Jean-Marc Ayrault a eu la primeur du document lors de la visite à Matignon, le 20 juillet, de la délégation de l’Assemblée de communautés de France (ADCF).
Les « propositions pour une nouvelle gouvernance des territoires et des politiques publiques » restent fidèles au sillon réformiste du groupement présidé par le président (PS) de Rennes Métropole, Daniel Delaveau.
Scrutin de liste dans toutes les communes – Peu portée sur la mystique du grand soir, l’ADCF écarte l’élection des délégués communautaires dans le cadre d’une circonscription intercommunale pour mieux appeler à la fin du panachage dans les petites communes.
Objectif : généraliser le scrutin de liste et, par-là, le fléchage des élus intercommunaux lors des municipales. Cette formule assure la parité dans les conseils communautaires. Elle offre aussi une représentation de plein droit aux oppositions aux maires en place.
A plus loin terme, l’ADCF recommande d’engager « une réflexion de haut niveau (mission parlementaire, commission ad hoc…) pour réfléchir à des modes de scrutin plus intégrateurs à l’horizon 2020 ».
Voire, à titre préfiguration, dès 2014, au sein des grandes intercommunalités urbaines », s’avance-t-elle. Une piste ouverte par le gouvernement.
Lors de leurs multiples auditions avec les associations d’élus, Jean-Marc Ayrault et Marylise Lebranchu, ministre chargée de la Décentralisation, ont mis sur la table une proposition émise en mai 2011 par la Fédération nationale des élus socialistes et républicains (FNESR).
Selon ce canevas destiné uniquement aux grandes intercommunalités urbaines, 60 % des conseillers communautaires seraient élus au suffrage universel direct à la proportionnelle à deux tours, les 40 % restants étant issus des conseils municipaux.
Des conférences régionales des exécutifs dès l’automne – L’ADCF, pour qui l’intercommunalité et la région forment le couple d’avenir de l’organisation territoriale, se fait l’apôtre de l’expérimentation qui ne doit pas « rimer avec généralisation ».
Dans la veine du rapport « de Peretti » publié en juillet 2011 et intitulé « La liberté de s’organiser pour agir », elle plaide pour que, « dès l’automne», voient le jour « des conférences régionales des exécutifs ».
Ces instances ne seraient plus réduites aux seuls départements et régions comme dans la loi du 16 décembre 2010. Elles seraient, notamment, associées à l’élaboration :
- de la nouvelle génération 2014-2020 des contrats de projet Etat-région,
- des schémas régionaux d’aménagement du territoire (SRADT),
- des schémas régionaux de développement économique (SRDE)
Rapprochement DATAR-CIV – L’architecture de l’ADCF s’appuie sur de « véritables chefs de file ». « Il faut une loi qui précise cette notion, aujourd’hui sans teneur, indique-t-on à l’ADCF. Le chef de file n’est pas une autorité organisatrice, encore moins un patron tout puissant. Il est l’échelon qui a le pouvoir de trouver des accords dans des secteurs où règne le cofinancement. »
Cet édifice a vocation, selon l’ADCF, à être coiffé par le Haut conseil des territoires (HCT) cher au candidat François Hollande. « Pour avoir des moyens et disposer d’une autorité, cette instance doit, comme le comité des finances locales (CFL), être créé par une loi », recommande-t-on à l’Assemblée des communautés de France.
L’association appelle, dans le même mouvement, à une renaissance de la Délégation à l’aménagement du territoire et à l’attractivité régionales (DATAR). La belle endormie doit, d’après l’ADCF, vite se rapprocher du secrétariat du comité interministériel à la ville (CIV) et entamer des travaux communs avec la Direction générale des collectivités locales (DGCL).
Des PLU intercommunaux obligatoires en 2015 ? Le groupement développe des propositions pour une pléiade de secteurs, de l’aménagement numérique à la santé, en passant par l’eau et les déchets.
« Après tous les débats sur la carte intercommunale qui nous ont beaucoup occupés ces dernières années, nous voulons, au début de cette législature, entrer dans le dur des politiques publiques, se justifie-t-on à l’ADCF. Nous entendons offrir de nouvelles solutions opérationnelles. »
Parmi ces dernières, « la promotion active, voire la généralisation obligatoire à l’horizon 2015, de plans locaux d’urbanisme (PLU) intercommunaux ». Ces PLU-I se heurtent, le plus souvent, à l’hostilité des maires. Cependant, les temps changent. Dans son rapport sénatorial du 17 juillet 2012 (« Pour une nouvelle architecture territoriale de l’ingénierie en matière d’urbanisme »), Pierre Jarlier (Union Centriste), président de la commission « Urbanisme » de l’Association des maires de France, se situe plutôt sur la ligne de l’ADCF.
Evolution du FPIC, lien fiscal et gouvernance
Parmi les propositions financières et fiscales, l’association évoque plusieurs évolutions du mécanisme du fonds de péréquation des ressources intercommunales et communales (FPIC) afin notamment que la clé de répartition soit « repensée » et que le calcul du potentiel financier communal soit « amélioré ». Elle souhaite aussi un meilleur ciblage des prélèvements et reversements à l’intérieur des EPCI et une convergence des critères des différents mécanismes de péréquation existants.
L’ADCF demande également à l’Etat, à la suite de la dernière réforme fiscale, de ne plus dégrader le lien fiscal entre territoires et entreprises et, dans le même sens, d’améliorer la répartition territoriale de la CVAE. Elle plaide par ailleurs pour des expérimentations accompagnées en matière de DGF unique de territoire et pour un assouplissement des règles de majorité requises pour décider de l’unification d’un impôt direct.
Plusieurs propositions touchent à la gouvernance des finances publiques, l’association préconisant par exemple
- de réunir une conférence nationale chargée d’identifier, de manière concertée, les priorités de l’investissement public pour les prochaines années ;
- d’adosser au futur Haut conseil des territoires, le comité des finances locales et les commissions rattachées (CCEC, CCEN) ;
- de renforcer l’Observatoire des finances locales et de le soumettre à un pilotage pluraliste ;
- et de consolider l’avenir de l’expertise en matière de finances publiques locales.
Le document remis au Premier ministre reprend aussi des demandes récurrentes des associations d’élus concernant l’achèvement de la réforme des valeurs locatives, le toilettage du stock de normes et l’inscription dans la loi de l’Agence de financement des collectivités.