Fin de règne en Tarn-et-Garonne. Le sortant Jean-Michel Baylet se retire du jeu dix minutes seulement avant l’élection du président. En place depuis trois décennies, il échappe, ainsi, à une défaite en bonne et due forme. Mais c’est bel et bien le Sans étiquette Christian Astruc, soutenu par la droite, qui emporte la mise. Déjà battu aux dernières sénatoriales, Jean-Michel Baylet subit un grave revers. Son département devient le seul, en Midi-Pyrénées, à basculer au détriment de la gauche.
Le patron du PRG et du quotidien régional (La Dépêche du Midi), héritier d’une lignée « radicale-cassoulet », ne dispose plus maintenant que de mandats locaux subalternes. La mainmise de sa famille sur le Tarn-et-Garonne, ébréchée par les socialistes entre 1982 et 1985, connaît un brutal coup d’arrêt.
Pour le sénateur (Divers gauche) Jean-Noël Guérini aussi, ces départementales ont un goût amer. Le président des Bouches-du-Rhône doit céder son fauteuil à Martine Vassal (UMP). Au contraire des grands électeurs du Sénat, plus sensibles au soutien du conseil général aux petites communes qu’aux déboires judiciaires de son chef, les électeurs ont tourné la page.
Moins de cumul
La défaite de ces deux personnages, conjuguée au retrait, avant l’élection départementale, de Christian Poncelet (UMP., Vosges) et de Philippe Madrelle (PS., Gironde), marque le déclin des « barons ». Ces orfèvres du cumul des mandats, souvent peu connus à Paris, mais tout-puissants dans leurs fiefs, avaient su résister aux mouvements de balancier nationaux. Les binômes paritaires, le redécoupage des cantons et, surtout, le renouvellement intégral des assemblées départementales leur ont été fatal.
Voilà, les ex-conseils généraux soumis, à leur tour, à l’hyper-nationalisation des scrutins locaux. Les mouvements d’humeur d’un électorat de plus en plus volatile emportent tout sur leur passage. Du coup, les règnes « XXL » se rangent au rayon des antiquités.
Parmi les présidents du millésime 2015, seuls trois affichent plus de deux décennies au compteur : les socialistes Henri Emmanuelli (30 ans à la tête des Landes) et Thierry Carcenac (24 ans au sommet du Tarn) ainsi que le Divers droite Philippe Adnot, (En place depuis 25 ans dans l’Aube).
Ce 2 avril marque un profond renouvellement. La moitié des départements changent de tête. Parmi les nouveaux présidents, 11 n’étaient pas conseillers généraux durant la mandature précédente.
Un mouvement de fond dû à la vague bleue. Mais pas seulement. Des passages de relais se font à droite. Par exemple dans le Loiret, où Eric Doligé (UMP) transmet le flambeau à Hugues Saury (UMP).
Le non-cumul entre un mandat de parlementaire et une fonction exécutive locale, applicable à partir de 2017, pèse parfois lourd dans ces processus. Le relevé du Monde est, à ce titre, éclairant. Parmi les 197 députés et sénateurs détenant un mandat de conseiller général, seuls 89 siègeront dans les nouveaux conseils départementaux.
Le nombre de présidents-parlementaires baisse beaucoup moins. Il s’élève à 37, contre 44 auparavant.
Nouvelle vague
Les vainqueurs du 2 avril apparaissent bien implantés. Lors du redécoupage des cantons de 2013-2014 (le premier d’envergure depuis 1801), la démographie a beau primer sur le territoire, les élus ruraux continuent de tenir le haut du pavé. Les hommes aussi. En dépit de l’avènement du binôme paritaire, les femmes peinent à tirer leur épingle du jeu. Si le nombre de présidentes augmente sensiblement (10 contre 6 auparavant), il demeure fort modeste, ne dépassant pas la barre des 10 %.
La moyenne d’âge des présidents reste relativement élevée : 58 ans contre 62 durant la période précédente. Le doyen est une femme : Josette Borel-Lincertin, 74 ans, à la Guadeloupe. Le benjamin s’appelle Sébastien Lecornu. Le bras droit de Bruno Le Maire, s’empare de l’Eure à 28 ans. Il est le visage de la nouvelle vague.
Le turn-over ne devrait pas s’arrêter là. En effet, à droite, trois présidents de conseils départementaux, et non des moindres, sont sollicités pour mener une liste aux régionales : Dominique Bussereau (UMP., Charente-Maritime) dans l’ensemble Aquitaine / Limousin / Poitou-Charentes, Eric Ciotti (UMP., Alpes-Maritimes) en Provence-Alpes-Côte d’Azur ainsi que François Sauvadet (UDI., Côte-d’Or) en Bourgogne / Franche-Comté.
L’exception Lozèrienne
La seule éclaircie pour le PS ce 2 avril aura été l’élection de la socialiste Sophie Pantel à la tête du conseil départemental de la Lozère, dès le premier tour, mettant officiellement fin à 45 ans d’hégémonie de la droite dans ce département. Une erreur de comptage a fait planer un temps l’hypothèse d’un second tour, mais un nouveau comptage a permis d’établir que Mme Pantel avait été élue au premier tour avec 15 voix.
Dans son discours officiel, la présidente Pantel, longtemps chargée de mission aux droits de la femme, a adressé ses premiers mots « aux femmes élues qui, grâce à la loi, font leur entrée massivement dans cette assemblée ». « Je suis convaincue que cette parité, même imposée, est une avancée », a-t-elle dit.
L’UMP en force
Si son étoile a pâli après la charge anti-conseil général de Manuel Valls, l’Assemblée des départements de France (ADF) garde ses entrées dans les ministères. Forte d’une quarantaine de permanents, elle siège dans une multitude d’organes de concertation Etat – collectivités territoriales. Aussi, l’institution est particulièrement convoitée.
A ce stade, impossible de dire qui la présidera. Les présidents issus de l’UMP, de l’UDI, du MODEM et des Divers droite privilégieront-ils un profil notabiliaire comme Jean Puech (UDF puis UMP), en place entre 1989 et 2004 ? Ou, à l’instar de ce qu’il s’est passé, récemment, à l’Association des maires de France avec François Baroin (UMP), et à l’Association nationale des élus de la montagne,avec Laurent Wauquiez (UMP), seront-ils enclin à préférer une personnalité plus politique, plus médiatique aussi ?
Une certitude à ce stade : la droite, qui contrôle les deux tiers des départements, s’emparera de l’ADF. Pour ce faire, l’UMP apparaît bien placé. Elle préside en effet les deux tiers des départements acquis à l’opposition.
Mais le choix du président de l’ADF pourrait constituer un élément, mineur, d’un « deal » (Intégrant notamment le choix définitif des têtes de liste aux régionales) entre Nicolas Sarkozy et le leader de l’UDI, Jean-Christophe Lagarde.
Les 99 nouveaux présidents de département
Source : wikipédia
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