552,8 millions d’euros pour la région Nord-Pas-Calais-Picardie ; 420,1 millions pour l’Alsace-Champagne-Ardenne-Lorraine et même respectivement 115,3 millions et 274,6 millions pour le Centre-Val-de-Loire et l’Ile-de-France, dont les périmètres n’évolueront pourtant pas le 1er janvier 2017. Ce sont les montants d’économies potentielles réalisables à l’occasion de la fusion des régions, selon l’Ifrap (fondation pour la recherche sur les administrations et les politiques publiques). Avec la nouvelle carte régionale, définie par la loi du 16 janvier 2015, ce think tank libéral imagine une économie totale de près de 3 milliards d’euros sur les dépenses de fonctionnement ; 4,08 milliards sur les dépenses d’investissements et de 2 237 ETP (équivalent temps plein) sur les 80 000 agents employés par les régions, en jouant sur la lutte contre l’absentéisme.
L’agence de notation Standard & Poor’s a, de son côté, prévu l’exact contraire dans une étude parue fin septembre. Elle y estime que la fusion des régions ne génèrera ni économie d’échelle, ni optimisation particulière. Selon l’agence, les éventuelles économies devraient en effet être compensées par les surcoûts liés notamment à l’alignement des statuts des agents territoriaux, mais aussi, l’augmentation du niveau de service ou l’harmonisation des systèmes d’information.
Les candidats se concentrent sur leurs missions historiques
Les candidats aux élections régionales ne communiquent guère sur ces potentielles économies et préfèrent se concentrer sur leurs missions historiques comme le transport, l’enseignement ou la formation professionnelle, qui représentent respectivement, 24 %, 21 % et 19 % d’un budget total de 28,8 milliards d’euros en 2013(1).
Sans compter que dans le contexte budgétaire actuel très contraint, les marges de manœuvre des futurs exécutifs régionaux seront extrêmement étroites, malgré les fusions. Le taux d’endettement de ces collectivités, qui devrait dépasser les 100 % d’ici l’an prochain, tout comme le très faible levier fiscal à disposition – taxe sur les cartes crises qui rapporte 2,1 milliards d’euros par an et une fraction encadrée de la TICPE pour environ 4 milliards d’euros annuels – ne simplifient pas l’équation.
Un enjeu plus économique que financier
S’il n’y a finalement pas de véritable enjeu financier autour de ces élections régionales et de cette nouvelle carte administrative, il y a bel et bien un enjeu économique majeur. La loi Notre du 7 août 2015 définit dorénavant les régions comme les chefs de file du développement économique, quand cette compétence était jusqu’à présent partagée, notamment avec les départements. Elles bénéficieront ainsi, à compter de 2017, d’environ 4 milliards d’euros supplémentaires, issus de la part départementale de la cotisation sur la valeur ajoutée des entreprises (CVAE) et verront en conséquence leur budget consacré au développement économique tripler par rapport à 2013 (2 milliards d’euros, soit 7 % du budget total), toute chose égale par ailleurs.
Le poids économique est d’ailleurs l’autre argument mis en avant par le gouvernement pour justifier la fusion des régions. Dans un environnement européen très compétitif, les entités françaises sont souvent qualifiées de nains économiques par rapport à leurs voisines. La nouvelle organisation régionale ne devrait pourtant pas changer fondamentalement la donne. Avec un budget de 4,4 milliards d’euros, l’Ile-de-France, première région française, ne pèse rien par rapport à la Rhénanie du Nord-Westphalie (61,4 milliards) ou la Bavière (49,9 milliards) qui disposent d’ailleurs de davantage de moyens – mais aussi de compétences – que les toutes les régions françaises réunies.
La seconde région française Rhône-Alpes, qui pèse aujourd’hui 9,8 % du PIB national, devrait atteindre 11,5 % au 1er janvier 2016 après la fusion avec l’Auvergne. Pas franchement révolutionnaire.
Des régions plus homogènes
En revanche, le nouveau découpage devrait rendre les régions plus homogènes, avec l’émergence d’une classe « moyenne » composée de cinq régions représentant autour de 7 % du PIB national et 7 à 10 % de la population. Ces régions affichent toutefois de fortes disparités dans leurs niveaux de dépenses – moins de 400 euros par habitant en Aquitaine-Poitou-Charentes-Limousin contre plus de 450 euros en Nord-Pas-de-Calais-Picardie – comme dans leur taux d’administration((Il s’agit du nombre d’agents employés par la région et ses départements) : 1 agent pour 126 habitants en Languedoc-Roussillon-Midi-Pyrénées contre 1 agent pour 158 habitants dans le Nord-Pas-de-Calais-Picardie.
Il reste désormais aux électeurs à évaluer la crédibilité des promesses des candidats par rapport à cette nouvelle organisation institutionnelle sous forte contrainte économique et financière. A moins que d’autres facteurs de choix moins rationnels n’entrent en jeu…
Part des 13 nouvelles régions métropolitaines dans le PIB national en 2013 :
Cliquez sur la carte pour accéder aux informations suivantes : part dans le PIB national ; part de la population ; dépenses par habitant et nombre d’agents employés par la région et ses départements.
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Note 01 dernières données consolidées de la direction générale des collectivités locales (DGCL) Retour au texte