Quelle sortie de crise pour le gouvernement ? Deux jours après les graves violences occasionnées par les manifestations de gilets jaunes à Paris et dans plusieurs villes de France, une trentaine d’élus, des présidents des groupes parlementaires et de responsables des forces politiques, se sont succédé ce lundi à Matignon pour des entretiens avec le Premier ministre, Edouard Philippe.
Comme un symbole, Anne Hidalgo a été reçue avant les chefs de partis. Au surlendemain, selon Anne Hidalgo, des « plus graves émeutes dans la capitale depuis mai 1968 », la maire de Paris a mis en garde le Premier ministre contre « la crise majeure » que traverse le pays, lui demandant de s’appuyer davantage sur les élus locaux qui ont « une expérience de terrain qu’il faut prendre en compte ». Une requête entendue par l’exécutif selon lequel « en prévision d’éventuels nouveaux troubles, une réunion de travail se tiendra, avant la fin de la semaine, à la préfecture de police, associant la maire de Paris et les maires d’arrondissement ».
Des mesures annoncées cette semaine
Mais si rien n’a encore filtré sur ses intentions pour sortir de la fronde des gilets jaunes, le pouvoir joue clairement la carte des élus et de la proximité. Matignon, selon le Journal du Dimanche, veut mettre sur pied une « concertation la plus locale possible ». « La région et le département, c’est sans doute trop large. Il faut pouvoir redescendre au niveau de l’arrondissement pour évoquer les problèmes de la vie quotidienne », indique-t-on rue de Varenne.
Suspendu à la menace d’une nouvelle mobilisation des manifestants à Paris le week-end prochain, le calendrier est serré. Le Premier ministre devrait s’exprimer au Parlement dans les prochains jours. Un débat est d’ores et déjà calé ce mercredi à l’Assemblée nationale et jeudi au Sénat.
Mais Emmanuel Macron tarde à passer aux travaux pratiques. Selon Le Figaro, le Président a posé un lapin aux responsables des associations d’élus, attendus ce 4 décembre 2018 à l’Elysée. La réunion de travail, à laquelle devaient aussi prendre part les présidents des deux chambres, Richard Ferrand (LREM) et Gérard Larcher (LR), ainsi que le Premier ministre, a été tout bonnement annulée.
La France périphérique à l’offensive
Devant la gravité de la situation, les associations d’élus ont pourtant fait des offres de médiation. La semaine passée, Régions de France a réclamé « un moratoire sur la hausse de la fiscalité des carburants prévue au premier janvier. »
C’est maintenant Villes de France qui, ce 3 décembre, propose ses services. Pour les maires des communes-centres de 15 000 à 100 000 habitants qui se targuent d’être « les premiers élus au contact des gilets jaunes », les hausses de taxe sur les carburants ont été « la pompe qui cachait la forêt », « la goutte d’eau de trop dans un flot de difficultés quotidiennes ». Aussi l’association présidée par la première magistrate LR de Beauvais Caroline Cayeux réclame un « Grenelle du pouvoir d’achat et de la transition écologique ».
Situation « pré-révolutionnaire » ?
Pour les élus locaux, qui se sont souvent sentis mis sur la touche depuis le sacre d’Emmanuel Macron, la tentation de la convergence des luttes avec les gilets jaunes existe. « Tout le monde ne peut pas vivre dans les grandes villes. Ces revendications rejoignent les problématiques liées aux transports, aux déserts médicaux, que nous rencontrons en tant que maires », témoignait auprès de La Gazette, Pierre-Jean Zannettacci, maire socialiste de L’Arbresle (Rhône), lors du congrès de l’AMF, le 22 novembre. L’édile jugeait toutefois qu’« en tant qu’élu », son rôle n’était « pas de porter un gilet jaune ».
Mais depuis, la tension est monté de plusieurs crans. Interrogés sous le sceau de l’anonymat dans Le Monde, des préfets ne cachent pas leur inquiétude. Au lendemain du samedi noir des émeutes, ils évoquent une situation « explosive et quasi insurrectionnelle », voire « pré-révolutionnaire ».
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