Même si les politiques culturelles territoriales ont globalement été absentes de la campagne présidentielle, force est de constater que, discrètement, les bibliothèques ont été reconnues dans leur rôle-clé en matière d’accès à la culture et aux savoirs. Le nouveau locataire de l’Elysée les a, à plusieurs reprises, mentionnées durant la campagne électorale.
Mettre fin à «une inégalité fondamentale»
Avec un leitmotiv : le nécessaire élargissement de leurs horaires d’ouverture. Interrogé, par l’Association des bibliothécaires de France (ABF), avec les autres candidats à l’élection présidentielle, Emmanuel Macron avait précisé ses intentions avant le premier tour, de façon assez détaillée.
Revenant largement sur la nécessité d’ouvrir plus longtemps les bibliothèques, il notait qu’il s’agissait de mettre fin à « une inégalité fondamentale », qui pénalise « ceux qui n’ont pas accès, chez eux, dans leur famille, à la lecture ou à une activité culturelle. » Plus globalement, le candidat Macron a souligné l’importance des missions de médiation pour la diversification des publics. Problématique qui devra être prise en compte « dans la formation et le recrutement des professionnels. »
Concernant le rôle de l’Etat pour inciter les communes à étendre les horaires d’ouverture, le nouveau président évoquait :
- des « contrats passés entre l’Etat et les collectivités », pour la prise en charge des dépenses de personnel supplémentaires. Sans toutefois préciser si des crédits supplémentaires seraient débloqués ;
- la nomination d’un « ambassadeur de la réforme » pour « convaincre » les élus locaux, et qui serait « garant de sa mise en œuvre ». Il s’agirait d’une « personnalité culturelle bénéficiant de relais auprès des élus locaux ».
Par ailleurs, Emmanuel Macron invitait les collectivités à faire preuve « de méthode » sur deux points :
- le dialogue social, « afin d’accompagner au mieux les professionnels dans l’adaptation du service public aux besoins des populations » ;
- la « détermination concertée », ce tant pour « les objectifs à atteindre (les horaires pertinents) que des moyens à mobiliser ».
Maintien des dispositifs d’aide existants
Autre priorité affichée : « le maillage du territoire ». Les dispositifs existants « doivent être confortés » affirmait le candidat Macron. Et de citer la dotation générale de décentralisation (DGD) et les contrats territoire-lecture. Sans préciser si les crédits affectés à ces dispositifs seraient augmentés ou pas.
Il invitait aussi l’Etat à être « attentif à la préservation des missions et des moyens » des bibliothèques départementales, qualifiées de « levier décisif en matière d’animation et de renforcement des lieux de lecture sur l’ensemble du territoire » .
Pluralisme
Dans son courrier aux bibliothécaires, Emmanuel Macron affichait sa volonté de « préserver [les bibliothèques] de tout risque de censure ou d’atteinte à leur liberté d’action, notamment de la part de pouvoir locaux, qui ne seraient pas convaincus de cela. » Il qualifiait en effet les équipements de lecture publique de « lieux emblématiques où se redéfinit un sentiment d’appartenance commune et où se perpétue un esprit de dialogue et de débat citoyen. ». « J’y veillerai personnellement », précisait-il, sans pour autant préciser comment.
La question de l’interférence éventuelle de certains élus dans les choix des professionnels (acquisitions, programmation culturelle) reste un sujet sur lequel la profession manifeste une grande vigilance. Comme le rappelait à Lagazette.fr Anne Verneuil, ex-présidente de l’ABF en 2014.
Bibliothèque des Champs libres, à Rennes, Cycle « A vous de jouer », janvier 2014, CC BY SA 2.0
Flou sur le prêt numérique
Beaucoup de professionnels seront déçus : Emmanuel Macron n’a pris jusqu’ici aucun engagement en matière de prêt numérique, ni même vraiment exprimé de convictions précises, encore moins de position sur le dispositif PNB (prêt numérique en bibliothèque) actuellement mis en oeuvre sous l’égide du ministère de la Culture et âprement discuté au sein de la profession. Tout juste a-t-il fait valoir que le développement des ressources numériques (non seulement le livre, mais aussi » l’offre audiovisuelle et musicale ») doit continuer avec l’accompagnement de l’Etat, dans le respect d’ « un équilibre entre exigence d’accès, impératif de rémunération des auteurs et caractère soutenable pour les budgets publics. »
©CC0 via Pixabay
Edouard Philippe, engagé pour les bibliothèques
Autre indice relatif aux intentions de l’exécutif en matière de bibliothèques : le profil du nouveau Premier ministre, Edouard Philippe, élu local engagé en faveur de la lecture publique. Le maire du Havre, en effet, s’est exprimé à plusieurs reprises sur la place qu’il accordait aux bibliothèques dans l’accès à la culture.
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