La zone de fortes turbulences traversée par le Plan France très haut-débit en 2017 n’a en rien entamé sa dynamique ni affecté la détermination des collectivités à mener à bien l’aménagement numérique du territoire. Les dernières attributions de délégations de service public mobilisent ainsi toujours moins de subventions publiques au regard d’objectifs de déploiements de plus en plus ambitieux.
L’Arcep constate d’ailleurs que l’accélération récente des déploiements FTTH est essentiellement liée aux prises construites par les RIP. En effet, les déploiements FTTH en zone privée restent très en retrait des promesses de 2011, au point que l’Etat a concédé un délai supplémentaire de deux à cinq ans à Orange et à SFR en contrepartie d’engagements opposables pris par eux, tels que le prévoit l’article L.33-13 du code des postes et des communications électroniques.
Pourtant, c’est ce dynamisme des RIP que l’Etat semble s’être attaché à briser, en fermant le guichet France THD et en cherchant à confier encore plus de prises aux opérateurs privés en lançant les Amel. Pourtant, sur les 781 communes retirées de la zone RIP depuis 2011 pour être rajoutées au 3 400 de la zone dense privée (AMII), seules 33 ont vu un démarrage de travaux effectif, et une seule est fibrée à plus de 80 %.
L’Amel ne peut même pas prétendre diminuer significativement les dépenses publiques, la part de subventions étant devenue presque marginale dans l’attribution des RIP. L’Etat a beau rappeler avec force que les collectivités ont le choix de lancer et d’attribuer ou non un Amel, avec la fermeture du guichet France THD, les collectivités ne peuvent concrètement choisir qu’entre l’Amel et l’Amel.
Destin numérique
L’Etat s’est aussi opposé à ce que les rares collectivités ayant choisi de donner suite à l’Amel puissent sécuriser leur projet par une convention locale d’engagements établie par l’Avicca et ses adhérents, ne leur laissant, in fine, d’autre choix que de transférer la propriété des futures prises et de remettre les clés de leur destin numérique à un tiers, sans aucune possibilité de recours.
La réouverture du guichet, promise par l’Etat pour cet automne, est désormais reportée « courant 2020 ». Le prétexte de l’Amel étant maintenant caduque, c’est dorénavant la réouverture qui est décrétée non urgente, au motif qu’il s’agirait de financer des déploiements assez lointains, du moins du point de vue de l’Etat. Or la plupart des 40 départements en attente de financement national sont prêts à répondre à la demande du gouvernement d’accélérer leurs déploiements.
Ainsi, la Bretagne a d’ores et déjà lancé son appel d’offres pour construire 1 million de nouvelles prises, soit plus que n’en réunira l’ensemble des Amel. L’Etat semble aussi rencontrer des difficultés à évaluer la somme nécessaire pour parvenir au 100 % FTTH, alors même qu’à l’été 2017 le ministre de la Cohésion des territoires l’avait situé entre 1,3 et 1,8 milliard d’euros…
Si je reconnais bien volontiers un réel élan retrouvé s’agissant du dossier mobile grâce au new deal négocié par l’Etat avec les opérateurs en janvier 2018, je n’en regrette que plus encore l’élan brisé vers la couverture 100 % FTTH de la France. Il est urgent de se remettre en marche !
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