Hériter de nouvelles compétences, c’est bien. Être fin prêt pour les assumer, c’est encore mieux. Avec l’entrée en vigueur de la loi NOTRe, les intercommunalités prennent la main sur de nombreuses compétences nouvelles au 1er janvier 2017. Parmi celles-ci, les leviers du développement économique.
Dans ce contexte, la dernière étude menée par l’Assemblée des communautés de France (AdCF) (1) offre un état des lieux détaillé des interventions économiques et des modes d’organisations des intercommunalités.
Quelques mois avant le grand chambardement, les situations observées par l’AdCF montrent des disparités étonnantes. Et des intercommunalités qui ont encore beaucoup à faire pour être au point.
L’étude révèle ainsi que 66 % des intercommunalités ne disposent toujours pas d’une stratégie de développement économique formalisée. « Ce qui ne veut pas dire qu’elle n’en ont pas », tempèrent Annabelle Bossavit et Olivier Crépin, co rédacteurs de l’étude : beaucoup de petites intercommunalités travaillent leur stratégie sans cadre formel, ou dans un cadre plus large, comme celui du pays. De nombreuses structures font aussi le choix « d’externaliser » certains postes : « C’est une question d’organisation interne, explique Olivier Crépin. Par exemple, l’activité touristique peut être intégrée au service développement économique d’une intercommunalité,ou détachée dans une maison du Tourisme ».
Des services légers, mais compétents
Par ailleurs, les petites communautés sont encore 51 % à ne pas disposer d’un service de développement économique. Et parmi celles qui en sont doté, leur faible nombre de personnels interroge : les communautés d’agglomération de 100 000 à 250 000 habitants ne disposent ainsi que de 6,11 équivalents temps plein.
« Ce sont des services souvent légers en personnels », confirment les auteurs de l’étude.
Au risque de ne pas pouvoir répondre aux besoins des entreprises de façon personnalisée ? Non, répond Annabelle Bossavit, qui pointe des profils particuliers dans ces services, tournés vers l’efficacité : « Souvent bac + 5, avec une solide expérience dans le privé ».
La corrélation entre taille de l’intercommunalité et taille des équipes est également très marquée : « Si certaines interco semblent peu pourvues, ce n’est pas le cas de tout le monde. La métropole de Lyon, c’est 150 personnes au service développement économique… Mais c’est aussi 1,3 millions d’habitants », détaille Olivier Crépin.
Du côté des recrutements dans les services de développement économique, l’étude de l’Assemblée des communautés de France décrit des intercommunalités à la prudence de Sioux : à la question « Pensez-vous que les nouvelles compétences intercommunales en matière d’action économique vont se traduire dans votre communauté́ par le recrutement de développeurs économiques à court ou moyen terme ? », environ 70 % des communautés de communes – et 65 % des communautés d’agglomération – répondent « Non, a priori » ou « Je ne sais pas ».
Une frilosité qui s’explique par le « contexte mouvant », selon Olivier Crépin. Fusion des intercommunalités, rôle de « grand frère » des conseils départementaux et de ses agences, appelé à disparaître, autant d’incertitudes qui pèsent lourd au moment de diffuser une offre d’emploi.
Immobilier d’entreprises : d’une politique de subventions à l’accompagnement
Dans le domaine du soutien à l’immobilier d’entreprises, les données recueillies par l’AdCF montrent un changement d’approche des intercommunalités. Alors que les subventions ou les rabais représentent respectivement seulement 26 et 38 % des actions menées par les communautés de communes et les communautés d’agglomération, l’accompagnement à la recherche de locaux ou la gestion de ceux-ci ont le vent en poupe.
« On est en train de glisser du simple appui au développement économique ‘de subventions’, vers une notion de service/accompagnement des entreprises », confirment les auteurs de l’étude.
In fine, les intercommunalités sont-elles prêtes à relever les défis de la loi NOTRe ? « Nous sommes dans une période charnière, il faut donner du temps au temps », avance Olivier Crépin.
« Il y aura des mutualisations de services, peut-être une sectorisation du développement économique, anticipe Annabelle Bossavit. Cela pourrait recréer une animation économique de proximité ».
Attention cependant, préviennent les auteurs : « Les intercommunalités ne feront pas non plus de développement économique à la place des entreprises. Elles resteront un facilitateur ». À chacun son métier.
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Notes
Note 01 étude menée du 20 juillet au 15 septembre auprès de 30 communautés - plus 20 métropoles et communautés urbaines Retour au texte