Comment qualifier l’urbanisme marseillais ?
Marseille paie les choix hasardeux de développement qui lui ont été infligés dans les années 60. Depuis, ses développements économique et urbain ont connu des phases d’euphorie et de dépression inédites dans le pays. Son urbanisme catalyse trois facteurs qui nourrissent les crises urbaines : disjonction entre production immobilière et croissance de l’emploi ; décalage entre type de biens produits et demande ; isolement des cités. La ville s’étend sur 240 kilomètres carrés, soit la superficie de la Seine-Saint-Denis, et son urbanisation s’est développée de façon extensive, au gré d’opportunités foncières. Les grands ensembles sont parfois situés en haut d’une colline, au bout d’une route en cul-de-sac. Mal greffés aux noyaux de ville historiques, ils ne tirent pas profit d’atouts exceptionnels : vue sur la mer, proximité de la nature, etc. En revanche, l’éparpillement marseillais propose une variété de configurations urbaines, avec des HLM qui jouxtent des noyaux villageois, des quartiers pavillonnaires ou de grandes copropriétés.
Le destin de ces grandes copropriétés est corrélé avec celui des cités…
C’est une autre spécificité locale : Marseille compte 80 000 logements dans des copropriétés de plus de 100 logements, construites dans les années 60. Des appartements souvent vendus sur plan à des Français d’Indochine ou d’Afrique du Nord, attirés par la perspective d’une retraite au bord de la Méditerranée. Mais, très vite, ils ont quitté ces constructions de qualité médiocre, d’abord pour des résidences plus récentes, ensuite pour des villas dans les communes alentour. La location de ces logements aux plus précaires a, alors, contribué à la paupérisation rapide de quartiers entiers.
Dans ce contexte, comment l’Agence nationale pour la rénovation urbaine (Anru) a-t-elle travaillé ?
L’action de l’Anru a été décisive. Elle a permis de coordonner les collectivités et les bailleurs autour d’une méthode, matérialisée par la contractualisation. En abondant les budgets (1,2 milliard d’euros injectés sur quatorze sites d’intervention) et en bousculant la gestion territoriale : créer des rues, donner une adresse propre à chaque immeuble d’une cité, faire en sorte que la collecte des ordures ou l’entretien de l’éclairage soient assurés, améliorer une desserte de transports en commun, etc. Il faut parfois batailler des mois pour atteindre ces objectifs. Personne ne viendra couper de ruban afin d’annoncer ces petites victoires, qui replacent pourtant les quartiers et leurs habitants dans la ville. Travailler par le biais d’un groupement d’intérêt public nous a apporté de la souplesse et des marges de manœuvre, tant pour constituer une équipe dédiée que pour faire avancer les projets et bâtir des partenariats.
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