Les collectivités sont-elles sensibilisées à la question de l’achat public vert ?
François Lichère : Aujourd’hui, ce sujet constitue une préoccupation majeure au sein des collectivités. Pour des raisons politiques évidentes liées à la lutte contre le dérèglement climatique. Mais aussi parce que la loi « climat et résilience » a permis de tirer la sonnette d’alarme. Les élus et les agents territoriaux ont ainsi pris conscience de l’urgence, même si les mesures principales de ce texte n’entreront en œuvre qu’en 2026.
Adeline Meynier Pozzi : Nous constatons en effet une environnementalisation des marchés publics. Chaque acteur met davantage de vert dans ses marchés qu’il y a quelques années, avec notamment des critères d’attribution ou des clauses environnementales.
Pourtant, vous faites le constat que des améliorations sont possibles…
F. L. : Il faut savoir que, dès qu’une clause environnementale est incluse dans un marché, celui-ci est considéré comme vert. Cela peut poser question. Il s’agit aussi de considérer l’effectivité des critères d’attribution. En général, cela laisse la part belle au candidat. Nous avons étudié les avis de 180 marchés publics de travaux en avril 2022, et 91 en contenaient au moins un. C’est plutôt positif. Seulement, ils étaient rédigés maladroitement : souvent, le candidat doit proposer, lui-même, des mesures. Par exemple, « performance en matière de protection de l’environnement », c’est tellement flou que, dans certains cas, il est trop difficile de comparer les offres et les acheteurs attribuent la même note à tous les opérateurs sur ce critère.
A. M. P. : Les collectivités ont du mal à vérifier l’applicabilité des critères. Il arrive qu’elles ne sachent pas si l’offre du candidat est adéquate pour y répondre. De même, au stade de l’exécution du marché, elles rencontrent des difficultés pour contrôler si les clauses vertes ont été appliquées par les entreprises.
Pourquoi les collectivités n’arrivent-elles pas à faire mieux ?
A. M. P. : Les freins sont connus. Il s’agit du manque de moyens et d’expertise. Mettre en œuvre des procédures et des clauses efficaces, les contrôler, cela prend un temps considérable. De plus, dans certaines collectivités, il y a un manque d’impulsion politique. Celles les plus avancées ont souvent un élu volontaire sur le sujet. D’ailleurs, le Spaser (schéma de promotion des achats publics socialement et économiquement responsables) est un bon outil pour faire connaître cette volonté politique à tous les agents de la collectivité, et même aux entreprises du territoire.
F. L. : Il existe aussi un manque de formation. Moins de la moitié des sondés en ont suivi une. Ils doivent se former par eux-mêmes, 88 % d’entre eux disent avoir consulté les fiches techniques de la direction des affaires judiciaires et 64 % lisent des revues spécialisées. Enfin, le réseau régional d’acheteurs est souvent cité comme ayant un rôle d’information important.
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