Le projet de loi « Sapin 2 », relatif à la transparence, à la lutte contre la corruption et à la modernisation de la vie économique, est passé entre les mains des sénateurs. Et plusieurs modifications ont été apportées, que ce soit en séance plénière ou en commission des lois.
Cette dernière a, par exemple, estimé opportun d’exclure les élus locaux des décideurs publics soumis à l’article 13 du texte, relatif à la transparence des rapports entre les représentants d’intérêts et les pouvoirs publics. Les élus locaux ne sont donc pas, dans le cadre de cet article, considérés comme susceptibles d’être influencés lors de leurs prises de décisions.
Les GIP sous le coup de la loi
Les pouvoirs publics locaux sont tout de même concernés par ce projet de loi. Même pièce, autre face. Car « les GIP et les établissements publics exerçant une activité industrielle et commerciale » sont considérés comme des représentants d’intérêts, « sauf lorsque la communication s’inscrit dans le cadre de la relation de tutelle entre les établissements ». Exactement au même titre que certaines personnes physiques ou personnes morales de droit privé (lobbys économiques, associations, ONG…).
Les agents publics des GIP et établissements publics concernés devront donc être inscrits au répertoire, géré par la Haute Autorité pour la transparence de la vie publique et institué par ce même article 13. Faute de quoi ils ne pouvaient plus s’adresser à l’exécutif ou à un membre d’une section administrative du Conseil d’Etat dans le cadre de l’élaboration des lois ou des textes réglementaires. Comme si les intérêts publics poursuivis par les personnes publiques étaient comparables aux intérêts chassés par les représentants d’intérêts de multinationales. En tant que porteurs de l’intérêt général, les agents publics ne devraient-ils pas plutôt avoir un accès privilégié aux auteurs de textes réglementaires ou législatifs ?
La parole publique affaiblie
Une définition qui fait bien évidemment les affaires des lobbyistes privés, qui voient la portée de la parole publique diminuée. Cette disposition leur plaît tellement que l’on serait presque tenté de se demander si elle n’aurait pas été directement soufflée à l’oreille des députés qui ont porté et voté l’amendement… par les lobbyistes eux-mêmes !
Il est en effet courant que les représentants d’intérêts envoient directement des propositions d’amendements aux parlementaires. Certains vont même jusqu’à établir des recommandations de vote des différents amendements votés en session.
Si cette pratique peut être légitime dans certains cas, lorsque l’expertise des acteurs présents sur le terrain est irremplaçable, elle l’est moins dans d’autres. Et notamment lorsqu’il s’agit d’encadrer l’action des lobbys dans l’élaboration des lois.