Tout candidat à l’élection présidentielle devrait visionner les auditions de la commission d’enquête « Bartolone » sur les emprunts toxiques. Tout y est. Le pouvoir insolent des banques, tout d’abord, dont plusieurs représentants se sont autorisés à mentir sous serment. « Nous n’avons jamais proposé de prêts toxiques à des communes de moins de 10 000 habitants », dit l’un, alors que des communes de moins de 1 000 habitants en ont contractés. « Nous pratiquions sur ces produits les mêmes marges que ceux à taux fixe », dit l’autre, alors que, selon Finance Active, les marges bancaires variaient sur ces produits de 70 centimes d’euros à 90, contre 20 ou 30 centimes pour ceux à taux fixe. On pourrait poursuivre.
Qui paiera la facture ? – Deuxième enseignement, l’insuffisance de la charte « Gissler » de bonne conduite : tous les experts ont déploré son absence de sévérité, son caractère non contraignant. Face à la commission « Bartolone », les candidats à la présidentielle apprendraient que l’ensemble du système de contrôle a été défaillant, qu’il s’agisse de l’autorité de contrôle prudentiel chargée de réguler l’offre bancaire, des chambres régionales des comptes ou des sous-préfectures.
Ils seraient confrontés à l’incapacité générale, quatre ans après que cette affaire a été mise au jour, de dresser un état précis du volume de l’encours toxique et du nombre de collectivités concernées. Ces candidats apprendraient qu’il faut davantage écouter les consultants du secteur, petits ou grands, qui furent (avec quelques journalistes) les seuls à alerter, dès 2005, sur les risques de ces produits.
Ils découvriraient, enfin, que le problème ne fait hélas que commencer, seuls 50 % des contrats indexés sur l’euro/franc suisse, par exemple, étant sortis de leur période sécurisée.
Hélas, en suivant les débats de cette passionnante commission, les candidats à la présidentielle ne pourraient obtenir une réponse à la seule question qui vaille : qui, à part le contribuable, qu’il soit local ou national, paiera la facture de cette catastrophe, évaluée, aujourd’hui, à une dizaine de milliards d’euros ?
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Emprunts toxiques : comprendre l’engrenage
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