Dans son récent ouvrage, « Le service public de la petite enfance » (1), Martine Long, spécialiste du droit du service public, souligne les difficultés actuelles qui existent dans la construction d’une politique cohérente de la petite enfance sur un territoire donné au regard de la diversité des acteurs impliqués (Etat, caisses d’allocations familiales [CAF], protection maternelle et infantile, communes et intercommunalités…) et de la place prise par l’offre privée. Pour elle, le projet de loi « plein emploi », adopté le 12 juillet 2023 par les sénateurs, ne suffira pas pour créer une dynamique locale de création de places. Par son article 10, ce projet de loi fait des communes les autorités organisatrices de l’accueil du jeune enfant, afin de recenser et de planifier les offres et les besoins pour la garde d’enfants. Mais les sénateurs ont rehaussé le seuil à partir duquel les communes devront élaborer un schéma d’offre d’accueil, de 3 500 à 10 000 habitants.
De plus, la procédure selon laquelle le préfet pouvait, en cas de manquement d’une commune, demander à la CAF d’élaborer à sa place son schéma communal a été supprimée, les sénateurs n’acceptant pas le « contrôle renforcé de l’Etat ». Selon Martine Long, le service public de la petite enfance tel qu’imaginé par le gouvernement est trop institutionnel. Il n’implique pas suffisamment tous les acteurs que sont les familles, les professionnels, les associations, et ne tient pas suffisamment compte des besoins et de l’intérêt de l’enfant.
Le projet de loi pour le plein emploi clarifie les compétences des acteurs de la petite enfance. Répond-il au besoin d’une véritable instance de dialogue et de coordination qui permette de travailler en complémentarité au long cours ?
En France, le problème est que l’on pense que le déclaratoire suffit, que le texte va créer la dynamique. Or à mon sens, l’article 10 du projet de loi pour le plein emploi ne clarifie pas totalement les compétences. Certes, on met en avant le comité départemental de services aux familles comme outil de concertation à l’échelon départemental.
Ce dernier est une instance intéressante qui rédige notamment le schéma du même nom et qui devra analyser les schémas réalisés à l’échelon communal. Mais derrière, il faudra voir qui pourra porter l’offre et comment les communes se saisissent de ces obligations. Par ailleurs, le relais petite enfance (RPE) se retrouve avec des compétences élargies. Encore faut-il que les familles l’identifient et que ce dernier ait suffisamment de moyens pour assurer l’ensemble des missions. Le projet de loi mettait également en place une procédure de substitution d’action de la CAF aux communes en cas de carence, discutable au regard du principe de libre administration des collectivités territoriales.
D’ailleurs, les sénateurs l’ont supprimée. Ce qu’il faudrait, c’est un véritable
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