait que le gouvernement faisait preuve d’un « entêtement et d’un dogmatisme incompréhensible ».
Le gouvernement cède
Finalement, samedi matin 21 mars, le Premier ministre a annoncé, lors de son intervention à l’ouverture de la discussion du projet de loi devant les députés, que le jour de carence serait suspendu « pour la seule période de l’urgence sanitaire ».
Je crois nécessaire, pour la seule période de l’urgence sanitaire, de suspendre les dispositifs de jour de carence dans le secteur privé comme dans la fonction publique. #COVID19 pic.twitter.com/40W1RgZMZl
— Edouard Philippe (@EPhilippePM) March 21, 2020
L’exposé sommaire de l’amendement précise : « Dans le cadre de la gestion de l’épidémie et afin d’assurer une égalité de traitement de l’ensemble des assurés (mis en isolement, contraints de garder leurs enfants ou malades) du point de vue de l’application d’un délai de carence pour le bénéfice de l’indemnisation des arrêts de travail, il est proposé de supprimer, pendant la période d’état d’urgence sanitaire, l’application de cette carence dans l’ensemble des régimes (régime général, agricole, régimes spéciaux dont fonction publique) ».
Philippe Laurent s’est félicité du dépôt de cet amendement.
Un amendement très attendu. Merci à #EdouardPhilippe qui a tranché, et à @olivierdussopt qui aura mené une rude bataille ! #COVID19 @l_amf @Regionsdefrance @ADepartementsF pic.twitter.com/pHEyyYCNzw
— Philippe Laurent (@laurent_sceaux) March 21, 2020
« C’est une très bonne nouvelle, s’est réjoui Johan Theuret, du bon sens. Cette décision est un vrai signal envoyé aux fonctionnaires qui se mobilisent de façon exemplaire pour assurer la continuité des services vitaux ».
Mais les arbitrages entre le Premier ministre, Gérald Darmanin, le ministre de l’action et des comptes publics, et son secrétaire d’Etat, Olivier Dussopt, ont été serrés, selon certaines sources, qui ajoutent que des représentants du secteur public local avaient menacé de ne pas appliquer la règle, si le gouvernement s’entêtait.
Le projet de loi devrait être adopté dimanche 22 mars.