L’affaire est née en Allemagne. Une entreprise a contesté la décision prise par la région de Hanovre de transférer des missions d’enlèvement et de traitement des déchets, dont elle était auparavant investie, à un syndicat de collectivités de la région. Une entité de droit public créée dans le cadre d’une réorganisation administrative. L’affaire remonte, par voie de question préjudicielle, à la Cour de justice de l’Union européenne (CJUE).
L’entreprise introduit en effet « une demande de vérification de marché public », considérant que la création de ce syndicat et le transfert concomitant de missions à celui-ci par les collectivités territoriales constituent, en réalité, un marché public. Les conditions du « in house » (à savoir, d’une part, l’existence d’un contrôle analogue et, d’autre part, la réalisation de l’essentiel de son activité) n’étant pas, selon l’entreprise, réunies, une procédure de passation de marché public aurait donc dû être organisée.
Un principe
En clair, la CJUE est interpellée sur le point de savoir s’il s’agissait bien d’une mesure d’organisation interne de l’Etat, garantie par la règle constitutionnelle de l’autonomie communale, consistant dans la réattribution de compétences entre des collectivités territoriales.
La cour affirme, au principal, que l’autorisation ou l’interdiction, pour les entités publiques des Etats membres, d’exercer une activité sur le marché relève de la réglementation interne des Etats membres, auxquels il revient d’apprécier si une telle activité est compatible ou non avec les objectifs institutionnels et statutaires de ces entités. Ainsi, le fait que des entités publiques concernées par un transfert de compétences puissent ou non exercer certaines activités sur le marché « relève de l’organisation interne des Etats membres ».
Des conditions
Mais, selon la CJUE, pour être considéré comme un acte d’organisation interne et relever de la liberté des Etats, un transfert de compétences entre autorités publiques doit remplir certaines conditions. Ce transfert doit porter non seulement sur les responsabilités liées à la compétence transférée, mais également sur les pouvoirs qui sont le corollaire de celle-ci : « Cela requiert que l’autorité publique qui se voit investie d’une compétence ait le pouvoir d’organiser l’exécution des missions […] et qu’elle dispose d’une autonomie financière permettant d’assurer le financement desdites missions. Tel n’est pas le cas si l’autorité initialement compétente conserve la responsabilité principale concernant ces mêmes missions, si elle se réserve le contrôle financier de celles-ci ou si elle doit approuver au préalable les décisions envisagées par l’entité qu’elle s’adjoint. » Un transfert de compétences ne saurait donc exister si l’autorité publique nouvellement qualifiée n’exerce pas cette compétence de manière autonome et sous sa propre responsabilité.
Soit, plus simplement énoncé : « Pas de droits sans obligations ; pas de responsabilités sans moyens… »
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