Les députés ont adopté le 15 novembre par 136 voix contre 81 le projet de budget du ministère de la Justice mais les débats ont été monopolisés par la polémique sur la réforme de la carte judiciaire lancée par Rachida Dati, critiquée jusque dans les rangs de sa majorité. Rachida Dati a par ailleurs achevé le 16 novembre la présentation en régions de sa réforme de la carte judiciaire, un tour de France qui aura été une épreuve pour la garde des Sceaux, tant sa méthode a été contestée sur le terrain comme au niveau national.
Sans prendre en compte les annonces qui se sont faites à Bastia le 16 novembre en fin d’après-midi, la réforme se traduit par la suppression annoncée d’au moins 23 des 181 tribunaux de grande instance (TGI) du pays et 173 des 473 tribunaux d’instance, juridictions de proximité s’occupant des tutelles, expulsions, ou du surendettement.
Partout, Rachida Dati s’est heurtée au même comité d’accueil : avocats en grève, magistrats et greffiers sifflant en choeur, soutenus parfois par des élus UMP défilant avec leur écharpe tricolore.
Sur les bancs de l’hémicycle, les inquiétudes sont surtout nées de ses projets de suppression de tribunaux ; la garde des Sceaux a davantage dû s’expliquer sur sa refonte de la carte des juridictions que sur ses crédits pour 2008 (6,5 milliards d’euros, + 4,5%).
« Mme la ministre, vous resterez celle qui aura laissé des déserts judiciaires dans le monde rural », a lancé à Rachida Dati le socialiste Arnaud Montebourg qui a multiplié les prises de paroles contre les fermetures « à la hache » d’environ deux cents tribunaux d’instance sur quelque 470, là où sont traités les litiges de la vie quotidienne (endettement, tutelle).
« Ce sont les territoires ruraux et les citoyens les plus modestes qui paient le prix de cette contre-réforme », a ajouté le député de Saône-et-Loire.
« Une justice de proximité est une justice proche du citoyen dans tous les sens du terme », a insisté le député communiste Michel Vaxès.
La colère persistante sur le terrain se traduit par des manifestations quotidiennes, des blocages de tribunaux, des grèves d’avocats voire des grèves de la faim, jusqu’à la journée d’action prévue le 29 novembre chez les magistrats et fonctionnaires de justice.
L’adoption d’un amendement prévoyant 3 millions d’euros pour développer les maisons de justice et du droit a visé aussi à donner des gages.
Le rapporteur (UMP) René Couanau a défendu une réforme dénuée de « dogmatisme » car « le schéma initial, qui prévoyait une cour d’appel par région et un tribunal de grande instance par département, a été profondément assoupli ».
La ministre a failli provoquer une nouvelle polémique en évoquant une « piste » de réforme de l’aide juridictionnelle, prévoyant une « franchise » dont s’acquitteraient les justiciables qui n’ont pas les moyens de se payer un avocat.
Il s’agit d’une proposition d’un rapport sénatorial remis en octobre et non d’un projet du gouvernement, a rapidement précisé Rachida Dati alors que l’opposition brandissait la menace d’une nouvelle « taxe sur les victimes ».
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