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Désindustrialisation

François Ruffin : « Les élus locaux sont des pleurnicheurs »

Publié le 02/11/2022 • Par Jean-Baptiste Forray • dans : A la une, France

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© Frédéric KLEMCZYNSKI / Divergence
Dans un entretien-fleuve, François Ruffin (LFI) appelle son camp à reconquérir la France des sous-préfectures. Le trublion de la Somme en profite pour épingler le fatalisme des édiles face aux délocalisations.

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C’est l’ADN du député-reporter de la Somme, ces carcasses d’usines textiles. A la naissance de François Ruffin (Apparenté LFI), en 1975, les manufactures de sa circonscription turbinaient à plein régime. « Le rapport de force était favorable aux salariés, avec des luttes et des grèves régulières, des salaires relevés, une CFDT plus à gauche que la CGT », raconte-t-il, dans le sillon de son dernier livre (« Je vous écris du front de la Somme », éditions Les Liens qui Libèrent).
Dix ans plus tard, ces cathédrales de fer sont déjà rouillées. « Le patronat est parvenu à changer de terrain de jeu. Il a obtenu les accords multifibres qui ont rendu les délocalisations possibles vers le Maghreb, Madagascar, puis l’Inde et la Chine. Des siècles d’histoire sont liquidés, avec Bernard Arnault comme vautour, qui met la main sur l’empire Boussac pour mieux le dépecer et ne garder que Dior, Conforama et Peaudouce», cingle François Ruffin. Dans les journaux de cette époque, on ne parle plus que des Restos du Cœur.
Cette dépression n’est pas traitée politiquement. « C’est, alors, à la fin des années 80, que le Front national change radicalement de doctrine. Lui, qui était reagano-thatchérien et voyait dans l’Europe un rempart contre le bolchevisme, combat désormais les « importations sauvages », rappelle François Ruffin. Et évidemment, ce discours protectionniste trouve un écho par chez moi. »
Dans sa région, la Picardie, huit des 17 députés, élus le 19 juin dernier, appartiennent au RN. Une percée que l’on retrouve dans beaucoup d’autres « anciens bassins industriels, comme les Ardennes, le Nord-Pas-de-Calais, la Moselle et le Midi rouge », relève François Ruffin, qui s’est fixé un défi XXL : réconcilier la gauche avec les classes populaires de la France périphérique.

Quelle est la part de responsabilité de la gauche dans l’ascension du FN, puis du RN ?

Dans les années 80, arrivant au pouvoir, le PS juge que le discours des « travailleurs contre les actionnaires », des « petits contre les gros », est devenu archaïque. La gauche de l’époque, à l’instar de Jacques Delors avec l’acte unique européen, de Pascal Lamy avec les accords du GATT et de l’OMC, produit la mondialisation. Elle détruit sa propre base sociale, qu’elle abandonne. On se souvient que Lionel Jospin, dans sa campagne présidentielle de 2002, ne prononce plus le mot « ouvrier », avec le succès que l’on sait…

Autant d’évolutions qui sont assumées par le rapport de Terra Nova de 2011. Je défends la ligne résolument contraire. Je me suis bagarré pour que le parti de gauche intègre la question du protectionnisme, ce qu’a fait Jean-Luc Mélenchon, ce qui est un acquis.

La Nupes, à laquelle vous appartenez, n’a-t-elle pas, malgré tout, toujours tendance à parler aux métropoles plutôt qu’à la France des sous-préfectures ?

Le discours de la gauche trouve plus d’écho auprès des jeunes des centres-villes et des quartiers populaires. C’est tant mieux. Car, autant je rejoins Christophe Guilluy dans son diagnostic de 2004 « des nouvelles fractures géographiques », de la France périphérique (formulé avec Christophe Noyé), autant je n’oppose pas les campagnes populaires aux quartiers populaires qui, selon lui, seraient privilégiés. Cette hiérarchisation des souffrances, de la pauvreté, n’a aucun débouché progressiste possible.

Mais oui, aujourd’hui, la gauche peine à attirer la France des ronds-points, la France des « gilets jaunes », la France des sous-préfectures… Appelons-la comme on veut cette France-là. C’est une France plus diffuse que les quartiers populaires avec leurs grandes tours. On y trouve des hameaux, des zones pavillonnaires, des bourgs… Cette France est éloignée des pouvoirs politiques, économiques et médiatiques à Paris et dans les métropoles. Même un général de gendarmerie me le faisait remarquer récemment : quand une vague de délinquance touche une grande ville, la préfecture réagit tout de suite. En zone rurale, cela peut attendre… Idem quand 3 600 emplois sont menacés chez Scopelec, c’est diffus, ça ne perce pas les grands médias.

Comment réagissent les élus locaux aux délocalisations ?

Ce sont des pleurnicheurs. Ils vont aux portes des usines qui ferment avec leurs écharpes. Ils vont planter des croix sur les ronds-points, puis ils disent qu’il y aura de la revitalisation, une cellule de reclassement, des plans de formation… Emmanuel Macron a tenu ce discours, exactement, quand il est venu à l’usine de sèche-linge Whirlpool à Amiens entre les deux tours de la présidentielle de 2017. Les ouvriers se moquaient de lui, comme on remplit un bingo : « Il l’a dit ! Il l’a dit ! » Plus personne n’y croit…

C’est contre cet état d’esprit que j’ai créé mon journal Fakir à Amiens à la fin des années 90. Le journal du maire Gilles de Robien titrait sur « un carnaval fou et gratuit », mais sans dire un mot de la délocalisation chez Yoplait. Le magazine municipal se faisait la gazette des bonnes nouvelles.

N’êtes-vous pas un tantinet jacobin ?

Je suis pour l’alliance du haut et du bas. Quand Ambroise Croizat, en 1945, fonde la Sécurité sociale, il s’appuie sur l’expérience locale des caisses de solidarité des travailleurs et des mutuelles. Il n’aurait pas imaginé son « vaste plan » s’il n’avait pas déjà un peu existé en bas, et jamais le pays n’aurait accepté cette création à partir du néant. Il nous faut recréer le même mouvement, à la fois du bas et du haut, du local et du national. Non pas les opposer mais les conjuguer.

Je pense aussi à l’anarchiste et biographe de Léon Trotsky, Victor Serge, qui se retrouve un soir à Bruxelles auprès d’un élu socialiste ventripotent… L’édile lui dit : « Regarde, là, je suis en train d’installer le tout-à-l’égout. » Victor Serge a cette réflexion : « Ce maire socialiste, il a plus fait pour le prolétariat avec son tout-à-l’égout que moi en vingt-cinq ans à prôner la révolution ! »

Voilà pourquoi, je suis très ouvert aux parcours de ces élus qui ont été maire, puis conseiller départemental. La Macronie a beaucoup souffert de l’absence de liens avec les territoires que la droite et les socialistes peuvent encore avoir… Emmanuel Macron n’a pas senti, durant la mandature précédente, que certaines mesures étaient aberrantes et violentes pour la population. Je pense en particulier à la suppression subite des emplois-solidarité et aux baisses drastiques des financements des offices HLM.

Les zones à faible à émission, qui vont interdire l’accès des agglomérations aux vieilles voitures, n’annoncent-elles pas une saison 2 des « gilets jaunes » ?

Comment peut-on accepter que les pauvres ne puissent plus se rendre à un rendez-vous médical alors que les riches vont continuer à voler en jet au-dessus de nos têtes ? Tant que les mesures écologiques reposeront sur la seule responsabilité individuelle, elles créeront de la ségrégation. Ce sera punitif pour les plus modestes.

Ne faut-il pas malgré tout lutter contre l’étalement urbain qui met à mal l’équilibre environnemental ?

On doit aller vers un autre mode d’organisation de l’espace, moins consommateur en terres, mais pas en brutalisant les gens. Ce ne sont pas eux qui ont décidé d’installer les boîtes à chaussure des centres commerciaux aux entrées des villes. Ce sont, en revanche, bien les élus qui ont voulu tous ces ronds-points dont on sait aujourd’hui qu’ils étaient des nids à corruption…

Mais c’est bien la population qui a plébiscité le modèle pavillonnaire, qualifié de « non-sens écologique, économique et social » par la ministre du Logement, Emmanuel Wargon, voici un an…

Ce désir a aussi été créé par la publicité, pour les maisons Phénix par exemple… Même si cela répond, en effet, à une demande réelle d’individualisation des modes de vie.

Pour beaucoup de travailleurs, c’était un moyen de fuir les grands ensembles…

Dans le quartier nord d’Amiens, il y avait un bonheur à être là. Et puis, à partir des années 80, les usines ferment, le chômage augmente, les exclus du système scolaire ne trouvent plus leur place sur un marché de l’emploi sinistré, le trafic de drogue prend une tout autre ampleur, ce qui va produire de la délinquance. Il y a aussi une élévation du niveau de vie, l’envie d’avoir un bout de jardin. Les ouvriers du coin ont souvent des racines rurales et paysannes qu’ils ont voulu retrouver.

Dans des territoires comme le mien, les campagnes sont très populaires. Sur les 1 000 salariés de l’usine Goodyear qui a fermé à Amiens, il n’y en avait que 25 % qui habitaient l’agglomération pourtant d’un diamètre de 16 kilomètres. La très grande majorité avait des maisons à plus de 30 kilomètres du boulot.

Comment recréer des perspectives pour les anciens bassins industriels ?

Il faut relocaliser des pans de notre industrie, mais ne pas l’attendre de la main invisible du marché. Il faut des outils : taxes aux frontières, barrières douanières…

Et au-delà, je vois d’autres priorités. Faire des « métiers du lien », souvent féminins, auxiliaires de vie, aides à domicile, etc., des vrais métiers, avec statuts et revenus. Et mettre l’accent sur le bâtiment. Cela fait cinq ans qu’à l’Assemblée nationale je prêche dans le désert : il faut mettre des dizaines de milliards d’euros pour mettre fin aux passoires thermiques. C’est pourtant quatre fois gagnant : pour les factures des gens, pour l’emploi local, pour la planète avec moins de gaz à effet de serre et pour l’indépendance du pays.

Il faut mettre le paquet, avec des pubs à la télé du type « Vivez l’aventure de proximité. Sauvez votre pays et sauvez la planète !» Il faut aussi, dans le secteur, des salaires de 2 000 euros minimum, une semaine de congé supplémentaire, la possibilité si on a mal au dos de pouvoir entamer une deuxième carrière comme on fait pour les militaires… Là encore, ce n’est pas la main invisible du marché qui va faire ça… Hélas, au train où va le gouvernement, la rénovation thermique va prendre deux mille ans…

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François Ruffin : « Les élus locaux sont des pleurnicheurs »

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HERMES

03/11/2022 10h16

François Ruffin fait une analyse pertinente des problèmes. Mais il me semble qu’il se trompe sur la méthodologie à mettre en place.

D’abord, il y a un point que je partage pas: les syndicats n’ont pas à être de droite ou de gauche mais de défendre ceux qui les ont mis en place. C’est d’ailleurs ce que fait le patronat (il est vrai que le plus souvent les grands patrons sont de droite; mais pas tous – Or il font front commun). Pourquoi n’en serait-il pas de même pour les salariés?

Porter le SMIC à 2.000 €, quelle bonne idée! Mais que fait-on pour l’évolution des carrières? Applique-t-on le même pourcentage d’augmentation jusqu’à un certain niveau? pour tous les salariés?
Et bien entendu, la question subsidiaire pour la fonction publique: où trouve-t-on l’argent pour payer?
Si je ne me trompe pas, M. Ruffin dira: chez les riches. Mais c’est quoi quelqu’un de riche? Celui qui gagne plus de 100.000 € par mois ou celui qui est au-dessus de 4.000 €?
Si cette seconde somme est retenue, alors l’ensemble des parlementaires est riche! N’oublions pas que les élus disposent de dérogations sur les montants à déclarer à l’impôt sur le revenu… que bizarrement M. Ruffin n’évoque pas!
Si être riche c’est gagner plus de 4.000 €, demandez aux élus et à la population concernés s’ils sont d’accord pour payer plus. Pour une majorité d’élus, mon petit doigt me donne à penser qu’elle diffèrera peu de celle des citoyens concernés (LOL)!

Etre riche peut être vu comme disposer d’un capital d’un montant à déterminer. Comment? Par rapport à la moyenne de ce que possède la population ou par un chiffre comme 200.000 €, 500.000 €, 1.000.000 €…
Dans deux de ces cas, une personne comme M. Mélenchon serait riche. Or par ce que rapportent les médias, il n’est pas d’accord pour être considéré comme tel!

En un mot, avant de vouloir entreprendre de grands bouleversements pour le Peuple, il serait judicieux que les élus balaient devant leur porte en mettant un terme aux « avantages » dont ils bénéficient dont certains sont illégaux mais communs (où la loi dit-elle qu’une collectivité peut mettre à disposition d’un élu un véhicule – peu importe qu’il soit de fonction ou de service – qu’il utilise pour l’ensemble de ses fonctions… sans le prendre en compte en plus dans sa déclaration d’impôts?).

Ainsi, quand les droits des élus se seront rapprochés de ceux du Peuple, ils pourront alors envisager de changer le monde!

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