Peut mieux faire. Lorsque l’on interroge notre panel de répondants au baromètre « La Gazette » – Orange sur le degré de maturité de leur collectivité en matière de numérisation des services, seulement 8 % d’entre elles lui attribuent une note de 9 ou de 10 sur 10. Une façon de pointer un sujet loin d’être parfaitement intégré dans les organisations. Heureusement, 80 % des collectivités ayant répondu à notre enquête se donnent plus que la moyenne, montrant ainsi leur intérêt, et leurs lacunes, pour un sujet qui traverse tous les services.
Plus de collectivités se sentent suffisamment équipées pour le numérique. Ce résultat connaît des nuances en fonction de la taille des collectivités. Les plus petites sont les plus enclines à pointer un manque d’infrastructures et, selon Sébastien Côte, fondateur de l’entreprise Mon Territoire numérique, c’est à la fois une réalité et un ressentiment. « Oui, les communes rurales sont sous-équipées. Cela s’observe particulièrement sur le sujet du très haut-débit, car c’est leur attente numéro un. »
Démarches en ligne
Sur ce point, « elles ont raison de se sentir sous-équipées : les chantiers du plan France très haut-débit sont ouverts, mais la couverture complète n’arrivera qu’en 2022 ou en 2025, poursuit Sébastien Côte. Il faut faire attention à ce mécontentement, car ce n’est pas l’infrastructure qui crée les usages ! Nombre d’élus se cachent derrière leur petit doigt et l’absence de projet numérique masque souvent l’absence de projet de territoire. L’excuse est le manque d’infrastructures, mais la réalité est que les collectivités qui ont un projet trouvent les moyens et les alternatives (satellite, 4G…) pour atteindre leurs objectifs ».
Du côté des usages, c’est l’accès du citoyen aux démarches en ligne qui apparaît comme le principal bénéfice du déploiement du numérique dans les collectivités. L’amélioration du travail des agents semble un avantage plus secondaire et la différence de ressenti entre ces deux fondamentaux de la transition numérique étonne Muriel Chabert, directrice de la modernisation des administrations au sein du syndicat mixte Mégalis Bretagne (64 membres, 4,6 millions d’hab.).
Outils dématérialisés
« La mise en place d’un outil de démarche administrative en ligne doit se faire en interaction avec l’agent. Sinon, loin de lui simplifier la vie, les changements de processus risquent de compliquer son travail, affirme Muriel Chabert. On se souvient par exemple des portails famille : des formulaires pour la cantine, pour la piscine, etc., étaient ajoutés et, une fois qu’ils étaient remplis, un mail automatique était transmis à l’agent responsable. C’était alors à lui de s’organiser car il n’avait pas été inclus dans la réflexion du processus de dématérialisation. Pour fonctionner, démarche en ligne et efficacité du travail des agents devraient nécessairement se trouver à égalité. »
Lorsque l’on détaille les outils dématérialisés, on perçoit une augmentation de l’insatisfaction, même si les opinions favorables restent majoritaires. « Les agents vivent bien l’obligation de la dématérialisation et c’est logique car il y a une forte attente sur ce point, note Muriel Chabert. Mais ils voient les attentes des citoyens et l’écart avec ce qui existe concrètement. Cet écart est source d’insatisfaction et l’on peut citer en exemple le prochain chantier de la dématérialisation. En 2022, les services de l’urbanisme devront accepter toute demande en ligne de permis de construire. Dans le même temps, l’Etat se retire de la formation et ce sont les collectivités qui vont devoir accompagner les agents sur ce point. »
Objets connectés
Sébastien Côte relève, lui, le taux de satisfaction élevé sur les actions imposées, impulsées ou mises en place par l’Etat et ses satellites. « Sur des sujets qui émanent de la collectivité, comme la démocratie participative, c’est plus flou », explique l’expert, organisateur de l’événement Ruralitic. « C’est normal, poursuit-il, seules les collectivités les plus grandes ont une capacité d’ingénierie. C’est d’ailleurs tout l’intérêt de l’agence nationale de cohésion des territoires, qui intégrera l’agence numérique, et qui devrait être opérationnelle au mois de janvier. »
L’arrivée de cette agence, et le passage de l’Agence du numérique de Bercy à la Rue de Varenne, peut laisser l’espoir de l’évolution du ressenti de plus petites communes face au numérique. Sur les outils les plus récents, comme les objets connectés, la différence entre territoires est flagrante.
Gouvernance de la donnée
Parmi nos sondés, 31% estiment avoir une démarche de gouvernance de la donnée. « On vient de loin, note William Gonzalez, DPO dans plusieurs communes autour d’Orléans. Beau- coup de collectivités partaient de zéro en mai 2018, lors de l’arrivé du RGPD. Aujourd’hui, 60 % n’ont pas de DPO, pourtant obligatoire. Il faut mettre en place des structures mutualisées p our les petites communes.»
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Gazette des Communes
Références
- Etude réalisée en ligne pour « La Gazette » et Orange, du 5 août au 15 septembre 2019 auprès de 331 répondants issus de collectivités (217 agents et 114 élus) et produite par Infopro Digital études (etudes@infopro-digital.com).
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