Claude Bartolone (député PS de Seine-Saint-Denis et président du conseil général), président de la commission, et Jean-Pierre Gorges (député UMP de l’Eure-et-Loir), le rapporteur, ont entendu ces élus qui paraissent le plus souvent désarmés face aux conséquences désastreuses des emprunts toxiques.
Lors de ces auditions, la question n’était pas de déterminer les responsabilités mais de comprendre comment les élus étaient tombés dans le piège de ces crédits. Pourtant, durant toute l’audition, l’ombre d’un présumé coupable a plané : celle de la banque Dexia.
Ce sont les banques qui ont proposé les emprunts
Les témoignages sont édifiants: ce sont les banques, et plus particulièrement Dexia, qui ont proposé aux élus de souscrire des emprunts structurés. Et ceci, dans certains cas, alors même que la banque avait également un rôle de conseil auprès de la collectivité : « Dexia nous délivrait une prestation de conseil, notamment pour développer nos investissements et maîtriser nos frais de fonctionnement », assure Christian Coigné, maire de Sassenage (Isère, 10919 habitants). La banque n’a pourtant pas hésité à lui proposer un produit indexé sur la parité euro/franc suisse qui a généré 500 000 euros d’intérêts supplémentaires.
Les élus n’ont pas été avertis du risque encouru
Tous ont vivement regretté l’attitude de leur partenaire historique : la banque ne les a même pas avertis des risques encourus en signant ces emprunts. D’ailleurs, le nom de l’emprunt auquel ils ont majoritairement souscrit porte un nom éloquent : « Tofix dual ». « Il est écrit 8 fois dans une même page de contrat d’emprunt la formule « taux fixe ».
Il s’agit, en fait, d’un taux variable caché ! », a martelé Xavier Martin-Le Chevalier, maire de Trégastel (Côtes d’Armor, 2300 habitants), documents à l’appui.
Il n’existe pas de solutions satisfaisantes
Les élus se sentent d’autant plus désarmés aujourd’hui, qu’il leur est très difficile de sortir de ce piège infernal :
- soit les banques leur demandent de verser une soulte exorbitante, comme à Unieux (Loire, 8340 habitants), où la commune devrait s’acquitter d’une somme de 7 millions d’euros pour bénéficier d’un taux fixe de 5,7% (la commune est en contentieux contre Dexia) ;
- soit, elles leur proposent de geler le taux d’intérêt pendant quelques années contre un rallongement de la durée de l’emprunt.
Face à ces solutions qui n’en sont pas, Christian Coigné a lancé ce cri du cœur : « Qu’est-ce que l’on va faire l’année prochaine ? On s’enfonce, on n’arrivera jamais à s’en sortir. A qui pouvons-nous faire confiance aujourd’hui ? »
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Emprunts toxiques : comprendre l’engrenage
Sommaire du dossier
- Emprunts toxiques : comprendre l’engrenage
- Emprunts toxiques : « Nous exercerons une pression sur les banques » affirme Claude Bartolone
- Emprunts toxiques : décryptage des mesures proposées par la commission Bartolone
- Rapport Bartolone sur les emprunts toxiques : « Bien mais peut mieux faire »
- Avant-dernier acte de la commission d’enquête sur les emprunts toxiques
- La mécanique infernale des emprunts structurés
- Emprunts toxiques à l’hôpital : un outil à double tranchant
- Emprunts toxiques dans les petites communes : les banques présumées coupables
- Emprunts toxiques : le monde HLM relativement préservé
- Emprunts toxiques : les précisions de la Caisse des dépôts sur le futur cadre de financement des collectivités
- Emprunts toxiques : le cas de Saint-Etienne passé au crible des députés
- Emprunts toxiques : la parole est à la défense
- Emprunts toxiques : Dexia, principal « accusé », entendu par les députés
- Emprunts toxiques : les experts éclairent le brouillard des produits structurés
- Emprunts toxiques : l’Etat invoque ses limites
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