Le studio 104 n’a pas désempli de la journée. Interrogés par l’Association des Maires de France (AMF), sous l’égide de François Baroin (LR), désormais chargé du rassemblement politique pour François Fillon, et André Laignel (PS) qui a conseillé Benoît Hamon, les candidats ont défilé à la tribune.
Tous présents à l’exception de Marine Le Pen, représentée par le sénateur-maire de Fréjus, David Rachline et Jean-Luc Mélenchon qui a délégué François Cocq, adjoint au maire de Champigny-sur-Marne, ils avaient pour consigne de se positionner sur les propositions de l’AMF.
Nicolas Dupont-Aignan et Jean Lassalle, défenseurs de la ruralité
Nicolas Dupont-Aignan, député-maire de Yerres, ardent défenseur de la France des territoires, n’a pas manié la langue de bois devant les élus. Mais il ne venait pas non plus pour les brusquer, délivrant un discours tout en empathie.
« Les communes, symbole du terroir, sont en train de mourir. Si nous ne changeons rien, nous garderons la féodalité des régions et les baronnies des départements. » Succès (facile) garanti.
Pour remédier à « la France des petits villages qui crèvent », le candidat de Debout La France, propose de supprimer les conseils régionaux et de transférer toutes les compétences au département.
Une confĂ©rence des rĂ©gions qui rĂ©unirait les prĂ©fets de dĂ©partement, de rĂ©gion et les Ă©lus dĂ©partementaux permettrait de mettre sur pied « une vraie politique de dĂ©veloppement Ă©conomique ». « Qui peut croire que c’est Ă Bordeaux qu’on va proposer de relancer l’économie Ă Bergerac ? » s’est-il interrogĂ© Ă la tribune.
Sur la même ligne, Jean Lassalle, qualifié in extremis à la présidentielle. Seul maire de France en exercice, avec le candidat de Debout La France, celui qui s’est fait connaître nationalement par une grève de la faim contre la fermeture d’une usine de sa circonscription en 2006, a fait un tabac devant l’assistance.
Sans avancer de propositions concrètes, il a dĂ©noncĂ© pĂŞle-mĂŞle « les prĂ©fets Ă qui l’on demande de devenir des garde-chiourmes », le dĂ©bat sur TF1 « qui a donnĂ© l’impression qu’il y a avait des candidats et des sous-candidats, des maires et des sous-maires, des citoyens et des sous-citoyens ».
Pour conclure, il a adressé un vibrant hommage aux maires ruraux : « Etre ou ne pas être, exister ou mourir, Maires de France, tenez bon ! » Succès (facile) garanti, bis.
Emmanuel Macron a voulu rassurer les maires sur la taxe d’habitation
Emmanuel Macron, le candidat d’En Marche, Ă©tait très attendu par les maires. Il a d’abord commencĂ© par une plaisanterie qu’il n’hĂ©site plus Ă faire pendant chaque raout d’élus : « on m’a souvent reprochĂ© de ne pas ĂŞtre Ă©lu, j’y travaille dĂ©sormais assidĂ»ment ». Mais sa propositions sur la taxe d’habitation a Ă©tĂ© accueillie avec agacement par l’AMF et l’assistance, et l’ancien ministre de Bercy a tenu Ă expliquer sa proposition d’exonĂ©rer 80% des Français de cet impĂ´t local par excellence.
« C’est un impôt injuste, inéquitable et qui pèse très lourd dans le porte-monnaie des ménages ». « Le dégrèvement de la taxe d’habitation pour 80% des Français sera intégralement compensé, j’en prends l’engagement devant vous »,, a-t-il affirmé, sous les huées des maires… qui se sont faits sèchement cueillir : « Ne me sifflez pas. Je vous respecte, respectez-moi. »
Puis Emmanuel Macron s’est employĂ© Ă caresser les Ă©lus dans le sens du poil : « cette mesure sera rĂ©gulièrement Ă©valuĂ©e par des Ă©lus locaux et des magistrats de la Cour des comptes. Vous constaterez ainsi que l’intĂ©gralitĂ© du remboursement et que la dynamique des bases locatives seront assurĂ©es. ». « Je ne vous ferai pas ce qu’on vous a fait sur la taxe professionnelle », a-t-il conclu.
Nathalie Arthaud, la candidate des « sans-grades »
Nathalie Arthaud, la candidate de Lutte ouvrière, a jouĂ©, sans surprise, son intervention sur le terrain de la dĂ©fense des travailleurs. « Très loin des professionnels de la politique, beaucoup de maires sont agriculteurs, employĂ©s, ouvriers, fonctionnaires… ». Et d’attaquer la baisse des dotations : « ce sont aujourd’hui les plus pauvres qui souffrent de leur effondrement. Les plus riches n’ont pas besoin des services culturels ou sportifs, mais ceux qui n’ont que la force de leurs bras en ont plus besoin que jamais. »
La professeure d’économie-gestion à Aubervilliers a conclu : « cessons de dire qu’il n’y a plus d’argent pour les communes. Le pacte de compétitivité et ses 41 milliards auraient permis de créer un million d’emplois à 1 800 euros nets charges comprises. L’argent est là et il devrait aussi vous revenir, à vous les communes. »
François Fillon fait marche arrière sur la baisse des dotations
Devant les maires, François Fillon a mis de l’eau dans son vin. Alors qu’il a gagné la primaire de droite en proposant une thérapie de choc pour les finances publiques, le député de Paris a réduit fortement son projet d’économies pour les collectivités, qui passe de 20 à 7,5 milliards en cinq ans. « Je ne pratiquerai plus le coup de rabot de façon aveugle », a ainsi expliqué l’ancien Premier ministre.
François Fillon est cependant restĂ© ferme sur les baisses d’effectifs dans la fonction publique. « Je propose de mettre en place 2 jours de carence et de faciliter la possibilitĂ© d’embaucher des contractuels. » « C’est Ă ce prix-lĂ que nous pourrons relancer l’augmentation des traitements des fonctionnaires et redonner des perspectives des carrières aux agents publics », a-t-il conclu.
Benoît Hamon défend les rythmes scolaires et propose la garantie opposable de service public
BenoĂ®t Hamon a jouĂ© franc jeu devant les Ă©diles. « Je n’ai jamais Ă©tĂ© maire », a-t-il commencĂ©. « Mais je sais qu’il n’y a pas trop de communes en France. Au contraire, elles protègent du dĂ©senchantement dĂ©mocratique ». « Quand j’entends qu’il faut rĂ©duire des milliers de communes », dans une allusion claire Ă François Fillon qui proposait en 2014 de supprimer 30 000 communes, « je rĂ©ponds que c’est le meilleur moyen de creuser les inĂ©galitĂ©s ».
Benoît Hamon a assuré les maires de « ne pas toucher aux dotations pendant 5 ans ». « C’est pour cela qu’il faut continuer la réforme de la DGF. Pour ce faire, je vous propose une loi de financement annuelle. »
Le candidat socialiste a tenu à défendre les rythmes scolaires, réforme qu’il a portée à l’Education nationale et qui reste très critiquée par bon nombre de maires. « Elle a permis de faire monter le niveau des élèves grâce à quatre heures de plus de cours. C’est pour cela que je continuerai de soutenir le fonds qui permet de financer cette grande réforme. Je propose également de labelliser les activités présentées aux élèves pour s’assurer de leur qualité. »
Enfin, Benoît Hamon a également défendu sa garantie de service public. « Aucun Français ne doit se trouver à plus de 30 minutes de services publics essentiels. Ce sera un droit opposable qui permettra de lutter contre la désertification de nos territoires. »
François Asselineau propose la sortie de l’Union europĂ©enne pour dĂ©fendre les communes
Le candidat de l’Union Populaire Républicaine (UPR), François Asselineau a défendu une « France indépendante qui ne doit pas ressembler aux comtés américains ». « Personne ne le dit, mais 15 à 20 000 communes vont disparaître dans les années à venir sous l’impulsion de l’Union européenne » a-t-il assuré à la tribune.
« Les maires que je connais me disent parfois qu’ils estiment être en dictature » a-t-il continué. « Il faut sortir de l’UE, comme les Anglais. C’est de cette façon que nos communes pourront s’en sortir. Sinon, nous nous réservons un futur funeste », a conclu le candidat.
Philippe Poutou appelle de ses vœux le parrainage citoyen
Le candidat du Nouveau Parti Anticapitaliste (NPA) a commencĂ© son intervention en Ă©voquant « les pressions subies par les maires pour ne pas soutenir les petits candidats ». « C’est pour cela que nous dĂ©fendons le parrainage citoyen » a-t-il expliquĂ©, avant de dĂ©fendre le droit de vote des Ă©trangers et la proportionnelle pour toutes les Ă©lections.
Philippe Poutou a Ă©galement dĂ©noncĂ© « ceux qui parlent de rigueur tout en confondant les comptes publics et leur propre compte en banque », citant les costumes de François Fillon. Enfin, ce responsable syndical a dĂ©noncĂ© « les mĂ©tropoles, les intercommunalitĂ©s quand elles ont lieu de façon forcĂ©e ».
Jacques Cheminade contre la rĂ©forme de la taxe d’habitation version Macron
Le candidat de SolidaritĂ© et Progrès, dĂ©jĂ candidat en 1995 et en 2012, a commencĂ© son allocution en citant Alexis de Tocqueville. « Les communes sont l’expression des peuples libres », a dĂ©clarĂ© Jacques Cheminade. Puis il a dĂ©clinĂ© ses propositions : le respect d’une pause institutionnelle, un vrai maillage des Ă©coles Ă©lĂ©mentaires dans le monde rural, un service public du numĂ©rique et l’Ă©radication totale des zones blanches.
Jacques Cheminade s’est Ă©galement positionnĂ© contre la rĂ©forme de la taxe d’habitation proposĂ©e par Emmanuel Macron, tout en enjoignant l’Etat Ă « rĂ©viser les bases ». Enfin, il a conclu son discours en appelant les citoyens « Ă prĂ©fĂ©rer leur carte d’Ă©lecteur Ă leur carte de crĂ©dit ».
Marine Le Pen et Jean-Luc Mélenchon se sont faits représentés. Retrouvez leurs propositions ici.
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