La réforme de la haute fonction publique est-elle opportune ?
Bernadette Malgorn : Les hauts fonctionnaires sont, avec cette réforme, désignés comme des boucs émissaires auprès de tous ceux qui ont enfilé un gilet jaune avant de devenir les héros de la première ligne lors de la crise sanitaire. On leur dit : « Si vous subissez un déclassement, c’est la faute des énarques. »
Fabien Tastet : Nous avons toujours condamné le discours selon lequel les hauts fonctionnaires seraient responsables de tous les maux du pays. Mais nous n’avons jamais adhéré, non plus, à l’idée qui consisterait à ce que tout le monde fasse l’objet d’une réforme, sauf la haute administration. Cette réforme, et c’est heureux, n’est pas l’affaire de quelques « happy few » soucieux de se ménager un avenir professionnel. Elle peut changer la vie des Français et va ouvrir la haute fonction publique à de nouveaux profils. Elle est, tout au contraire, très politique.
B. M. : Pourquoi, alors, passer par une loi d’habilitation qui traite à moitié du sujet, puis par une ordonnance qui interdit tout débat au Parlement ? Force est de constater que cette réforme n’a pas été menée selon les méthodes de bonne administration qu’elle est supposée promouvoir. Elle a été conduite à l’insu des principaux intéressés : les hauts fonctionnaires.
F. T. : Nous avons été étroitement associés à la mission de Frédéric Thiriez, à l’origine de ce processus. Il y a eu 300 auditions et 150 contributions dans ce cadre. Nous avons ensuite travaillé avec le gouvernement sur les principales mesures. Les hauts fonctionnaires territoriaux ne sont pas des commentateurs, mais des acteurs de cette réforme.
Comment jugez-vous l’architecture globale de cette réforme ?
B. M. : Les précédentes réformes structurelles de l’Etat ont été accomplies sans rompre avec le statut de la fonction publique. Celle-ci marque un changement de philosophie, avec la suppression des corps, qui favorise, dans la lignée de la loi « Dussopt » de 2019, le recours au contrat de droit privé.
F. T. : Il faut une grande majorité de fonctionnaires pour conduire l’action publique, nous sommes d’accord.
Néanmoins, avec cette réforme, on sort aussi de la logique dans laquelle on a d’excellents joueurs, mais qui opèrent chacun dans leur coin… Une mobilité va enfin être mise en place entre les 25 000 hauts fonctionnaires de l’Etat, des collectivités et des hôpitaux.
Etes-vous favorable à la suppression du corps préfectoral ?
B. M. : Treize réformes de la haute fonction publique ont déjà été menées, qui ont
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Gazette des Communes
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