Fin 2023, la France a franchi le cap Âsymbolique du million de ÂvĂ©hicules Ă©lectriques en circulation. Depuis, le rythme d’immatriculations ne cesse d’accĂ©lĂ©rer. Cette fois, l’épopĂ©e Ă©lectrique est bel et bien lancĂ©e. Ces dix dernières annĂ©es, les collectivitĂ©s y ont largement participĂ© en couvrant le territoire de dizaines de milliers de points de recharge ouverts au public.
« Au dĂ©but, il n’y avait mĂŞme pas d’usagers, mais il fallait rassurer les automobilistes qui s’inquiĂ©taient du manque d’autonomie de ces ÂvĂ©hicules », se souvient Jean-Jacques ÂCadet, directeur gĂ©nĂ©ral des services (DGS) de Territoire d’énergie DrĂ´me (1). « Les gens attendaient nos bornes pour oser y aller, mĂŞme si, aujourd’hui, on sait que 90 % des recharges ont lieu au domicile », renchĂ©rit Jean-Louis ÂCamus, prĂ©sident du syndicat dĂ©partemental d’énergies de l’Indre (2).
EncouragĂ©s par les appuis financiers de l’Ademe, de l’Europe ou des certificats d’économies d’énergie (programme Advenir), les syndicats d’énergie se sont lancĂ©s, parfois en tâtonnant, dans l’aventure. « Il y a eu toutes sortes d’initiatives car personne ne savait vraiment oĂą mettre les bornes, quel type choisir, ni comment tarifer tout ceci, se remĂ©more Jean-Marc Proust, prĂ©sident du cabinet GP Conseil. Dans certains dĂ©partements, il suffisait qu’un riverain demande la borne pour l’avoir. D’autres ont offert le service afin d’encourager le passage Ă l’acte. » La plupart ont dĂ©marrĂ© le service en rĂ©gie publique avant, souvent, de confier l’exploitation Ă des prestataires, devant la ÂcomplexitĂ© Ă gĂ©rer des infrastructures communicantes.
Les acteurs privés arrivent
DĂ©sormais, tout a changĂ©. Environ 1,7 million de points de charge privĂ©s sont dĂ©ployĂ©s Ă domicile ou dans les entreprises, et plus de 127 000 sont ouverts au public (voir les infographies). Sur ce dernier segment, les collectivitĂ©s qui ont d’abord portĂ© seules le dĂ©ploiement assistent maintenant Ă l’arriÂvĂ©e de nombreux acteurs privĂ©s. « Ils installent des bornes, soit par contrainte rĂ©glementaire – l’obligation d’équiper les parkings, par exemple –, soit parce qu’ils y voient une activitĂ© Ă©conomique Ă dĂ©velopper », indique Jean-Marc Proust. L’occasion pour les acteurs publics de faire le point sur leurs initiatives.
En CĂ´te-d’Or, oĂą le Âsyndicat mixte d’énergie ÂSiceco (3) a achevĂ©, en 2020, l’implantation d’une quarantaine de bornes, son DGS, Jean-Michel ÂJeannin, s’en tient Ă la loi : « Le code gĂ©nĂ©ral des collectivitĂ©s prĂ©cise que les collectivitĂ©s interviennent Ă condition de constater une carence du privĂ©. »
Aujourd’hui, si le syndicat envisage la pose de quelques bornes supplĂ©mentaires, c’est uniquement dans le but de dynamiser la frĂ©quentation touristique de certains endroits. Pour le reste, « le privĂ© saura aller lĂ oĂą il y a de la demande », assure le DGS. Le syndicat est en train de passer en revue toutes les options Âconcernant son parc actuel, dĂ©ficitaire de près de 100 000 euros par an. « On rĂ©flĂ©chit pour savoir si on continue d’exploiÂter ou si on le cède au privĂ© », dĂ©voile-t-il.
Le tarif unique, inégalitaire
Dans l’Indre, oĂą les 80 bornes du Sdei dispensent des Ă©lectrons au tarif unique de dix euros par recharge, quel que soit le temps ou la puissance, « on sait que le Âsystème ne peut pas perdurer ainsi, explique Jean-Louis Camus. Le service est très dĂ©ficitaire, mais aussi inĂ©galitaire, car les petites Zoe paient le mĂŞme prix que les gros SUV. Certaines de nos bornes sont sous-utilisĂ©es. A l’inverse, les acteurs privĂ©s s’installent lĂ oĂą il y a de la rentabilitĂ©. » A moyen terme, le syndicat envisage de dĂ©placer certaines bornes vers des zones plus attractives, « mais toujours dans une logique d’ÂamĂ©nagement du territoire. On ne peut pas abandonner le monde rural, et on sait que le privĂ© n’ira pas ».
Dans la DrĂ´me, Jean-Jacques ÂCadet n’a pas l’intention de cĂ©der la place au privĂ©. En 2020, onze syndicats, dont le sien, ont attribuĂ© une dĂ©lĂ©gation de service public Ă ÂEasy Charge pour gĂ©rer leurs 1 200 bornes (rĂ©seau ÂEborn). « Certaines sont très rentables, d’autres pas, c’est tout l’intĂ©rĂŞt de les regrouper », appuie-t-il. La Âsubvention d’équilibre d’environ un million d’euros s’amenuise avec le temps, et Eborn espère atteindre bientĂ´t la stabilitĂ©.
« Les usagers sont associés à certaines décisions »
Catherine Moncet, DGS du syndicat Territoire d’énergie Tarn (ex-Sdet, 387 700 hab.)
« Les Ă©lus locaux de notre dĂ©partement du Tarn ont dĂ©cidĂ© d’associer les usagers du Plein tarnais Ă certaines dĂ©cisions concernant la gestion du rĂ©seau public de 362 points de charge. Trois arènes de gouvernance ont Ă©tĂ© organisĂ©es depuis 2022, au cours desquelles une trentaine d’usagers, des Ă©lus et l’exploitant du rĂ©seau ont Ă©changĂ© sur un sujet donnĂ©. Ils ont actĂ© ensemble, en 2022, un changement de tarification. Faire payer Ă la minute Ă©tait devenu inĂ©quitable car certains modèles chargent plus vite que d’autres. La tarification au Âkilowattheure a Ă©tĂ© prĂ©fĂ©rĂ©e. Plus rĂ©cemment, le niveau de tarification a Ă©tĂ© discutĂ©. Certains usagers voulaient une baisse, mais nous avons expliquĂ© notre volontĂ© d’arriver Ă un Ă©quilibre financier en 2027. Finalement, nous allons examiner la possibilitĂ© de proposer une offre plus avantageuse aux riverains. »
Le Sdirve, kezako ?
Afin d’harmoniser le déploiement des infrastructures de recharge pour véhicule électrique (Irve) ouvertes au public, l’article 68 de la loi d’orientation des mobilités prévoit la possibilité, pour les collectivités, de réaliser un schéma directeur de développement, le Sdirve. L’objectif est d’aboutir à une offre coordonnée entre les maîtres d’ouvrage publics et privés. Actuellement, les acteurs privés n’ont pas toujours le réflexe de prévenir les pouvoirs publics lorsqu’ils installent une ou plusieurs bornes sur leur espace foncier. Une fois le Sdirve validé par la préfecture, les nouvelles implantations bénéficient d’une réfaction de 75 % sur les coûts de ...
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