Depuis l’entrée en vigueur des ordonnances du 6 août 2016 et les différents décrets d’application, la réforme du dialogue environnemental et ses effets juridiques étaient attendus. C’est chose faite avec notamment le projet minier situé en plein cœur de la forêt amazonienne, dans l’ouest de la Guyane.
Impasse juridique
Du fait de ses enjeux économiques et environnementaux pharaoniques, ce projet a été présenté devant la CNDP, le 5 juillet, par son maître d’ouvrage. L’occasion pour ce dernier de faire part de son choix de bénéficier de la réforme du dialogue environnemental et, plus précisément, de ses dispositions transitoires. On peut ainsi lire dans le compte rendu de la réunion de la CNDP que « le maître d’ouvrage a décidé de ne pas saisir la CNDP au titre de l’article L.121-8 du code de l’environnement, en raison de sa volonté de déposer la demande d’autorisation avant le 31 décembre 2017, conformément aux mesures transitoires prévues par le décret du 25 avril 2017 ». Une possibilité d’exemption malgré un investissement total s’élevant à 780 millions d’euros et dépassant largement le seuil minimal de saisine obligatoire de la CNDP, fixé à 150 millions.
Parallèlement, le maître d’ouvrage a demandé à la CNDP de pouvoir bénéficier de la désignation d’un garant dans le cadre de la concertation préalable qu’elle envisage d’organiser. Refus catégorique de la commission, qui considère que « les précisions apportées par le maître d’ouvrage concernant le coût des bâtiments et des infrastructures du projet conduisent à un montant supérieur à 150 millions d’euros ». Ce projet relève en conséquence de son champ de compétence.
Sauf que l’autosaisine n’est reconnue ni par les textes, ni par la jurisprudence (1). Et la réforme du dialogue environnemental n’y a rien changé. Le projet guyanais mais aussi, plus largement, l’ensemble des projets d’aménagement pouvant bénéficier des dispositions transitoires de la réforme, sont dans une impasse juridique où ni débat public ni garant ne peuvent donc être mis en place.
Saisine par un tiers
Mais c’était sans compter sur l’association France Nature environnement, qui a dégainé, le 7 août, une autre nouvelle arme juridique pro – dialogue environnemental : la saisine par un tiers de la CNDP, comme le permet le nouvel article L.121-8 du code de l’environnement. Car cet article autorise désormais des tiers (2) à saisir la CNDP lorsque les caractéristiques techniques ou le coût prévisionnel des projets excèdent des seuils fixés par décret. La saisine de France Nature environnement ayant été déclarée recevable le 6 septembre par la CNDP, le dialogue avec les habitants peut à présent commencer.
Références
Article L.121-8 du code de l'environnement
Décret n° 2017-626 du 25 avril 2017 relatif aux procédures destinées à assurer l'information et la participation du public à l'élaboration de certaines décisions susceptibles d'avoir une incidence sur l'environnement et modifiant diverses dispositions relatives à l'évaluation environnementale de certains projets, plans et programmes
Domaines juridiques
Notes
Note 01 Conseil d’Etat, 13 décembre 2002, req. n° 229348. Retour au texte
Note 02 10000 ressortissants majeurs de l’Union européenne résidant en France, 10 parlementaires, une collectivité locale ou un EPCI ayant une compétence en matière d’aménagement de l’espace, territorialement intéressés, ou une association agréée au niveau national. Retour au texte