A l’issue d’un plaidoyer de 5 pages, l’auteur et président du Centre national de la fonction publique territoriale (CNFPT), François Deluga (PS) conclut : « par entêtement, par souci d’affichage, vous venez de commettre une faute que les collectivités et leurs agents vont devoir payer ».
La salve s’adresse à Jean Arthuis (UC), sénateur et auteur d’un amendement voté le 23 juin 2011 qui a réduit, en abaissant son taux de cotisation, les moyens de l’institution de formation des collectivités territoriales.
La démonstration de François Deluga s’articule autour de 4 volets :
- A propos du rapport de la Cour des Comptes qui a mis le feu aux poudres
François Deluga fait valoir que l’une des erreurs principales de l’argumentation de Jean Arthuis est qu’il fonde son opinion sur le rapport public annuel 2011 de la Cour des comptes qui porte sur les exercices 2004 à 2008. Et ce, « alors que le contexte et la gestion du CNFPT ont totalement changé, notamment à partir de 2009. D’où une argumentation erronée, quand elle ne s’appuie pas sur des chiffres faux concernant la prétendue aisance financière actuelle du CNFPT ». - A propos de la polémique autour des fonds du CNFPT
D’après Jean Arthuis, le CNFPT bénéficie de fonds propres à hauteur de 330 millions d’euros, et a réalisé un excédent de 30 millions en 2009.
« Faux » rétorque le président mis en cause : « Comment le CNFPT pourrait-il disposer de 330 millions d’euros de « fonds propres » alors que les recettes tirées de sa seule ressource, à savoir le produit des cotisations, s’élèvent, dans le budget 2011, à 324 millions d’euros ? ». Il interroge de surcroit le sénateur sur la notion de « fonds propres cumulés » : « suggérez-vous que le CNFPT doive vendre son patrimoine, constitué, pour une bonne part, par des donations de collectivités ? » - Concernant l’acquisition récente du siège parisien de 67 millions d’euros et de sièges régionaux
Elu en 2009 à la présidence du CNFPT, François Deluga explique s’être simplement conforté à la demande de Cour des Comptes qui avait souligné dans ses rapports : « la dispersion du siège entre trois sites et le coût de location des immeubles du siège». Il précise que cette décision est « une opération financière avisée, puisque nous échangeons des loyers qui allaient devenir exorbitants contre l’amortissement d’un excellent investissement (…) effectué à un prix raisonnable par rapport au marché parisien ».
Un calcul qui devrait, selon lui, « générer immédiatement des économies de dépenses de location qui pourront être réaffectées aux moyens disponibles pour la formation et ainsi revenir directement à nos ayant-droits ». - Sur les conséquences de la baisse de 10% de la cotisation
Le président du CNFPT prend l’exemple d’une commune de 1 000 habitants, employant 9 agents à temps complet : « la baisse de 1 % à 0,9 % de la cotisation versée au CNFPT ne va représenter que 120 euros par an. « Je ne considère pas que les marges de manœuvre financières de cette collectivité seront ainsi significativement confortées », ironise-t-il.
En revanche, il estime que cette baisse aura pour effet d’accroître les inégalités entre les collectivités : « Certaines, qui en ont les moyens, s’orienteront vers le secteur privé de la formation, plus coûteux que la formation dispensée par le CNFPT (…) Beaucoup d’autres ne pourront pas faire cet effort ».
Un scandale qui couve depuis début 2011 – Entre les deux hommes, la bataille s’est intensifiée depuis la rentrée 2011, mais le scandale autour du CNFPT couve déjà depuis le début de l’année 2011.
Le fameux chapitre sur le CNFPT, dans le dernier rapport annuel de la Cour des comptes, avait fait l’objet d’une vive polémique. “L’abondance des ressources n’est sans doute pas étrangère au laxisme de la gestion, en particulier de la gestion du personnel, des achats de formation et de logistique ou à certains archaïsmes”, écrivait notamment la Cour, citant “des gaspillages, souvent avec des irrégularités à la clé concernant le défraiement des déplacements des chargés de cours”.
Les magistrats de la rue Cambon estimaient donc qu’il y a lieu de réévaluer le taux plafond de la cotisation versée par les collectivités locales.
Une recommandation suivie quelques mois plus tard par les parlementaires.Le 23 juin 2011, l’amendement au projet de loi de finances rectificatives pour 2011, qui a ramené, pour les années 2012-2013, le taux de cotisation du CNFPT de 1 % à 0,9 % était voté.
Depuis cet été 2011 , François Deluga mène campagne contre cet amendement Arthuis. Il a donc envoyé le 15 septembre 2011 à tous les employeurs locaux un courrier pour les mobiliser en faveur du rétablissement du 1 %.
La veille, le 14 septembre, en conseil d’administration, il avait dévoilé son plan de crise pour faire face à ce manque à gagner estimé à 33,8 millions d’euros : restrictions sur les dépenses de gestion, baisse des moyens consacrés à la formation, etc.
L’avant-dernier épisode datait donc du 20 septembre. Jean Arthuis lui répondait par une lettre ouverte au ton très sec mettant en cause ses choix de gestion et notamment celui du choix du siège de l’institution à Paris.
Références