La directrice des affaires juridiques de Bercy assure que la France est au minimum des obligations imposées par le droit communautaire
La Commission s’est fixé une règle qui n’est pas propre aux marchés publics : il s’agit de réexaminer toutes les législations à intervalles réguliers, et à peu près tous les cinq ans. Il faut vérifier si les objectifs visés ont été atteints et si la législation est toujours adaptée et pertinente au regard des évolutions économique, politique et sociale. C’est une démarche qu’on ne peut qu’approuver !
Le droit français des marchés publics risque–t-il la critique ?
Il faut raisonner en termes d’opportunité. En décembre 2008, à l’occasion du plan de relance, le code des marchés a déjà bénéficié d’un sérieux toilettage. Nous avions alors supprimé beaucoup des obligations que le droit communautaire n’imposait pas. Nous sommes au minimum des obligations imposées par le droit communautaire et la France ne peut pas, seule, aller plus loin dans la simplification. En réalité, aucun Etat n’est particulièrement visé par l’initiative de la Commission. La Commission a repris les directives en vigueur et interroge les Etats sur leur pertinence. Il faut aussi prendre en compte que, de nouveaux Etats ont rejoint l’Union depuis les dernières directives marchés en 2004 qui auront leur mot à dire pour cette simplification. Notre droit des marchés publics est, il faut le reconnaitre, assez sophistiqué, voire « en pointe ». Il a d’ailleurs largement inspiré le droit communautaire.
Comment se déroule la consultation ?
114 questions sont posées aux Etats membres, questions formulées d’après les observations des Etats eux-mêmes. Parmi ces questions, notamment : comment distinguer entre subvention et marchés ? Faut-il toucher aux seuils ? Comment aider efficacement les PME ? Nous devons répondre avant avril 2011. Compte tenu des délais de négociations, on peut envisager une nouvelle directive en 2013, pour une transposition en 2014…
La France défendra-t-elle de nouvelles positions ?
Nous avons deux chevaux de bataille principaux.
D’une part, la défense des PME : parmi les mesures envisageables, le droit français présente une particularité : l’allotissement. Nous allons, bien évident, défendre le principe de son extension aux autres Etats membres. Nous travaillerons aussi à des mécanismes d’obligation de sous-traitance pour les grosses entreprises.
D’autre part, nous militons pour l’allègement des procédures et la simplification du processus de passation. Par exemple, pourquoi ne pas demander aux entreprises qui soumissionnent des attestations sur l’honneur pour tous les documents demandés, et ne les exiger que pour les entreprises retenues … Certes, de la procédure, il en faut pour assurer l’égalité et la transparence. Mais il faut trouver l’équilibre avec un excès de charge. Par expérience, nous savons aussi que la recherche de la simplification peut, paradoxalement, conduire à des complications accrues !
Par ailleurs, nous entendons évidemment participer aux débats de la commission sur la prise en compte par le droit des marchés publics des considérations sociales et environnementales. C’est aussi un équilibre à trouver entre les différents objectifs que peut poursuivre une politique de l’achat public.
Quelles sont les prochaines échéances du code des marchés publics ?
Outre la transposition de la directive sur les marchés de Défense et de sécurité, qui concerne assez peu les lecteurs de la Gazette, nous venons de terminer la révision de tous les formulaires de marchés publics, avec le même objectif de simplification.
Nous travaillons également avec les élus locaux et les opérateurs économiques sur la demande de la commission d’une directive sur les concessions de services. Je rappelle que le gouvernement français a émis de fortes réserves sur le principe même d’une telle directive. La commission a quand même décidé d’ouvrir le chantier. D’ici la fin du trimestre, nous devrons donc faire des propositions à la Commission.
Quelles sont les orientations de ce texte important ?
Nous n’en sommes plus au projet extrêmement lourd présenté par la Commission en 2007 et auquel nous nous sommes fortement opposés : la Commission voulait étendre le régime des marchés publics aux délégations de service public. Il n’en était pas question et la France avait émis un avis défavorable, de façon assez ferme. La Commission présente désormais un projet beaucoup plus léger, et sur lequel la France pourrait envisager d’entrer en négociation d’ici deux ans, avec pour fil rouge l’idée selon laquelle il ne faut pas toucher à la loi Sapin.
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