Sociologue et professeur de sociologie à l’université Paris 8, Nicolas Duvoux a été nommé président du comité scientifique du Conseil national des politiques de lutte contre la pauvreté et l’exclusion sociale en janvier. L’instance a rendu, en mai, un rapport au Premier ministre, intitulé « La pauvreté démultipliée : dimensions, processus et réponses ». Le sociologue revient, pour « La Gazette », sur la mise en œuvre de la stratégie de prévention et de lutte contre la pauvreté, trois ans après son lancement.
Depuis septembre 2018, cette dernière est présentée par le gouvernement comme une réponse aux problématiques de reproduction de la pauvreté, de précarité
des jeunes, d’insertion et d’accès aux droits. Elle s’organise autour de deux orientations prioritaires : la lutte contre les inégalités sociales dès le plus jeune âge et l’engagement d’une politique de sortie de la pauvreté par l’insertion et l’emploi. Cette stratégie, qui s’appuie sur des synergies avec le secteur associatif, les entreprises et les personnes concernées, porte sur cinq engagements : l’égalité des chances dès les premiers pas pour rompre la reproduction de la pauvreté, la garantie des droits fondamentaux des enfants, un parcours de formation pour tous les jeunes, des droits sociaux plus accessibles, équitables et incitatifs à l’activité et un accompagnement de tous vers l’emploi. Le bilan dressé par Nicolas Duvoux est en demi-teinte. Il pointe en effet du doigt la dichotomie entre les mesures du plan – dont certaines sont inachevées – et les mesures monétaires, prises en parallèle, affectant directement le niveau de vie des plus pauvres.
Quel regard portez-vous sur le plan de lutte contre la pauvreté ?
Ce plan est un instrument important qui a marqué l’ambition du gouvernement en la matière. Elle a visé à mobiliser les acteurs, à en créer de nouveaux (les commissaires de lutte contre la pauvreté en région) et à identifier des problématiques nécessitant des réponses spécifiques. Par exemple, éviter les ruptures d’accompagnement des jeunes majeurs sortant de l’aide sociale à l’enfance, favoriser la mixité sociale dans les quartiers en difficulté ou renforcer le suivi des allocataires du RSA. Mais il ne s’agit que d’un ensemble de mesures parmi d’autres, qui vont avoir des effets sur la pauvreté.
Dans les faits, le lancement de cette stratégie, qui représente une innovation conceptuelle dans la lutte contre la pauvreté et la mobilisation des acteurs, a coïncidé avec d’autres initiatives, par exemple sur les aides au logement – baisse des APL et, plus tard, calcul « en temps réel » de cette prestation – qui ont conduit, l’Insee l’a montré, à une hausse très importante de la pauvreté en 2018. Depuis sa mise en œuvre, cette stratégie, qui porte principalement sur
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