Le 25 octobre 1976 paraissait le décret autorisant les femmes à devenir sapeur-pompier. Quarante-quatre ans plus tard, les effectifs se féminisent, mais il reste encore beaucoup à faire. Pour preuve, 17 % des sapeurs-pompiers sont des femmes. Parmi elles, seulement 4 % sont officiers, et 3 % sous-officiers. Chez les volontaires, elles sont respectivement 7 % et 8 %. Toutes n’occupent pas des fonctions d’encadrement. Alors, quand la colonelle Stéphanie Duchet a été nommée directrice départementale du service départemental d’incendie et de secours (Sdis) de la Creuse (875 agents) en juin, la nouvelle a été largement relayée et saluée. Avant elle, une seule femme, Sylvie Roques, avait été nommée à ce poste, au Sdis du Tarn-et-Garonne, en 1999.
Une montée en compétences qui se voit
« Pour occuper de telles fonctions, il faut un parcours qui permette de postuler, et le vivier des candidates n’est pas énorme, explique Stéphanie Duchet. Il faut aussi que ces femmes aient envie, et surtout qu’elles osent. Par rapport aux hommes, je pense que nous nous questionnons davantage sur notre légitimité. » Un avis partagé par la lieutenante-colonelle Claudia Stonczewski, cheffe de groupement RH au Sdis du Pas-de-Calais (1 426 agents). Si elle ne s’est jamais interrogée sur le fait d’être une femme dans un « métier d’hommes », elle reconnaît que « les femmes mettent plus de temps à gagner la confiance de leurs équipes. Il faut prouver davantage et on nous pardonne moins de choses ».
La situation diffère entre les professionnels et les volontaires, comme le relate le capitaine Jérôme Chialva du Sdis de Haute-Garonne (2 554 agents), membre du groupe de travail Actaf (Amélioration des conditions de travail et d’activité des femmes) : « Côté volontariat, les femmes ont, certes, moins de mal à s’engager, mais les mécanismes statutaires font que l’évolution dans la pyramide est plutôt lente. On observe bien une montée en compétences des agents féminins. C’est le signe que les échelons au sein des centres de secours vont se gravir au fur et à mesure. Pour les professionnels, les limites de la progression dans les strates de commandement sont celles du concours, où les candidates sont peu nombreuses. » Quelle réponse apporter ? Comment inciter les femmes à s’y présenter ?
Des plans départementaux dédiés
En novembre 2016, la direction générale de la sécurité civile et de la gestion des crises (DGSCGC) publiait le volet « actions en faveur des femmes » de son « plan d’actions pour diversifier les recrutements chez les sapeurs-pompiers ». Au sommaire, un chapitre concernant l’accueil en caserne et l’installation de vestiaires féminins, l’adaptation de l’équipement ou encore des dispositifs pour faciliter la conciliation entre vies professionnelle et personnelle. Des propositions très pratiques, qui ont pu être mises en place dans plusieurs départements invités, dans une circulaire datée du 22 août 2019, à instaurer des plans départementaux dédiés. Pour l’instant, aucun bilan n’a été mené. « Nous avons déjà fait beaucoup, mais il convient d’aller plus loin, souligne Isabelle Merignant, sous-directrice de la doctrine et des ressources humaines à la DGSCGC. Nous travaillons sur une mission transversale dédiée à la féminisation des métiers. L’un des objectifs est de réaliser un état des lieux précis et de voir quels sont les leviers qu’il reste à activer sur ce sujet. L’idée est de partager les bonnes pratiques, de rebondir sur l’esprit innovant des départements. Il est important que l’expression vienne des Sdis, premiers concernés. »
Juridique
En tant qu’établissements publics administratifs, les Sdis ne sont pas concernés par l’article 80 de la loi de transformation de la fonction publique du 6 août 2019 qui instaure l’obligation d’élaborer et de mettre en œuvre un plan d’action pluriannuel pour assurer l’égalité professionnelle entre les femmes et les hommes.
Certains se sont, en effet, emparés des directives nationales pour les décliner localement, et même aller plus loin. En mars avait lieu, à Toulouse, le premier colloque national sur l’égalité entre les femmes et les hommes. L’occasion d’évoquer le sujet et d’initier un travail de réseau. Une seconde édition est prévue en janvier, en visioconférence depuis Mulhouse. Il est porté par Evelyne Firtion, conseillère départementale de la Moselle et membre du Casdis. Nommée ambassadrice chargée des questions de féminisation par le président du département, Patrick Weiten, elle a initié la création d’un blog participatif « Femmesapeurpompier.wordpress.com ».
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Parité : les femmes gagnent du terrain
Sommaire du dossier
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