La condamnation d’une fonctionnaire surnommée « Mère Teresa », à quatre ans de prison, dont 18 mois avec sursis pour corruption, suite à la sollicitation de 40 000 euros cadeaux en échange de logements sociaux, souligne l’importance de la mise en place d’une politique « cadeaux et invitations » dans les collectivités territoriales.
En l’absence de règles, c’est le principe du désintéressement de la fonction publique qui prévaut, cumulé à une dose de bon sens pour son application pratique. L’incertitude sur la conduite à tenir est source de risque du fait de l’exposition du secteur public dans son ensemble à la corruption. Voici 5 raisons de définir une politique « cadeaux et invitations ».
Définir des règles cohérentes et équitables pour tous
Une politique « cadeaux et invitations » assure une application uniforme des règles par tous les agents. Cela favorise un environnement de travail juste et équitable.
Vous prévenez certaines situations inconfortables vis-à-vis des tiers, voire d’éventuels conflits entre agents, pour qui l’absence de politique ouvre la voie à une application au cas par cas.
Permettre aux agents de fonder leur comportement sur un faisceau d’indices
Définir une politique permet aux agents d’adopter une analyse via un faisceau d’indice à partir du risque de contrepartie ou d’apparence de contrepartie que constituerait un cadeau ou une invitation.
Elle permet également de définir des périodes où les cadeaux sont interdits par principe : périodes d’appel d’offres, de renégociation de contrats ou d’instruction d’agrément.
Elle conduit aussi à identifier des services à risques tels que les marchés publics pour lesquels il est possible de prévoir une protection renforcée via une interdiction de principe de recevoir des cadeaux et invitations.
Réaffirmer votre engagement pour l’éthique et la transparence
Une politique « cadeaux et invitations » renforce votre crédibilité auprès de vos agents et de vos parties prenantes.
Vous faites passer un message de tolérance zéro face aux tentatives de corruption ou tout comportement contraire à votre code de conduite.
Diffuser la culture de l’intégrité
Une politique assumée permet d’acculturer vos agents aux mécanismes de transparence et de prévention. Vous diffusez une culture interne qui favorise la prévention des risques juridiques, financiers et de réputation sur sur le long terme.
Pour appuyer la diffusion de cette culture de l’éthique, vous pouvez organiser des ateliers de sensibilisation pour les agents et élus.
Aller plus loin que « l’absence de règles protège »
Une idée tenace persiste selon laquelle, en cas de contentieux, les auteurs suspectés de corruption pourraient plaider l’ignorance en raison de l’absence de règles écrites, et échapper ainsi à toute responsabilité.
Bien qu’il faille reconnaître la créativité de certaines tactiques de défense, mon expérience en tant qu’ancienne directrice juridique d’une ONG anticorruption, me prouve qu’il ne s’agit pas d’une stratégie durable en 2024, pour deux raisons :
- d’une part, selon le principe immuable selon lequel nul n’est censé ignorer la loi ;
- d’autre part, l’élan croissant de la compliance qui touche désormais le secteur public encouragé à intégrer des mécanismes de prévention issus de la loi « Sapin II ».
Plutôt que de faire de l’ignorance votre plus grand risque, mettre en place une politique cadeaux et invitations est la garantie de bénéficier de règles claires et comprises de tous.
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