Globalement, la nouvelle directive adoptĂ©e par le Parlement europĂ©en le 13 juin 2013 introduit de rĂ©els progrès et encourage les pays dĂ©jĂ engagĂ©s dans l’Open data Ă aller de l’avant. Par rapport Ă 2003, le texte instaure un vĂ©ritable droit Ă rĂ©utilisation du secteur public. L’ancienne version dĂ©finissait les champs d’informations oĂą la rĂ©utilisation Ă©tait autorisĂ©e ; la nouvelle fait l’inverse, et exige que tout document entrant dans le champ d’application doit ĂŞtre rĂ©utilisable pour des usages commerciaux et non commerciaux.
Transparence sur le calcul des redevances – Autre avancĂ©e intĂ©ressante : l’introduction d’une obligation de transparence sur le calcul des redevances. La directive prĂ©voit que le mode de calcul utilisĂ© doit pouvoir ĂŞtre accessible sur demande. « Cette exigence de rendre les modes de tarifications complètement transparents en amont, c’est-Ă -dire avant mĂŞme qu’une demande de rĂ©utilisation soit soumise, pourrait avoir des consĂ©quences intĂ©ressantes, explique Pierre Chrzanowski, pour le groupe français de l’Open Knowledge Foundation. Il est peu probable que les organismes publics iront jusqu’Ă calculer des coĂ»ts marginaux pour tous les jeux de donnĂ©es qu’ils possèdent ; cela signifie que les donnĂ©es ne pourront pas ĂŞtre soumises Ă tarification, puisqu’aucun mode de calcul n’aurait alors Ă©tĂ© dĂ©fini, justifiĂ© et publiĂ© en amont », poursuit-il. Et d’en dĂ©duire : « C’est un très bon outil pour empĂŞcher les administrations de pratiquer des tarifications de donnĂ©es injustifiĂ©es. »
En culture, des accords d’exclusivitĂ© resteront possibles – En revanche, n’est une avancĂ©e qu’en apparence l’extension du champ d’application aux musĂ©es, bibliothèques et archives. Les dĂ©tenteurs de ces donnĂ©es se voient appliquer tant d’exceptions et des règles tellement moins strictes que la fin de l’exception culturelle n’est qu’une apparence. Exemple, concernant les voies de recours, en cas de dĂ©cision nĂ©gative, le texte prĂ©voit que « les organismes du secteur public communiquent au demandeur les raisons du refus ; les bibliothèques, y compris les bibliothèques universitaires, les musĂ©es et les archives ne sont pas tenus d’indiquer cette mention »(1).
« Des accords d’exclusivitĂ© resteront possibles, notamment pour la numĂ©risation des oeuvres », prĂ©cise Pierre Chrzanowski, en citant l’exemple de l’accord d’exclusivitĂ© de la BNF avec les entreprises privĂ©es de numĂ©risation.
Pas de voie de recours spĂ©cifique et rapide – L’autre dĂ©ception concerne les voies de recours. La directive ne permet toujours pas aux citoyens de faire valoir facilement leur droit Ă l’accès Ă l’information pour les donnĂ©es que l’administration n’aurait pas dĂ©cidĂ© de libĂ©rer. Les donnĂ©es sensibles Ă©tant nombreuses et la directive n’ayant aucun caractère contraignant pour les Etats membres, si une administration refuse de jouer le jeu, c’est un parcours du combattant qui commence.
C’est une situation que la directive prĂ©voit : « Toute dĂ©cision relative Ă la rĂ©utilisation fait mention des voies de recours dont dispose le demandeur pour contester cette dĂ©cision. » Et que le texte dĂ©finit mĂŞme avec beaucoup plus de dĂ©tails qu’auparavant : possibilitĂ© « d’un rĂ©examen par l’autoritĂ© nationale de la concurrence, l’autoritĂ© nationale d’accès aux documents ou une autoritĂ© judiciaire nationale », ce qui constitue tout de mĂŞme une avancĂ©e par rapport Ă 2003. Reste qu’il n’existe pas de recours spĂ©cifique, rapide et indĂ©pendant.
Concernant les formats (article 5), le texte favorise la mise Ă disposition des donnĂ©es du secteur public dans des formats ouverts lisibles par machine. Il ajoute mĂŞme cette prĂ©cision : « En les accompagnant de leurs mĂ©tadonnĂ©es », mais ne va pas jusqu’à imposer des formats libres et non propriĂ©taires.
CoĂ»t marginal mais des exceptions – Enfin, la directive rĂ©affirme, dans son article 6, le principe d’un coĂ»t marginal : « Lorsque la rĂ©utilisation de documents est soumise Ă des redevances, lesdites redevances sont limitĂ©es aux coĂ»ts marginaux de reproduction, de mise Ă disposition et de diffusion. » Mais laisse lĂ encore la place Ă de nombreuses exceptions et notamment les bibliothèques, musĂ©es et archives.
MalgrĂ© tout, la Commission europĂ©enne a estimĂ©, jeudi 13 juin, que cette directive allait « soutenir le marchĂ© des donnĂ©es en Europe ». Lorsqu’elle avait proposĂ© la rĂ©vision du texte en dĂ©cembre 2011, l’institution avait soulignĂ© que cette ouverture permettrait la crĂ©ation d’applications numĂ©riques, un marchĂ© qu’elle Ă©valuait Ă environ 40 milliards d’euros par an en Europe. « Nous avons enfin le cadre lĂ©gal pour stimuler l’Ă©conomie et crĂ©er de nouveaux emplois », s’est rĂ©jouie la commissaire europĂ©enne chargĂ©e des Nouvelles technologies, Neelie Kroes.
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