La majorité des discussions, menées par le président de la commission, Claude Bartolone (député de Seine-Saint-Denis et président du conseil général, PS) et le rapporteur Jean-Pierre Gorges (député de l’Eure-et-Loir, UMP), s’est centrée sur la ville de Saint-Etienne, érigée en cas pratique. Le but étant de démanteler les rouages qui ont mené la commune à contracter des produits structurés potentiellement toxiques. L’ensemble des acteurs auditionnés a répondu d’une même voix : « On ne pouvait pas savoir ».
L’équipe municipale en place à l’époque
Michel Thiollière, l’ancien maire (UMP) de Saint-Etienne, a fait valoir un contexte de crise où sa volonté était de maintenir le niveau de la dette et de la fiscalité tout en augmentant les investissements. Les produits structurés représentaient l’outil idéal et, précise-t-il : « personne n’était au courant de la dangerosité ni de la crise à venir ».
Antoine Alfieri, ancien adjoint au maire en charge des finances prononce aussi son mea culpa. Il précise même que, dès 2006, la municipalité a désiré se défaire d’emprunts à risque (des produits de pente). Les banques ont alors proposé des « contre swaps » c’est-à-dire des produits encore plus toxiques. Il avoue ne pas s’en être rendu compte et avec le recul, affirme: « On n’avait pas la compétence».
L’ancienne opposition (équipe actuelle)
Maurice Vincent, actuel maire de Saint-Etienne (PS), autrefois dans l’opposition, admet avoir été un peu « naïf » à l’époque. « Il était inimaginable que des produits de cette nature soit proposés et souscrits », déclare-t-il. Il a bien attiré l’attention de la municipalité sur le sujet, mais le débat a vite été clos. De toute façon, il était difficile de connaître la réelle nature de ces emprunts puisqu’ils étaient contractés sur décision du maire sans faire l’objet de délibérations, justifie-t-il en substance.
Les services de l’Etat
Même discours du côté du trésorier payeur général de l’époque, Yves Terrasse et de l’ancien préfet de la Loire, Michel Morin. Tous deux assurent que leurs services, pourtant chargés du contrôle, n’étaient pas en mesure de connaître la véritable nature de ces emprunts et qu’ils n’ont été aucunement alertés sur la question. « Même si vous avions pu voir ces contrats, nos collaborateurs n’étant pas formés, ils auraient été bien incapables de les déchiffrer », assure Michel Morin.
La responsabilité se situe-t-elle au niveau des banques ? La commission obtiendra peut-être une réponse lors de leur audition (la date n’est pas fixée à ce jour).
Aujourd’hui, il est impossible de se défaire des emprunts les plus toxiques
Reste que les collectivités concernées se retrouvent actuellement dans une impasse : elles n’arrivent pas à se défaire des emprunts les plus toxiques. Elles sont donc face à une alternative : engager une procédure contre les banques ou augmenter leurs impôts. Maurice Vincent a proposé une troisième voie : la structure de défaisance.
La commission, à la recherche de solutions, a manifesté son intérêt pour cette option.
La carte des collectivités touchées par les produits de Dexia
Libération a publié, le 21 septembre 2011, une carte interactive présentant les collectivités ayant contracté des produits financiers fournis par Dexia. Elle permet de trier par niveau de collectivités, et de consulter les produits financiers concernés. Cliquez sur la carte pour l’afficher.
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Emprunts toxiques : comprendre l’engrenage
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