« Le diagnostic régional, en matière de changement climatique, est plus difficile à réaliser, en raison des interactions qui peuvent exister à l’intérieur d’un territoire. Par exemple dans le sud de la France, les incertitudes portent sur les épisodes de sécheresse, ou de crues prévisibles », a expliqué le climatologue Hervé Le Treut, lors de son audition par la commission de développement et d’aménagement durable, le 12 décembre, à l’Assemblée nationale.
Très attendues, les conclusions de ce spécialiste, qui est également directeur de recherche à l’Ecole Polytechnique de Paris et au CNRS, devraient permettre aux collectivités d’y voir clair.
De fait, le climatologue a participé à la conférence de Doha, en tant que chercheur attaché aux travaux du GIEC.
Clarification – « Nous sommes à 9 milliards de tonnes de carbone diffusées dans l’atmosphère par an, a expliqué Hervé Le Treut. Cela pose un double problème, car en France, cela signifie un relèvement du niveau de la mer de + 30 centimètres par siècle. Cela entraîne une certaine vulnérabilité de l’agriculture, notamment dans les régions de basse, et moyenne montagne, qui vont connaître des étagements des systèmes naturels. »
Autre vulnérabilité, celle des régions littorales, en particulier celles qui sont situées autour du bassin méditerranéen. Cyclones et typhons pourraient ainsi survenir, d’autant que selon ce spécialiste, les modèles de calcul, qui servent à simuler ces épisodes, posent aussi question : « La notion de modèle est générique. Les modèles climatiques sont calés partiellement sur des évènements passés. Il existe 1 000 études sur les modèles de simulation, et la difficulté de les analyser ! »
Eléments de surprise – En France, les élus ne sont pas à l’abri d’éléments de surprise : « Ainsi, la canicule de 2003 pourrait se reproduire tous les 3-4 ans. On constate aussi des phénomènes d’érosion, en particulier sur le littoral aquitain qui a tendance à reculer à cause de la puissance des vagues. »
Faudra-t-il abandonner certaines parties du territoire, comme les Pays-Bas l’ont fait avec des polders, s’interroge aussi Hervé Le Treut.
Régions chefs de file – Pour appréhender au mieux ces changements climatiques, les collectivités locales, et en particulier les régions, devront multiplier les expertises, et créer des lieux de partage des connaissances, recommande-t-il.
Et alors que la conférence de Doha a été qualifiée par les députés présents de « n-ième fiasco », tout le monde s’accorde à dire que le réchauffement climatique a des origines naturelles, et des origines anthropiques.
En résumé, « il faudra que les collectivités favorisent des solutions de résilience, pour anticiper les changements climatiques à l’échelle régionale. » Par exemple, choisir dans le Sud de la France des essences d’arbres qui s’adaptent à la fois aux crues et à la sécheresse…
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Climat : Pourquoi les experts défendent un rôle accru des collectivités locales
Sommaire du dossier
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