Les 109 maires anti-métropole prédisaient la victoire de leur front du refus, arguant de leur nombre pour dénoncer un « déni de démocratie ». Ils ont eu droit à un camouflet sénatorial.
Seulement neuf mois après l’annonce ministérielle de voir fusionner six intercommunalités des Bouches-du-Rhône autour de Marseille, la nomination d’un préfet délégué pour trouver un consensus sur le sujet, une conférence métropolitaine et plusieurs manifestations, le texte a passé le premier sas législatif avec 310 voix pour et 23 contre.
Aix-Marseille-Provence sera officiellement formalisée le 1er janvier 2016 par la création d’une intercommunalité unique réunissant 92 communes et 1,8 million d’habitants, une des plus importantes du pays. « Ce territoire change d’échelle », résume Vincent Fouchier, directeur du Projet métropolitain préfigurant son installation.
238 élus – La métropole aura son siège à Marseille et accueillera une assemblée de 238 élus comprenant l’ensemble des maires (y compris ceux des plus petites communes) et une représentation « minoritaire mais représentative » des phocéens qui disposeront de 44,54 % des sièges (106). Les « anti » auront, comme ils le réclamaient, leur Conseil de territoire déclinant à un échelon local les sujets de proximité comme « l’épineuse question de la gestion des cimetières » argumentée pendant la campagne. Les plans locaux d’urbanisme seront également portés à cet échelon et consolidés au niveau métropolitain dans le schéma de cohérence territoriale (Scot).
La loi introduit aussi un Conseil de développement calqué sur le modèle des conseils d’agglomération élaborant les orientations stratégiques du territoire.
« Le combat continue » – Sonnée après le rejet de ses 80 amendements et de sa proposition alternative de métropole de projet moins contraignante, l’opposition a dénoncé « un nouveau déni de démocratie ». « Les sénateurs n’ont pas pris la mesure de la situation spécifique de notre département en décidant de créer une structure qui, dans les faits, ne pourra pas voir le jour sans le consentement des populations », critique ainsi Gaby Charroux, député maire (Gauche démocrate et républicaine) de Martigues.
« Le combat continue », avertit de son côté le sénateur-maire (PS) d’Allauch, Roland Povinelli, qui a conduit la fronde. « Des aménagements en faveur des communes sont toujours possibles d’ici l’adoption finale du texte ». La marge est désormais étroite. Car avec cette première victoire, les pro-métropoles savourent « une dynamique désormais infaillible », selon les termes de Jacques Pfister, président de la CCI Marseille Provence.
« Une dynamique désormais infaillible » – C’est maintenant au tour de la mission interministérielle installée le 27 mai de plancher sur l’équation technique. Installée depuis un mois, elle réunit une quinzaine de personnes, représentant de l’Etat et des collectivités locales, pour préparer les transferts de compétences et de personnels. « Le processus est connu mais n’a jamais été engagé à un tel niveau, explique un proche du dossier. On n’aura pas trop de deux ans pour préparer le terrain. »
Barcelone et Gênes, les autres métropoles portuaires du sud
Même configuration portuaire, même corset montagneux, mais des populations et une vitalité économique qui ont surclassé l’ancienne place forte phocéenne. Barcelone et Gênes ont un dénominateur commun, elles ont profité d’un tremplin : les Jeux olympiques de 1992 dans la capitale catalogne, le 500e anniversaire de la découverte des Amériques par le Génois Christophe Colomb dans celle de Ligure. « Ces projets allaient au-delà de la ville et ont permis de dépasser les antagonismes politiques », explique l’aménageur Jean-Claude Juan, co-auteur d’une étude sur les métropoles méditerranéennes. Barcelone a profité de surcroît de l’absence d’échelon administratif entre la région et la ville pour imaginer un territoire de projet. « Ils ont vu grand immédiatement. » A Gênes, ce sont les entrepreneurs et les acteurs sociaux qui ont forcé le passage en créant, avec la région voisine du Piémont, une grande zone économique liée au port qui a finalement débloqué des moyens. Marseille a les deux avantages : un événement culturel rassembleur (MP2013) et un hinterland(1) lyonnais puissant qui peut doper son activité portuaire.
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