C’est le 9 décembre, cent quinze ans jour pour jour après la promulgation de la loi de séparation des Eglises et de l’Etat portée par le député Aristide Briand, que le projet de loi de lutte contre les séparatismes sera présenté en conseil des ministres. Un texte controversé, ambitieux par son dessein, mais aussi sensible que risqué. Ambitieux, car il s’agit ni plus ni moins que de s’attaquer à ceux qui, sous couvert de religion, placent leur idéologie obscurantiste au-dessus des lois de la République.
Réaffirmer la neutralité
Pour y remédier, l’exécutif a convoqué la loi de 1905 et son principe de laïcité qui, selon la formule consacrée, « donne la liberté de croire et de ne pas croire ». Comme l’affirme d’ailleurs à « La Gazette » la ministre déléguée chargée de la Citoyenneté, Marlène Schiappa, l’enjeu est bien de réaffirmer la neutralité inhérente aux services publics et de mieux protéger les élus et les agents face aux pressions communautaires.
Cinq ans après la vague d’attentats terroristes qui a ensanglanté la France, et alors que l’émotion reste vive après les assassinats barbares de Nice et de Conflans-Sainte-Honorine, la volonté de rassembler la Nation autour de ses valeurs fondamentales devrait faire l’unanimité. Mais l’exercice s’annonce risqué.
Le risque d’une stigmatisation
La radicalisation islamiste n’est pas, loin de là, la principale préoccupation de la grande majorité des élus. Et nombreux sont ceux qui pointent le risque d’une stigmatisation de la population musulmane. Y compris à l’étranger, où le chef de l’Etat s’est employé à répondre aux accusations d’islamophobie tandis que la polémique gagnait le milieu intellectuel, partagé entre pourfendeurs d’une « religion de la laïcité » et détracteurs du multiculturalisme.
Une fois encore, Emmanuel Macron se retrouve donc sur un chemin de crête dont l’issue est d’autant plus incertaine que, en dépit de sa promesse de ramener « une présence républicaine au bas des tours », le projet de loi ne prévoit rien, ou presque, contre la ghettoïsation des banlieues. Car c’est pourtant bien là, dans les territoires relégués, que les engagements non tenus coûtent cher à ceux qui prétendent incarner la République.
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