Les communautés XXL passeront-elles l’hiver ?
Souvent, les préfets sont allés au-delà des vœux du législateur. Dans leurs ébauches de nouvelle carte intercommunale, les plus petites communautés dépassent parfois allègrement le seuil modulable de 15 000 habitants. Dans près de la moitié de leurs projets, le nombre de groupement diminue d’au moins 50 %. L’Etat jette les bases de plus de 150 établissements publics de coopération intercommunale à fiscalité propre rassemblant au moins 50 communes.
Révision des copies – Ces groupements ne risquent-ils pas de délaisser les compétences de proximité (crèches, écoles, portage de repas à domicile, etc.) au profit de la stratégie (aménagement du territoire et développement économique) ? C’est tout l’enjeu du débat qui s’ouvre désormais.
L’Association des maires ruraux de France dénonce une course au gigantisme. L’Assemblée des communautés de France se montre, elle, plutôt conquise, arguant que les élus eux-mêmes veulent bouger. Le nouveau paysage territorial (super-régions et métropoles) peut, en effet, inciter au changement. Et les élus pourront retrouver de la proximité dans le cadre de communes nouvelles rassemblant, par exemple, les communes d’un EPCI fusionné avec d’autres.
Quoi qu’il en soit, les élus des commissions départementales de coopération intercommunale (CDCI) ont jusqu’au 31 mars pour revoir la copie préfectorale. Pour ce faire, il leur faudra dégager des consensus en leur sein : de l’ordre des deux tiers de cette instance. Les préfets notifieront leur arrêté de périmètre d’ici au 15 juin. Les communes auront alors 75 jours pour donner leur avis. Si celui-ci est globalement négatif, les préfets pourront « passer outre ». A condition que la CDCI leur donne le feu vert. Tout sera bouclé au 31 décembre 2016.
Réforme territoriale : les nouvelles super-régions dans les starting-blocks
Dans le cadre de la loi du 16 janvier 2015, l’élection, le 4 janvier, des présidents des sept nouvelles super-régions dessinées marque une nouvelle ère de la décentralisation. Ils devront vite trouver leurs marques à la tête d’assemblées souvent pléthoriques (204 élus en Rhône-Alpes – Auvergne, 183 en Aquitaine – Limousin – Poitou-Charentes, 170 en Nord – Pas-de-Calais – Picardie).
Chantiers multiples – La ministre de la Décentralisation, Marylise Lebranchu, se montre très optimiste : « Il y a là une formidable opportunité pour accroître l’efficacité de nos régions. » Un mandat de six ans ne sera cependant pas trop long pour harmoniser les politiques publiques, les documents de planification, la fiscalité ainsi que les régimes indemnitaires des agents. Tous les présidents ont promis de limiter les transferts géographiques de personnel. Tous se sont engagés à assurer un équilibre entre les anciennes régions.
Un premier test aura lieu d’ici au 1er juillet 2016. Chaque nouvelle collectivité émettra, dans une résolution unique, un avis sur le choix du chef-lieu et du nom de la super-région. Un décret sera ensuite pris en Conseil d’Etat avant le 1er octobre 2016. Une procédure qui ne concernera pas l’Alsace – Lorraine – Champagne-Ardenne. La loi du 16 janvier 2015 a, en effet, déjà déterminé la capitale du grand Est. Il s’agira de Strasbourg.
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Etat déconcentré – Eparpillement des missions en vue
Lancée au pas de charge au mois d’avril 2015 pour accompagner la fusion des régions, la réorganisation des services de l’Etat en région devait être opérationnelle au 1er janvier, même si sa mise en place concrète s’étalera durant l’année 2016.
Organiser la répartition des postes dans les services fusionnés, spécialiser les implantations géographiques selon les spécificités de chaque territoire… au total l’opération devrait générer, estime Jean-Luc Nevache, le préfet préfigurateur de la réforme, 1 500 mobilités fonctionnelles pour les agents et 500 mobilités géographiques. Des chiffres sous-évalués, selon les syndicats.
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Sur le fond de la réforme, on aura donc des préfectures régionales et des services déconcentrés, comme les Dreal, avec des implantations multisites, de préférence spécialisées, ce qui peut poser question en termes d’égalité d’accès aux services publics.
Les services implantés dans des lieux autres que les nouvelles préfectures ne seront-ils pas des coquilles vides ? On peut imaginer que des ajustements seront nécessaires en fonction de l’organisation géographique choisie par chaque conseil régional fusionné.
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Les priorités des collectivités territoriales en 2016
Sommaire du dossier
- Les priorités des collectivités en 2016 : à la recherche d’une nouvelle cohésion sociale
- 2016 et réformes institutionnelles : intercommunalités, supers régions, réforme de l’Etat
- Finances locales en 2016 : Réforme de la DGF, et financement du RSA
- Ingénierie publique : les grands dossiers à suivre en 2016
- Fonction publique en 2016 : Carrières et rémunérations, déontologie, temps de travail
- Politiques de cohésion en 2016 : politique de la ville, logement, éducation, et lutte contre la radicalisation
- Simplification administrative : Les relations avec le public seront (enfin) facilitées
- Commande publique en 2016 : une boîte à outils pour les marchés
- Politiques culturelles : projet de loi « Création » et lecture publique
- Politiques sociales en 2016 : protection de l’enfance et adaptation de la société au vieillissement
Thèmes abordés