La réduction des délais de recours et la réforme du contentieux de l’urbanisme prévues par la loi du 26 novembre 2025 vont-elles réellement sécuriser les projets, d’après vous ?
La loi prévoit effectivement un raccourcissement des délais de recours, puisque le délai de recours gracieux qui était de deux mois passe à un mois et il ne sera plus suspensif. Cela peut avoir pour effet d’éviter certains recours, mais cela va aussi amener à saisir le tribunal administratif plus rapidement, alors que les tribunaux sont encombrés. Je doute sincèrement que cette mesure favorise l’essor des projets, qui seront toujours contestés : tout le monde est favorable au logement en ce moment, mais pas nécessairement à côté de chez soi.
Peu importe que le recours soit parfaitement fondé ou non, c’est son existence même qui bloque les projets de logements, leur commercialisation et leur vente.
La loi offre aussi de nouveaux outils aux maires pour favoriser la construction de logement. Qu’en pensez-vous ?
Concernant les opérations de transformation urbaine (OTU) introduites par cette loi, je pense qu’il y a toujours un avantage à faciliter et à favoriser ou inciter les projets urbains et surtout à donner plus de moyens. Cependant, je ne suis pas certain que les maires aient réellement la volonté d’imposer de tels projets dans leur ville : la densification d’espaces résidentiels pourrait être mal vécue par les habitants et créerait une pression supplémentaire sur les maires. On peut faire le parallèle avec ce que prévoit la loi pour assouplir les règles relatives au stationnement urbain : je ne suis pas sûr que les villes favorisent de tels projets avec moins de places pour les voitures, parce que cela génère ensuite des conflits pratiques d’utilisation des places et de stationnement.
En matière de permis d’aménager multi-sites, cela pourrait être un bon outil pour les collectivités, car il permettrait de regrouper plusieurs sites non contigus sous un même permis : il s’agit peut-être de l’innovation la plus significative et la plus opérationnelle qui ait été prise par cette nouvelle loi. Mais encore une fois, je reste sceptique sur l’acceptation de ce type de projet par les communes, surtout si les sites sont très éloignés.
La difficulté réside aussi dans les critères fixés par la loi, qui sont très subjectifs, notamment l’obligation d’une unité architecturale et paysagère. C’est la beauté, malheureusement, du droit : il y a ceux qui réfléchissent et puis après, ceux qui l’appliquent et il y a toujours des ajustements. On attend encore un décret d’application, et le juge aura aussi son mot à dire. Pour le moment, les collectivités comme les opérateurs manquent de visibilité sur cet outil nouveau.
Et concernant la simplification des procédures d’élaboration des documents d’urbanisme ?
Passer de quatre procédures à deux, ce sera forcément moins lourd pour les collectivités, et cela permettra de sécuriser leurs procédures, et donc leurs documents. Les collectivités disposeront d’une marge de manœuvre renforcée pour articuler leurs projets d’aménagement avec leurs dynamiques locales, ce qui en fait l’un des volets les plus prometteurs de la loi.
Mais je ne suis pas certain que ce qui empêche la construction de logements, ce soit les recours contre les plans locaux d’urbanisme. La promotion immobilière est totalement à l’arrêt, et elle n’est pas à l’arrêt du fait des règles d’urbanisme, mais parce que les gens n’ont plus les moyens d’acheter et les banques ne prêtent plus.
Nous sommes aux prémices de cette loi. Il faut voir comment elle sera accueillie par les professionnels et peut-être que dans les décrets d’application, il y aura plus de précisions qui donneront du sens à cette loi. Pour le moment, je ne suis pas certain qu’elle résoudra les problèmes de foncier disponible.
Finalement, la loi du 26 novembre donne aux collectivités des outils plus rapides et plus souples, mais elle exige d’elles une maîtrise juridique accrue, une documentation plus rigoureuse et une anticipation renforcée des concertations locales. Pour les exécutifs locaux, l’enjeu des prochains mois sera de se saisir de ces nouvelles marges de manœuvre afin d’accompagner la production de logements et répondre aux besoins d’un marché sous tension.
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