Pourquoi avoir consacré un colloque puis un ouvrage (1) sur le métier d’élu local ?
Il y a plusieurs raisons à ce choix. Tout d’abord parce que ce colloque a été organisé le 6 mars 2020 avec l’Observatoire de l’éthique publique dont son président, René Dosière, avait écrit un ouvrage sur ce même thème en 2014. Six ans après, il nous est apparu intéressant de dresser une sorte de bilan, nous voulions voir si le statut de l’élu local avait changé. Et puis, il y avait le scrutin des élections municipales et ses résultats qui nous ont permis de dessiner le profil du nouvel élu.
Justement quel est-il ?
On assiste à une vraie féminisation des élus locaux. Depuis plusieurs mandatures, les femmes sont plus nombreuses et ce même dans les assemblées délibérantes. Il faut toutefois noter que les femmes élues sont peu dans les exécutifs locaux, à l’exception de certaines villes comme Paris, Nantes, Rennes…
Sur les autres aspects, à la différence des élus nationaux où lors des dernières élections, les professionnels de la politique ont été mis de côté, les élus locaux gardent ce profil de techniciens, de professionnels de la politique. Cela s’explique en partie par les différentes réformes qui ont fait de la fonction d’élu local, une fonction très technique.
Enfin, parce que la fonction d’élu local est très chronophage, ceux-ci sont majoritairement âgés.
Pensez-vous que les élus locaux sont assez formés ?
Récemment le Sénat a adopté le projet de loi ratifiant les ordonnances portant réforme de la formation des élus locaux. Cette évolution du droit à être formé est une bonne nouvelle. Il faut toutefois renforcer la formation des élus au cours de leur mandat.
Il faudrait même qu’elle soit obligatoire pour les premiers mandats notamment en matière de déontologie, des risques juridictionnels liés à la corruption. Certains élus se laissent parfois déborder par les lobbies par méconnaissance, ce qui les conduit dans certains cas à commettre des délits de favoritisme dans leurs marchés publics.
Faudrait-il également réformer le système indemnitaire des élus locaux ?
La question des indemnités que perçoivent les élus est un vrai sujet. Si on la professionnalise, cela attirerait des candidats à la fonction mais c’est un jeu dangereux. Ces candidatures seraient-elles sincères ou uniquement guidées par l’appât du gain ?
Pour autant, je suis favorable à repenser le système de l’indemnisation. Il y a aujourd’hui une dizaine de lois qui régissent le système de l’indemnisation. Il faudrait refonder ce régime en modulant, par exemple, en fonction des autres ressources perçues par l’élu. Mais c’est impossible aujourd’hui en vertu du principe de gratuité.
Pour autant, si on fait sauter le verrou du principe de la gratuité – ce qui posera un problème du côté des finances publiques – c’est l’appréhension de la décentralisation qui sera changée. Aujourd’hui, la décentralisation est ambigüe en France : elle a d’abord été administrative puis, au fil des réformes et des compétences transférées aux collectivités, est devenue politique mais sans être suivie d’une évolution juridique du statut de l’élu et du régime de son indemnisation…. Et ce, parce que nous sommes issus d’une culture jacobine.
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