Aquitaine : maintenir le potentiel hydroélectrique, un défi écologique
Historiquement, l’hydraulique tient une place importante dans le mix Ă©nergĂ©tique aquitain. « La part actuelle des Ă©nergies renouvelables est de 16 % dans la consommation finale. Nous pensons qu’il est possible de la doubler Ă l’horizon 2020 », affirme Peggy Kançal, conseillère rĂ©gionale dĂ©lĂ©guĂ©e au plan « climat ».
Mais il sera difficile de booster l’hydroĂ©lectricitĂ©, dĂ©jĂ prĂ©sente sur le territoire Ă travers 152 infrastructures (1), et qui reprĂ©sente 5,4 % du mix Ă©nergĂ©tique, aux cĂ´tĂ©s de la biomasse, du solaire et de la gĂ©othermie.
TollĂ© des associations – Dans le cadre de la libĂ©ralisation du secteur de l’Ă©nergie voulue par l’Union europĂ©enne, dès cette annĂ©e une procĂ©dure de mise en concurrence s’appliquera Ă deux concessions exploitĂ©es jusque-lĂ par la Shem, filiale de GDF-Suez.
Quant aux 18 centrales hydroĂ©lectriques gĂ©rĂ©es par EDF, elles ne sont pas concernĂ©es par le renouvellement des concessions Ă l’Ă©chĂ©ance 2015.
Trois critères de sélection seront retenus :
- l’efficacitĂ© Ă©nergĂ©tique,
- la gestion équilibrée de la ressource
- et le montant de la redevance versée.
Mais les Ă©changes promettent d’ĂŞtre houleux, avertit Peggy Kançal : « En mars 2013 ont dĂ©butĂ© les dĂ©bats rĂ©gionaux sur la transition. La rĂ©gion n’a pour l’instant pas de position officielle sur le fait de dĂ©velopper l’Ă©nergie hydraulique. L’un des enjeux est de savoir comment le SchĂ©ma rĂ©gional ‘climat-air-Ă©nergie’ [SRCAE], dĂ©jĂ adoptĂ©, va s’articuler avec le schĂ©ma rĂ©gional de cohĂ©rence Ă©cologique. »
De fait, la question va se poser pour les barrages : comment concilier leur dĂ©veloppement avec les continuitĂ©s Ă©cologiques, la trame verte et bleue, et la prĂ©servation des cours d’eau inscrites dans la directive-cadre sur l’eau de 2004 et la loi « Grenelle 2 » ?
En 2010, France Nature environnement et la FĂ©dĂ©ration nationale pour la pĂŞche en France avaient refusĂ© de signer la convention d’engagements pour le dĂ©veloppement d’une hydroĂ©lectricitĂ© durable. A ce jour, elles restent opposĂ©es Ă ce que celui-ci soit financĂ© par le consommateur, par le biais de l’obligation d’achat de l’Ă©lectricitĂ©.
Au final, la région ambitionne de ne pas descendre en dessous de 5 % dans le mix énergétique.
Ile-de-France : cap sur la géothermie, pièce maîtresse du mix énergétique
Le Grenelle de l’environnement a prĂ©vu d’augmenter la production gĂ©othermique de 500 % Ă l’horizon 2020. L’Ile-de-France s’active dans ce sens. « Les Ă©nergies renouvelables reprĂ©sentent moins de 5 % du mix Ă©nergĂ©tique. Notre objectif est de passer Ă 11 % en 2020, explique HĂ©lène Gassin, vice-prĂ©sidente du conseil rĂ©gional. Pour y parvenir, nous devrons mobiliser la gĂ©othermie. »
Explication de ce retour de flamme : « Pour des raisons de géologie, nous avons un potentiel important en géothermie profonde, qui accompagne un territoire très dense (20 % de la population française sur 3 % du territoire). Cela nous a permis de développer des réseaux de chaleur. »
Le couple gĂ©othermie profonde – rĂ©seaux de chaleur est dopĂ© par la baisse du prix des forages, tandis que celui du gaz augmente.
Redynamiser la filière – En 2008, le conseil rĂ©gional a pris une dĂ©libĂ©ration, dans le cadre du plan de relance de la gĂ©othermie initiĂ© par les agences rĂ©gionale et nationale Arene et Ademe, et le Bureau de recherches gĂ©ologiques et minières (BRGM).
« Jusqu’ici, le rythme Ă©tait d’un forage par an. A l’avenir, nous passerons Ă trois », prĂ©cise HĂ©lène Gassin. L’Ile-de-France espère ainsi redynamiser la filière, en surfant sur le dĂ©veloppement des pompes Ă chaleur et sur le prochain assouplissement du Code minier.
« Pour obtenir un permis de forer, la procédure administrative peut être très lourde », reconnaît la vice-présidente.
A Chelles (Seine-et-Marne), Emile Vignacourt, directeur du syndicat mixte de gĂ©othermie, est l’un des acteurs de la relance. Avec la rĂ©gion et l’Ademe, il a mis en place un schĂ©ma directeur de dĂ©veloppement du rĂ©seau de chaleur, sur la nappe souterraine du Dogger (2) : « En 2012, la production Ă©tait de 52 000 gigawattheures. En 2020, elle sera de 80 000 GWh. »
Basse et Haute-Normandie : énergies marines, deux régions sur le pont
Avec l’or bleu de l’Ă©olien offshore et de l’hydrolien (3) pour horizon en 2018, la Normandie se met en ordre de marche pour relever tous les dĂ©fis liĂ©s aux prometteuses Ă©nergies marines renouvelables, ou EMR.
Tandis que le raz Blanchard (Manche) concentre la moitiĂ© du potentiel europĂ©en de production d’Ă©lectricitĂ© hydrolienne, les sites de FĂ©camp (Seine-Maritime) et Courseulles-sur-Mer (Calvados) ont Ă©tĂ© retenus pour la construction de parcs Ă©oliens offshore : les deux Normandie se retrouvent Ă la proue de la transition Ă©nergĂ©tique !
« Notre potentiel est considĂ©rable », estime Jean-Karl Deschamps, vice-prĂ©sident de la rĂ©gion Basse-Normandie, chargĂ© du dossier. « A nous de crĂ©er, avec industriels, Ă©nergĂ©ticiens et institutionnels concernĂ©s, les filières de production, les formations et les infrastructures indispensables pour relever ce formidable dĂ©fi, porteur de milliers d’emplois non dĂ©localisables. »
Mobiliser les acteurs – En juin 2012, la Basse-Normandie a ainsi créé et dotĂ© de 100 millions d’euros une sociĂ©tĂ© publique locale, Ouest Normandie Energies marines.
Le rôle de cette SPL : stimuler, mobiliser le territoire et les acteurs de la future filière.
Face aux mĂŞmes dĂ©fis, la Haute-Normandie n’est pas en reste. Se positionnant comme chef de file de la transition Ă©nergĂ©tique, Alain Le Vern, son prĂ©sident, met les bouchĂ©es doubles : « Avec nos partenaires industriels, institutionnels…, nous avons créé l’association Energies Haute-Normandie pour prĂ©parer, entre autres, le dĂ©veloppement de l’Ă©olien offshore. Sur deux sites (projets Win I et II), seront par exemple expĂ©rimentĂ©s la construction d’Ă©oliennes, leur pose en mer, les mĂ©tiers et les formations liĂ©s Ă cette activitĂ©, et notamment Ă©valuĂ©s les besoins portuaires de cette nouvelle industrie. »
3 projets sont portés par les deux Normandie
- le parc Ă©olien offshore de FĂ©camp (100 Ă©oliennes, d’une capacitĂ© installĂ©e de 500 MW) ;
- le parc éolien offshore de Courseulles-sur-Mer (75 éoliennes pour une capacité installée de 450 MW) ;
- le parc-pilote hydrolien du raz Blanchard, d’une puissance de 3 Ă 12 MW.
Champagne-Ardenne : la production record d’une pionnière de l’Ă©olien terrestre
En matière d’Ă©olien terrestre, la Champagne-Ardenne est la première rĂ©gion française Ă avoir franchi la barre des 1 000 mĂ©gawatts de puissance raccordĂ©e au rĂ©seau, selon RĂ©seau de transport d’Ă©lectricitĂ©.
Au 31 janvier 2013, elle atteignait 1 138 MW, pour 576 machines installées.
AnimĂ©e par la volontĂ© d’ĂŞtre « la première rĂ©gion verte de France », la Champagne-Ardenne rĂ©colte les fruits d’une politique volontariste. Elle a publiĂ© dès 2001 un atlas du potentiel Ă©olien, recensant les gisements de vent susceptibles d’ĂŞtre exploitĂ©s sur son vaste territoire.
Une dĂ©marche qui l’a conduite Ă adopter en novembre 2005 son premier schĂ©ma rĂ©gional Ă©olien (le second l’a Ă©tĂ© en 2012). « Cette anticipation par rapport Ă d’autres rĂ©gions nous a permis d’attirer des investisseurs », estime le prĂ©sident de l’exĂ©cutif rĂ©gional, Jean-Paul Bachy.
Une formation adaptĂ©e – Si la rĂ©gion « n’a pas mis d’argent dans l’Ă©olien », elle a créé une formation de technicien de maintenance Ă©olienne au lycĂ©e Bazin Ă Charleville-MĂ©zières (Ardennes).
Celle-ci rĂ©pond aux besoins des centres d’entretien ouverts par les producteurs d’Ă©nergie Ă proximitĂ© des sites. L’enjeu est de susciter des retombĂ©es Ă©conomiques en termes d’emploi et d’activitĂ© industrielle, sachant que les turbines sont fabriquĂ©es Ă l’Ă©tranger.
Le prĂ©sident de rĂ©gion plaide pour l’installation de parcs d’activitĂ© autour des fermes Ă©oliennes, dans l’intĂ©rĂŞt des sous-traitants : « On favoriserait ainsi le dĂ©veloppement d’activitĂ©s locales, comme le sĂ©chage du bois grâce Ă la chaleur gĂ©nĂ©rĂ©e. »
Regrettant au passage que la fiscalitĂ© appliquĂ©e aux Ă©oliennes Ă©chappe en majeure partie aux rĂ©gions (4), Jean-Paul Bachy fixe un nouvel objectif Ă la sienne, terre de forĂŞts et d’Ă©levage : devenir, aussi, le leader dans le domaine de la mĂ©thanisation.
« Les petites exploitations agricoles ont montré la voie et, maintenant, arrivent des investisseurs importants. »
En partenariat avec l’Agence de l’environnement et de la maĂ®trise de l’Ă©nergie, la rĂ©gion subventionne les installations. A ce jour, dix-huit unitĂ©s de mĂ©thanisation Ă la ferme ont Ă©tĂ© autorisĂ©es.
2 870 MW
Ainsi est Ă©valuĂ©e la puissance totale potentielle de l’Ă©olien Ă l’horizon 2020 en Champagne-Ardenne, ce qui reprĂ©senterait 1 282 Ă©oliennes installĂ©es. La rĂ©gion produit aujourd’hui quatre fois plus d’Ă©lectricitĂ© qu’elle n’en consomme, grâce Ă la prĂ©sence sur son sol de deux centrales nuclĂ©aires, Ă Chooz et Nogent-sur-Seine. Dans son mix Ă©nergĂ©tique, la part du renouvelable, toutes origines confondues, est d’environ 4 %.
Cet article fait partie du Dossier
Energies renouvelables : les collectivités locales mettent le turbo
Sommaire du dossier
- Energies renouvelables : les collectivités locales mettent le turbo
- Des collectivités motivées, malgré les difficultés
- Les collectivitĂ©s mettent le cap sur l’Ă©olien offshore
- Hydroélectricité, géothermie, énergies marines, éolien terrestre : zoom sur quatre exemples
- Ortaffa (Pyrénées-Orientales, 1 300 hab.) : requalifier des exploitations agricoles grâce à un projet photovoltaïque
- Pour aller plus loin
- « Un vrai enjeu pour les entreprises publiques locales » – Alexandre Vigoureux, juriste Ă la FĂ©dĂ©ration des entreprises publiques locales
- Energies renouvelables : Thisted, ville-témoin de la créativité danoise
Thèmes abordés
Notes
Note 01 152 infrastructures hydrauliques sont installées en Aquitaine. Un tiers sont des unités de plus de 8 MW (dans les Pyrénées) et deux tiers de moins de 8 MW (en Dordogne). Soit une production annuelle de 1 309 GWh sur les grands ouvrages et de 268 GWh sur les petits. Ces centrales sont concédées en majorité à la Shem (filiale de GDF-Suez), EDF et la SNCF. Quelques petites installations sont exploitées dans le cadre de régies. Retour au texte
Note 02 34 installations géothermiques exploitent le Dogger, aquifère francilien à 2 000 m de profondeur, d'une superficie de 15 000 km2 et dont la température est comprise entre 56 °C et 85 °C. De nouveaux forages vont être initiés. Retour au texte
Note 03 Utilisant la vitesse des courants marins. Retour au texte
Note 04 Elles perçoivent 25 % de la contribution sur la valeur ajoutée des entreprises (CVAE), l'une des deux composantes de la CET (ex-taxe professionnelle). Retour au texte