Un grand rendez-vous sous le signe de l’apaisement ? Un an après l’enterrement du plan Borloo par le prĂ©sident de la RĂ©publique, Emmanuel Macron, le ministre de la Ville et du Logement, Julien Denormandie, a rĂ©uni le 13 juin Ă la Grande Halle de la Villette l’ensemble des acteurs de la politique de la ville, y compris l’ancien ministre et maire de Valenciennes Jean-Louis Borloo lui-mĂŞme, arrivĂ© eu milieu du discours de conclusion, sous la bannière « La grande Ă©quipe de la rĂ©ussite rĂ©publicaine ». L’objectif : mobiliser Ă©lus, associations, conseils citoyens, acteurs culturels, sportifs et Ă©ducatif pour que « la promesse rĂ©publicaine s’applique sur tout le territoire ».
Un raout aux allures d’opĂ©ration de com’ qui permet au gouvernement de profiter d’un relatif consensus au sein des associations d’Ă©lus et de professionnels et de faire une photo de famille impossible Ă imaginer il y a encore un an.
Si Julien Denormandie a rappelé les actions concrètes mises en œuvre depuis la présentation de la feuille de route gouvernementale (dédoublement des classes de CP et CE1, déploiement de 30 000 offres de stage pour les élèves de 3ème, mise en place des cités éducatives, accélération du renouvellement urbain), il a reconnu que sur le terrain, les attentes sont encore nombreuses : « Pour les habitants des quartiers, les choses ne changent pas assez vite ».
Education et emploi
Du cĂ´tĂ© des professionnels, les rĂ©actions n’en demeurent pas moins contrastĂ©es. Si les signataires du Pacte de Dijon Ă©voquent un bilan plutĂ´t positif de l’action gouvernementale, les maires de Ville et banlieue posent un diagnostic bien diffĂ©rent.
Le constat est alarmant, s’inquiète Philippe Rio, maire de Grigny (PCF). « Il y a urgence Ă travailler ensemble pour refuser la fatalité ». Dans sa ville, oĂą 50% des Ă©lèves sortaient du système scolaire sans diplĂ´me, l’expĂ©rimentation de la citĂ© Ă©ducative est un bon exemple de cette coopĂ©ration entre les acteurs. « Si l’Education nationale bouge, cela entraine tout le territoire. Il faut une remise en cause de tout le monde, croiser les formations et les regards. »
Avec l’éducation et l’espoir placé dans les cités éducatives qui devraient être effectives dès la rentrée 2019, l’emploi est pour Julien Denormandie le second pilier de la réussite. Il a ainsi confirmé l’extension des emplois francs à de nouveaux territoires et l’assouplissement des conditions d’attribution.
Simplifier la vie des associations
Côté associations, là encore il y a fort à faire. « Dans les cités éducatives et au-delà , il faut absolument imaginer la place du monde associatif, que ce soit les grandes associations ancrées sur le territoire, mais aussi les associations de quartier », rappelle Mohamed Mechmache, président du collectif ACLEFEU. « Aujourd’hui les conventions durent trois ans. Mais il faut davantage sécuriser les associations et fluidifier leur manière de travailler », ajoute Philippe Rio.
A cet égard, Julien Denormandie a souligné « l’immense valeur ajoutée du tissu associatif » et  annoncé une « simplification drastique » des démarches. « Nous avons oublié que ce sont des bénévoles qui travaillent dans ces associations, a-t-il déclaré. Le but est d’être sur le terrain, pas de remplir des dossiers de 40 pages pour demander des subventions. » Ainsi, les demandes de financement seront préremplies, les justifications de subvention simplifiées et les conventions pluriannuelles d’objectifs seront systématisées en particulier pour les petites associations de proximité.
Mise en valeur des conseils citoyens
Autre acteur au cœur de la politique de la ville : les conseils citoyens. « Ils ont eu du mal à démarrer. Les participants ont été tirés au sort et il a fallu les familiariser pour qu’ils puissent parler à égalité avec les autres acteurs », reconnait Patrick Braouezec, vice-président du Conseil national des villes.
Reconnaissant l’importance de ces conseils, le ministre de la Ville et du Logement a annoncé une série d’annonces parmi lesquelles la constitution d’un réseau national d’information des conseils citoyens, le développement d’une offre de formation, l’organisation de rencontres territoriales ou encore l’incitation de a prise en compte de l’avis de ces conseils à chaque étape du contrat de ville.
Julien Denormandie a part ailleurs confirmĂ© que la rĂ©novation des contrats de ville Ă©tait reportĂ©e après les Ă©lections municipales. Une demande formulĂ©e par des nombreux Ă©lus d’intercommunalitĂ©s.
L’importance de l’image des quartiers
Quelques annonces donc mais qui ne satisfont pas totalement. Pour certains élus il ne s’agit que de « saupoudrage ». « L’opération de communication du ministre n’y changera rien car son panier est vide », a déclaré Gérard Cosme, président d’Est Ensemble (PS).
De plus, de nombreux représentants d’associations et d’élus estiment que la réussite devra aussi passer par un changement de l’image des quartiers. « Il y a un rôle des médias, mais aussi des élus et du gouvernement qui doivent aborder ces sujets sous l’angle de la valorisation. Beaucoup d’habitants eux-mêmes ont une vision négative de leur quartier. Il faut voir ces territoires comme des territoires de solution et pas des territoires à problèmes », estime Nadia Haï, députée des Yvelines (LREM).
15 millions d’euros pour 44 associations
Plus de 600 personnes étaient présentes jeudi 13 juin à la Grande Halle de la Villette pour le lancement de « la grande équipe de la réussite républicaine ». Parmi elles, de nombreuses associations qui œuvre quotidiennement dans les quartiers.
En fĂ©vrier dernier, un appel Ă manifestation d’intĂ©rĂŞt a Ă©tĂ© lancĂ© pour aider les associations Ă dĂ©velopper leurs projets dans les quartiers prioritaires et Ă les dĂ©ployer plus largement. Ainsi, sur les 350 candidatures, 44 projets ont Ă©tĂ© sĂ©lectionnĂ©s et 15 millions d’euros dĂ©bloquĂ©s Ă cet effet. Parmi les associations retenues, de grandes structures comme France mĂ©diation, l’Afev, Nos quartiers ont du talent, et de plus petites comme Les concerts de poche, La Cravate solidaire, Yes we camp, le Groupement nautique toulousain, FĂŞte le mur…
« Les associations sont vitales dans les quartiers car elles rĂ©pondent Ă de vĂ©ritables besoins, reconnait Chantal MainguenĂ©, fondatrice et prĂ©sidente du rĂ©seau MĂ´m’Artre, qui aide Ă la prise en charge des enfants après l’école, et laurĂ©ate de ce Tremplin Asso : « Ce genre de coup de pouce permet de s’implanter dans de nouveaux territoires. »
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