Ce n’est pas anodin : le pouvoir réglementaire local dont disposeraient les régions est posé dès l’article 1 du projet de loi clarifiant l’organisation territoriale de la République. L’article L. 4433-1 du CGCT serait ainsi complété par un alinéa aux termes duquel « Pour l’exercice de ses compétences, le conseil régional dispose d’un pouvoir réglementaire dont la loi définit l’étendue pour chaque compétence ».
Une disposition sibylline, mais qui pourrait amorcer une véritable évolution vers une décentralisation aboutie.
Le pouvoir réglementaire local est une déclinaison du principe de subsidiarité : il s’agit, pour tenir compte des diversités locales, de donner aux élus la capacité de produire des règles juridiques en phase avec les spécificités locales.
En réalité, c’est déjà le cas, par exemple, s’agissant des aides aux entreprises : le conseil régional détermine, dans le cadre de sa compétence légale, les catégories d’aides qui seront mobilisées, en fonction du contexte géographique, démographique, social ou économique.
Une révolution conditionnée
Toutefois, trois facteurs ou écueils seront à prendre en compte, qui tiennent au respect de la Constitution, à l’écriture des textes des lois, et la force des habitudes.
Le risque constitutionnel – L’organisation d’un pouvoir réglementaire local doit d’abord être compatible avec la Constitution, et plus précisément avec son article 1er. Les marges de manœuvre seront donc étroites.
L’adaptabilité des normes au plan local pourrait se heurter, à cadre constitutionnel constant, à deux principes : celui de l’unité de la République et celui de l’égalité. La seule ouverture possible serait la mise en œuvre d’une « retenue législative » selon laquelle chaque loi accorderait une latitude pour répondre réglementairement à leurs spécificités locales.
En ce sens, le projet de loi prévoit effectivement que la loi définit l’étendue pour chaque compétence. Mais attention, pour éviter l’obstacle constitutionnel, il ne suffira pas d’énoncer un principe général : chaque loi devra préciser, dans son champ de compétence, le principe de subsidiarité qu’elle autorise.
La fin de la « logorrhée législative » – Ce qui amène au deuxième facteur à prendre en compte : l’exercice d’un pouvoir réglementaire local ne sera possible que si la logorrhée législative cesse, avec une écriture de textes plus générale, qui ne cherche plus à régir par le menu l’étendue des situations existantes… ou potentielles.
Responsabilisation – La dernière condition de la réussite d’un pouvoir réglementaire local, c’est une prise de responsabilité locale. Laisser de larges marges de manœuvres à un niveau infra étatique risque aussi de se heurter à un « excès de résignation des collectivités territoriales », dans un pays historiquement centralisé, où l’on considère toujours que la parole de l’Etat est protectrice et la peur du juge paralysante.
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