Dans sa saisine de l’ASN, le chef du gouvernement « attache la plus haute importance » à ce que l’audit soit effectué « de manière ouverte et transparente » et il veut que les CLI soient informées « au fur et à mesure de l’avancement » du travail. Qu’en pensez-vous ?
M. Fillon ne fait en réalité que répéter ce qui doit se faire en permanence. Ce qu’il dit me paraît donc ridicule car, en permanence, on doit vérifier le fonctionnement des centrales – ce qui équivaut à un audit.
De plus, si les CLI existent, c’est bien pour donner du sens au mot transparence que la loi a d’ailleurs inscrit noir sur blanc, notamment en créant le Haut comité pour la transparence et l’information sur la sécurité nucléaire (HCTISN).
L’association Observatoire du nucléaire estime que cet audit est un « subterfuge visant à éviter la remise en cause » de l’industrie nucléaire française et que son résultat « est connu à l’avance »…
Je partage entièrement ces propos.
L’Observatoire du nucléaire affiche des positions antinucléaires…
Ce n’est pas mon cas. Ce que je réclame, c’est de la vigilance et sans doute que l’on entretienne ces centrales davantage. Mais je pense qu’arrêter totalement le nucléaire serait une véritable sottise, car il s’agit d’une avancée scientifique et technique.
Cependant, cette industrie présente des risques et EDF accorde trop d’importance à l’aspect économique des choses. Or, dans le nucléaire, il ne faut pas économiser.
Et que pensez-vous de la demande d’une autre association, Tchernoblaye(1), de fermer la centrale du Blayais, qu’elle juge dangereuse ?
L’accident de Fukushima a été provoqué par un phénomène d’eau et on a évité un accident il y a 11 ans, en décembre 1999, à la centrale du Blayais, à la suite d’une inondation qui a fait craindre le pire.
Aujourd’hui, la question de la prolongation de la durée de vie de cette installation, qui a 30 ans cette année, est en cours d’examen, et rien ne nous permet encore de donner un point de vue dans un sens ou dans un autre.
Je suis donc extrêmement prudent.
Par ailleurs, pour en revenir à l’audit, il a été mis en place au Blayais avant que le Premier ministre n’en fasse l’annonce. Ainsi, 3 jours après l’accident de Fukushima, EDF avait donné des instructions en ce sens au directeur de la centrale, M. Dutheil.
Un scientifique membre de la CLI de Flamanville (Manche), Jacques Foos, a la semaine dernière mis en garde contre les risques du futur EPR s’il est, comme c’est prévu, construit trop proche selon lui du niveau de la mer. Vous êtes d’accord ?
C’est l’évidence même. Pour des raisons d’économie d’énergie liées à l’utilisation des eaux de refroidissement, on construit des centrales au ras de l’eau.
Or, l’expérience du Japon montre bien que, dans la mesure du possible, il est mieux de les construire à plus haute altitude.
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Le nucléaire français en questions
Sommaire du dossier
- Le nucléaire français en questions
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Thèmes abordés
Notes
Note 01 Tchernoblaye est présidée par Stéphane Lhomme, comme Observatoire du Nucléaire. Retour au texte