Depuis la loi « Chevènement » de 1999, soit pendant vingt ans, tous les gouvernements de droite comme de gauche ont été en accord sur une mesure consensuelle : favoriser la FPU, à savoir, la péréquation des ressources économiques entre communes.
En cassant cette philosophie de partage, le projet de réforme de la DGF intercommunale lié au projet de loi de finances pour 2019 est clairement antipéréquateur : des communautés à fiscalité additionnelle capteraient des gains insolents de 300 % de dotation spontanée, tandis que des communautés à FPU seraient pénalisées. De plus, à partir du projet initial, présenté en juillet, les ajustements apportés par les associations d’élus avant la publication du texte, puis par les députés en première lecture afin de sauver la majorité des soldats métropoles, CU et CA ont quelque peu brouillé la signification du projet sans remédier pour autant à son caractère injuste. A ce jour, c’est un texte bancal qui vise à satisfaire des objectifs contradictoires. Pour prendre une vieille formule politique, au lieu de « couper les deux bouts de l’omelette », on avantage les deux bouts au détriment du cœur de l’omelette.
Effondrement des valeurs de point
La priorité de 2019 était plutôt de compenser le tsunami qu’ont subi cette année les 647 CC à FPU et DGF bonifiée dont les valeurs de point ont chuté de 42 % entre 2017 et 2018. Pour avoir voulu les avantager avec le passage, dans la loi « Notre », de six à huit blocs de compétence, on les a, en fait, laminées, car c’est la catégorie non bonifiée qui a capté les garanties, conduisant à cet effondrement des valeurs de point.
Au printemps, j’avais suggéré à la direction générale des collectivités locales de remettre à niveau les CC à FPU et DGF bonifiée en 2019, ce qui aurait coûté moins de 40 millions d’euros en « one shot » aux variables d’ajustement, soit beaucoup moins que ce que nécessite l’actuel projet. Et c’est d’ailleurs ce que le ministère avait fait en 2017, en « remplumant » les CA, qui avaient elles aussi subi un « bug » en 2016, lorsque les établissements publics de coopération intercommunale les plus riches avaient disparu en petite couronne parisienne et dans les Bouches-du-Rhône. Pourquoi refuser aux CC ce qui a été fait à l’époque pour les CA ?
En outre, il faut bien comprendre la dynamique qui résulterait de l’actuel projet de loi. On instaurerait un énorme effet de seuil à partir d’une intégration fiscale à 35 % pour les grosses et moyennes communautés, alors que 35 % représente juste le niveau de la moyenne nationale. Alors, d’ici à 2021 au plus tard, toutes les agglomérations auront atteint ce seuil en baissant les attributions de compensation et en reversant l’équivalent aux communes au titre de mutualisations. En conséquence, le système se bloquera. Le calcul actuel avait tenu vingt ans, et celui-là ne durerait que deux exercices : 2019 et 2020.
Il faut espérer que le Sénat et, ou, l’Assemblée nationale sauront, en deuxième lecture, soit profondément remanier ce projet, soit lui substituer purement et simplement une remise à niveau des CC à FPU et DGF bonifiée et, quant à la réforme globale, la réexaminer en liaison avec le projet de loi sur le panier fiscal qui sera soumis au Parlement début 2019.
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