La première annulation d’un scrutin municipal du 15 mars 2020 est tombée le 9 juillet. Elle concerne Malville, une commune de 3 500 habitants de la Loire-Atlantique. La liste de Martine Lejeune (Agir ensemble pour Malville), ancienne adjointe au maire, y avait été élue dès le premier tour le 15 mars, avec 50,32 % des voix (soit 548 voix).
Le tribunal administratif de Nantes a considĂ©rĂ© que l’abstention très Ă©levĂ©e (55,37 % contre 34,95 % en 2014), liĂ©e au fait que la liste gagnante « n’a obtenu que trois voix de plus que la majoritĂ© absolue qui conditionnait la victoire dès le premier tour », a Ă©tĂ© de nature Ă altĂ©rer la sincĂ©ritĂ© du scrutin et Ă fausser les rĂ©sultats. Le juge estime que ce faible Ă©cart de voix peut ĂŞtre dĂ» au discours prononcĂ© la veille du scrutin par le premier ministre d’alors, Edouard Philippe, dans lequel il invitait les Français Ă rester chez eux et oĂą il annonçait la fermeture des restaurants et des bars, et qui aurait « dissuadĂ© une partie significative des Ă©lecteurs de se rendre au bureau de vote le 15 mars ».
Nombreuses demandes
Au moment d’écrire ces lignes, cette décision du tribunal administratif de Nantes était la seule qui annulait un scrutin local touché par le Covid-19, mais nul doute qu’elle sera suivie par d’autres. Les tribunaux administratifs de toute la France ont été saisis de très nombreuses demandes d’annulation. Ce sera ensuite au Conseil d’Etat, juge d’appel en la matière, de s’exprimer. S’il confirme les décisions d’annulation d’élections, il faudra réorganiser celles-ci dans les communes concernées.
Ce n’est pas, bien sûr, la première fois que le juge a, à maintes reprises, annulé des élections localement, notamment en présence de circonstances particulières, mais le Conseil d’Etat sera certainement plus ouvert à de telles annulations en 2020 qu’à l’accoutumée. Et ce, même si, dans une décision du 15 juillet (CE, 15 juillet 2020, req. n° 440055), il a rappelé que le seul fondement de l’abstention ne pouvait suffire, aussi élevée soit-elle.
Vers un assouplissement
Il y est incitĂ© par ses voisins de la rue Montpensier. En effet, dans une dĂ©cision du 17 juin (CC, 17 juin 2020, QPC n° 2020-849), le Conseil constitutionnel validait l’organisation des Ă©lections municipales de 2020, malgrĂ© la faible participation, mais incitait le juge administratif Ă s’exprimer a posteriori, et Ă analyser les consĂ©quences de l’abstention « au cas par cas ». Le Conseil d’Etat a donc la possibilitĂ© d’assouplir exceptionnellement sa jurisprudence et d’adapter le droit Ă©lectoral Ă la crise sanitaire. Cela pourrait passer par un Ă©largissement des Ă©carts de voix nĂ©cessaires Ă ce qu’une Ă©lection soit annulĂ©e.
En attendant que le Conseil d’Etat prenne position, les juges administratifs de première instance de tout le pays vont s’exprimer sur la question. Le juge nantais l’a déjà fait. Dans une seconde décision du 9 juillet, il a rejeté un recours en provenance de la commune d’Herbignac (6 800 hab., Loire-Atlantique), où l’abstention était de 49,8 % et où 80 voix séparaient les deux listes.
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