C’est un glissement du singulier au pluriel qui dit tout de la métamorphose de l’Etat. Au fil des années, l’aménagement DU territoire a cédé le pas à l’égalité, puis à la cohésion DES territoires. L’imperium de la Datar (délégation interministérielle à l’aménagement du territoire et à l’action régionale) et l’ardente obligation du Plan ont été rangés au rayon des antiquités.
L’Etat privilégie des dispositifs ciblant chaque catégorie de territoires, aujourd’hui Action cœur de ville, demain Action cœur de bourg. Dans le même temps, il multiplie les programmes spécifiques, circonscrits par département, comme le Plan particulier pour la Creuse signé en avril 2019.
Concept nébuleux
L’heure est au « cousu main » et au « sur-mesure ». Une philosophie qui se traduit par la différenciation territoriale destinée à être inscrite dans la Constitution. L’Etat voit là l’affermissement de l’esprit de la décentralisation. Mieux, même, la traduction en acte du concept jusqu’ici nébuleux d’intelligence territoriale.
Une poignée d’élus sautent sur l’occasion. Parmi eux, le président de la Moselle qui, à la suite du projet de collectivité européenne d’Alsace, entend transformer sa collectivité en eurodépartement. Une structure dotée de prérogatives transfrontalières dans le domaine de la mobilité, de la santé, de l’emploi et de la formation. Mais les autres édiles ne se bousculent pas au portillon. Faute d’un véritable chapitre financier, le droit à la différenciation territoriale résonne comme un trivial « démerdez-vous ».
Vrai faux retour
Déjà, l’Etat délaisse ses projets les plus ambitieux, de la LGV Lyon-Turin au canal Seine – Nord-Europe. Devant l’absence de consensus parmi les élus, il renonce à s’attaquer au millefeuille du Grand Paris. Quant au retour, un temps envisagé, du conseiller territorial, il ne semble plus figurer à l’ordre du jour. A défaut de plan d’ensemble, l’exécutif ne sait visiblement toujours pas par quel bout prendre les territoires.
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