L’ancien maire de La Faute-sur-Mer poursuivi après la catastrophe qui a fait 29 victimes, avait été condamné par le tribunal correctionnel des Sables d’Olonne en première instance à quatre ans de prison ferme ; son ancienne adjointe à deux ans de prison ferme. Il leur est reproché d’avoir encouragé une politique d’urbanisation dans ces zones à fort risque, et de s’être délibérément opposés aux tentatives de la préfecture de faire établir un plan de prévention des risques d’inondation (PPRI).
Les services de l’Etat s’en sortent plutôt bien : le directeur des territoires et de la mer a été relaxé, sa faute ayant été jugée simple. Et si le service d’instruction des permis de construire a bien été reconnu fautif de ne pas avoir exercé un contrôle de légalité strict dans la délivrance de ces permis de construire en zone inondable, le juge a considéré qu’en bout de chaîne, c’est bien le maire ou son adjointe qui ont signé, en toute connaissance de cause, les permis.
Mais derrière ce procès se greffent des questions qui vont au-delà d’une défaillance humaine ou des suspicions de délit de favoritisme qui entourent ce procès. Des questions que la défense devrait en appel, continuer à mettre en avant : ce procès est d’abord celui d’une règlementation protéiforme et contradictoire, dans un contexte de désengagement massif des services de l’Etat.
Les communes vivent dans un cadre réglementaire lourd qui leur impose des obligations qu’elles ne sont pas toujours en mesure de respecter. Cette ligne de défense prend une charge encore plus lourde au regard des événements dramatiques survenus dans la nuit du 3 au 4 octobre dernier sur la Côte d’Azur.
« Culture du risque »
En juillet 2015, cinq ans après le passage de la tempête Xynthia, la délégation aux collectivités territoriales du Sénat avait voulu évaluer si l’Etat et les collectivités territoriales avaient, depuis, pris toute la mesure des actions à mener pour éviter de nouveaux drames. Elle plaidait pour la diffusion d’une « culture du risque » auprès de l’ensemble des acteurs intéressés : Etat, administrations, élus et citoyens.
Les rapporteurs préconisaient aussi de garantir les moyens financiers et humains dans les préfectures afin d’assurer une aide technique aux collectivités, et de prévoir une information systématique des élus sur les risques naturels encourus par leur commune, dès leur début de mandat.
Dans le même registre, il s’agissait de « sécuriser » ces mêmes élus locaux en assurant la présence d’effectifs suffisants dans les préfectures pour garantir un contrôle de légalité « extensif et de qualité » sur les actes d’urbanisme.
Mais à ce jour, force est de constater qu’aucune suite n’y a été donnée. A cet égard, le report à janvier 2018 de la mise en place de la compétence Gemapi met en évidence, une fois de plus, la difficulté, malgré l’urgence, à assumer et faire assumer des responsabilités clairement établies, avec des ressources dédiées suffisantes.
Le procès Xynthia, c’est donc aussi celui de la gestion du risque, et de sa décentralisation.
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